Top 14 - Laurent Labit au sujet de l'élimination en quarts : "Je ne voulais plus entendre parler de rugby"
Quatre ans durant, Laurent Labit fut le bras droit de Fabien Galthié en équipe de France. Aujourd’hui à la tête du projet sportif du Stade français, il revient sur l’élimination du XV de France en Coupe du monde, parle de Ben O’Keeffe, de Rassie Erasmus et d’Antoine Dupont… Comme souvent, c’est du sans filtre.
A-t-il été difficile de basculer aussi rapidement de l’aventure en Coupe du monde au quotidien d’un club de Top 14 ?
La fin de cette aventure fut brutale : au lendemain du quart de finale face aux Springboks, il nous fallait déjà dégager de l’hôtel à midi parce que les Argentins nous y succédaient. Les au revoir, les adieux, les machins, il n’y en a pas eu… (il coupe) Tout le monde est rentré chez lui, voilà tout.
Et après ça ?
J’ai passé un jour à la maison sans trop savoir quoi faire… Je n’avais pas prévu d’être là si tôt et ce fut difficile à vivre, oui. Nous avons alors décidé avec mon épouse de partir cinq jours à l’étranger. Je ne voulais pas regarder les demi-finales. Je ne voulais plus entendre parler de rugby. À mon retour de vacances, je me suis dit que la meilleure solution était de basculer sur autre chose et je suis donc arrivé au Stade français. J’avais le devoir d’occuper mes journées : parce que plus elles passaient et plus je me rendais compte, en fait, que nous avions raté quelque chose d’immense, quelque chose que nous avions à portée de mains.
World Rugby a recensé cinq fautes de l’arbitre néo-zélandais Ben O’Keeffe sur ce quart de finale. L’avez-vous encore en travers de la gorge ?
Non, pas du tout. Il n’y a qu’une décision arbitrale qui m’a interpellé sur cette rencontre, c’est l’interception d’Eben Etzebeth sur la passe de Damian Penaud, en début de match. La veille, le même geste avait coûté au demi de mêlée néo-zélandais Aaron Smith un carton jaune, contre l’Irlande….
Dès lors ?
Ce sont nous qui avons perdu le match. Ce n’est pas la faute de l’arbitre. Et ce n’est pas parce que les Springboks nous ont roulés dessus. […] En première mi-temps, on prend 19 points et trois essais à zéro passe : deux ballons mal maîtrisés, un turn-over et basta… Partant de là, on ne peut s’en prendre qu’à nous-mêmes. On n’en est pas à chercher un coupable idéal qui serait l’arbitre.
Néanmoins, le staff tricolore a-t-il été dominé stratégiquement par son homologue sud-africain, lors des dix dernières minutes de cette rencontre ?
Non. Si on ne prend pas ces 19 points en première période, leur stratégie, qui consistait à garder leurs joueurs les plus expérimentés sur le banc pour gérer la fin de match, elle n’existait pas. Là où ils ont été malins, en revanche, c’est en faisant revenir deux joueurs (Pieter Steph du Toit et Duane Vermeulen) au sujet desquels le médecin indépendant de World Rugby n’avait pas signifié de commotion cérébrale. Ils n’en avaient pas le droit et ne l’ont d’ailleurs pas réédité en demi-finale, contre l’Angleterre.
On vous suit...
J’ai aussi lu des trucs où on criait au génie parce que les Springboks passaient d’un match à l’autre à un banc en 6-2, en 7-1 ou en 5-3. Nous ? Quand on changeait de configuration sur le banc de touche, c’est parce qu’on ne savait plus quoi faire… Quand tu perds, tu as toujours tort.
C’est en effet toute la binarité du sport…
Rassie Erasmus (le patron sud-africain) a aussi inventé le fait d’interpeller ses joueurs du haut des tribunes avec des lumières pour leur indiquer l’option de jeu à retenir. Là aussi, on peut l’interpréter comme on veut : si tu gagnes, c’est du génie ; si tu perds, c’est que tu n’as jamais été capable de responsabiliser ses joueurs. Voilà… Celui qui gagne a raison, c’est aussi simple que ça…
Pourquoi n’avez-vous pas sorti du terrain Antoine Dupont, lequel semblait fatigué en fin de rencontre ?
Antoine Dupont, c’est Antoine Dupont. Si on l’avait sorti et qu’on avait perdu le match, on nous l’aurait reproché. Et puis, c’était le seul mec qui pouvait changer le cours du match. (il soupire) Je vais vous dire une chose : si le match était le week-end prochain, on referait exactement la même chose en demandant simplement aux joueurs d’être plus prudents sur certaines actions, voilà tout.
Avez-vous eu Fabien Galthié, depuis ?
Oui. Il prend le temps de réfléchir, de digérer, d’analyser. C’est le patron et il sortira pour s’expliquer dans la presse courant novembre.
A-t-il été heurté de faire dernièrement la Une du journal Voici en tenue d’Adam ?
Il a le droit de faire ce qu’il veut. C’est sa vie privée. Maintenant, Fabien va repartir comme il a toujours su le faire. On espérait être à l’heure en 2023 et on y était presque. Ce dont je suis certain, en revanche, c’est que cette équipe de France sera au rendez-vous dans quatre ans.
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