La chronique d'Henry Broncan

Par Rugbyrama
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Retrouvez "les pas perdus d'un coach", la chronique d'Henry Broncan, l'entraîneur du SU Agen.

DU MOULIAS A ARMANDIE

Vendredi 11 mai :

Première journée complète au SUA LG avec, à 11 heures, le réveil musculaire : du sérieux et de la concentration... comme dans tous les clubs ! Au stade Français, à Gimont... à Panjas !

Panjas qui dispute, demain, sa finale Armagnac. Bizarre contre Montréal. J'aime beaucoup ces deux équipes, la première parce que la Présidente - une femme exceptionnelle (comme toutes les femmes !) - CR est une amie. La deuxième, parce que c'est le pays du Président BL et l'une des meilleures tables du Sud-ouest "chez Simone" - je vous en ai déjà parlé.

Montée dans le bus bleu et blanc et la lueur de cette citation de Jacques FOUROUX ? de Jean-Pierre RIVES ? "Je ne suis pas là pour m'asseoir au fond du car !" En fait, je me retrouve au 1er rang coté gauche auprès du manager Titou R. Le côté droit est réservé au Président DD et au Directeur Général LL. Mes amis du LSC et du FCAG vont sourire : j'ai toujours été contre la vitre, côté droit ! Le strapontin à côté du chauffeur est pour Gillou, l'intendant, déjà mon copain !

Déjeuner dans un hôtel chic de Toulouse : nappes blanches et couverts multiples, grandes assiettes, service zélé - demain Saint Christophe ! - des économies à réaliser ?

Ernest Wallon comble : le Stade Toulousain, vous pouvez l'idolâtrer ou... le haïr mais il faut reconnaître ce qu'il apporte au rugby français et pas seulement en terme de jeu. En particulier, ce stade est magnifique, un vrai stade de rugby avec ses résonances de cathédrale. Terrible, pour les miens, quand les chants rouges et noirs ironisent : "Mais ils sont où ? Mais ils sont où ? Les Agenais ?" Qu'il est lourd à porter, le maillot du SUA en ce printemps 2007 !

Vestiaire de deuil les yeux sur les pieds, les mains dans les cheveux : 47 à 0 ! Un chroniqueur raillera sur le numéro minéralogique. Dans la cour, les fans acclament les idoles toulousaines à leurs sorties. Les miens passent dans l'indifférence, même plus de quolibet, ni de sarcasme, l'ignorance... Je me souviens de Gandhi :

"D'abord, ils vous ignorent
Ensuite ils vous raillent
Ensuite, ils vous combattent
Et enfin, vous gagnez"

Voilà le long chemin que le SUA doit gravir pour retrouver le respect de ses adversaires.

Samedi 12 mai :

Mise en place légère à 17h30, au Moulias. 24 joueurs gagnent Masseube : JC et JS ne seront pas dans les 22 ; pourtant ils sont irréprochables sur le plan de l'investissement mais quel est le joueur du FCAG qui ne l'a pas été, cette saison ? J'ai demandé une faveur au groupe, celui d'inviter ma "garde rapprochée". Ils sont 17 ; manque le Président BL parti au mariage d'un haut personnage - le trésorier ? - de la Ligue. Repas d'adieu fortement amélioré par le foie gras de MM et le Bordeaux de MZ... des histoires, "ça branche", des souvenirs et l'heure des discours : premier en ligne, après avoir affirmé haut et fort que je ne craquerai pas, je ne peux guère aligner que quatre mots ! Récupération, verre de rouge, humour à la rescousse "l'humour, la politesse du désespoir" et nouvel effondrement ! Les copains ne sont pas meilleurs : le Président BS ne peut prononcer une phrase, MM ma conductrice de car inonde son dessert. Avec fermeté PM, le co-entraîneur demande la parole.

PM était, en 1972, mon élève au collège de Samatan, en classe de 5ème, élève attentif mais discret ; le samedi après-midi, il commandait rondement les benjamins du LSC : sur ces terrains de l'enfance, il guerroyait régulièrement avec le troisième ligne de Lannemezan, LR. De bien beaux duels ! A 17 ans, PM, international junior débuta en équipe I, à mes côtés finissants ; à 19 ans, alors que les grands de l'hexagone ovale lui faisaient les yeux doux, Patrick frappa aux portes de la mort, lors d'un grave accident de voiture, diminué physiquement, il reprit pourtant, un an après, le chemin du stade, au grand dam du corps médical ; par la suite, il vint me rejoindre, entraîneur du LSC puis du FCAG. Au printemps dernier, la veille de la demi-finale contre Dax, lors d'un petit match à toucher, je crus bien le perdre à nouveau !

Dans ce samedi soir qui ne voulait pas finir, il ne peut, lui non plus, lui le dur, l'impénétrable dépasser le : "J'ai vu les yeux d'Henry..."

Comme aucun d'entre nous ne pouvait s'exprimer, alors, on a bu et même bien bu, des litres de rosé et des bocks de bières et même du vin de messe : ne le dites pas à nos joueurs !

Dimanche 13 mai :

Moulias plein, bien chauffé par "Un pour tous, tous pour XV ". Soleil, bandas, essai local à la 1ère minute ! On croit à la promenade de santé et l'initiative est parisienne. A la pause, dernière colère : les joueurs ne l'espéraient-ils pas ? Victoire avec bonus, coup de sifflet final, gambades sur la pelouse, courses aux photographes pour ceux qui le méritaient le moins !

J'ai rejoint les vestiaires, nous sommes quatre : JP, PM et GL m'ont suivi jusqu'au bout. Mon fils nous rejoint : Lény est dans ses bras. Pierre sait bien que rien ne peut me rendre plus heureux.

La cuisine de Momo est mon antre d'après match, dans la défaite et dans la victoire ; mes entraîneurs amis la connaissent, les autres ont droit au "salon d'honneur". Mes supporters m'y rejoignent : quelques présents, beaucoup de bises, là aussi quelques larmes.

Je n'ai pas voulu dîner en haute-ville. Tard dans la nuit, je suis resté assis, sur ma colline, au dessus d'Auch, route de Pessan ; c'est de là que la cathédrale me semble la plus belle !

Lundi 14 mai :

10 heures, entraînement à Agen : 12 joueurs valides pour s'ébrouer sous la pluie ; encéphalogrammes plats ; des supporters : "le Gersois est là !" Sur le terrain, rugby à toucher, RC cartonne son coéquipier JM : fracture du plancher orbital ! En travaillant la touche, le seconde ligne sud-africain WS casse une dent à son soutien et compatriote VN. En mettant au point une combinaison, sur une passe de son talonneur marocain, ma vedette fidjienne s'enfonce le pouce dans l'oeil !

A l'infirmerie abondamment garnie, je rencontre quelques espoirs agenais battus, la veille à Lectoure, par le FCAG en quart de finale du championnat de France :

"- Et alors ?

- Quelle vaillance sur les rucks, quel amour du maillot !"

Dimanche je serai avec les auscitains à Auterive, contre les Narbonnais !

PS :

1- FM et AM partent, en juin, au pays des Blacks ; mon pilier gauche mesure le chemin parcouru entre Strasbourg, aux portes de la fédérale et l'équipe de France : il doit beaucoup à ses amis, les joueurs du FCAG, qui m'ont permis de le supporter pendant deux saisons. Je suis très fier de lui. Quant au second, mon ancien élève du collège Carnot, je sais que les malheurs du SUA L&G l'empêchent de dormir et que les panthères roses auront un tigre sur le dos, le 27 mai.

2- La secrétaire du SUA L&G qui tape mon texte n'est pas contente parce que je me réjouis du succès de mes espoirs sur les siens. Un bouquet de fleurs ? Une boîte de chocolats ? Comment font les séducteurs modernes pour se faire pardonner?

3- Panjas a perdu contre Montréal : Chantal a-t-elle eu les yeux humides ?

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