La chronique d'Henry Broncan

Par Rugbyrama
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Dans sa chronique, l'entraîneur agenais Henry Broncan revient sur la victoire des siens à La Rochelle mais aussi, bien sûr, sur les soucis actuels du FCAG, son club de coeur, son club de toujours.

Vendredi 3 avril

Presque le paradis : ciel comme tu l'aimes, soleil comme il te sied, vent comme un zéphyr sur tes cheveux blonds... La longue plage du Bois en Ré, à deux pas des Gollandières, notre quartier général choisi pour préparer le choc de demain. Paul a eu un peu de mal pour franchir les 2 péages mais la bonne humeur est dans le groupe et tout le monde – même Gillou – a pardonné les ultimes atermoiements de notre chauffeur bien-aimé. Sur le sable, le quatuor – deux Fidjiens, deux Tonguiens – ferme la marche de la cohorte. Ils ont beau m'affirmer que leurs pays sont plus beaux, je les sens si heureux de retrouver un océan même s'il n'est pas le leur : leurs mains expertes et puissantes s'exercent à lancer des galets le plus loin possible dans les vagues voluptueuses. Aucun de nos Français ne s'amuse à relever leurs défis : Question : "Savent-ils contre qui nous jouons demain ?" Nos rugbymen de l'Hexagone ne sont-ils pas depuis la formation de l'école de rugby trop inhibés par le fait d'opérer à domicile ? Dans tous les échauffements des cadets, des juniors et bien sûr des seniors, j'entends la violente mais aussi lancinante affirmation : "Nous sommes chez nous, sur notre territoire". A force de le répéter n'en vient-on pas à lâcher inconsciemment la rencontre à l'extérieur puisqu'on sait que nos hôtes sont animés des mêmes sentiments ? Les Iliens eux, sont partout chez eux, plutôt jamais chez eux, d'où des prestations égales à domicile et... à l'extérieur. Ils n &lsquoont pas ce complexe du déplacement trop souvent destiné à l'échec, chez nous.

Petit entraînement sur la pelouse impeccable du modeste mais si coquet stade du Football Club de l'Océan. Heureux footballeurs du district de Charente Maritime à qui l'on demande :

- "Contre qui jouez-vous demain ?
- Nous rencontrons l'Océan !"

Maisons basses, volets bleus ou verts, grands murs blancs jusqu'à hauteur des toits, avec quelques coteaux du Gers, l'île serait parfaite.

Samedi 4 avril

Les forçats rayés de jaune et noirs envahissent Marcel-Deflandre. Nos Bleu et Blanc ont fait le voyage, plus de 300 mais contre 7000 Charentais, la tâche est ardue d'autant qu'on a installé les nôtres, debout, dans l'en-but de l'Ouest : la dernière roulade de Rupeni les consolera largement de cette mise à l'index ! Caucaunibuca, parlons-en : le SUA, réduit à 14, après le jaune de Cabarry, supporte vaillamment l'épreuve de la mêlée, pour l'occasion Du Plessis venant se placer, sur nos introductions, aux côtés d'Opeti... Du Plessis retrouvant pour l'occasion les terres de ses ancêtres chassés par la Révocation de l'Edit de Nantes ! Un coup de pied, au départ semble t-il anodin de Sylvain, direction la vedette fidjienne annoncé au centre, le numéro 11 dans le dos, cette fois-ci décalé sur l'aile droite. Son vis-à-vis également "îlien"... de l'Isle-Jourdain – Isle d'en bas pour les riverains de la Save – a du mal à débloquer les épaules. Le ballon roule sur le sol détrempé par une ultime averse et le ramassage semble impossible à réaliser pour le lourdaud aux 115 kilos et à la course pataude : mal jugé, Caucau ne manque jamais ce genre d'occasion et les 18 ans de Sapparart sont trop frêles pour stopper le camion bleu, blanc, noir.

Serge Milhas a vite compris les lacunes initiales de sa mêlée. En bon Gersois élevé à la mamelle de Jacques Fouroux et de Jacques Brunel, il change son pilier droit. M. Attalah, par ailleurs excellent, attend la 3ème tentative –certainement la moins évidente – pour décider l'essai de pénalisation. Bras levés des Rochelais et la même déconcentration qu'après la réalisation de Ninard au match aller : haut renvoi de Sola, cafouillage de Mac Gowan et Monribot, chasseur de ballons tombés, qui file à dame. A Armandie, il avait fallu passer par une mêlée et donc une charge de Fonua.

Le Rochelais est rude : Richelieu le sait. A la pause, rien n'est joué. Dans les vestiaires Christian et Christophe ont insisté sur la faille défensive qu'ils ont décelé : Ce sont les deux fidjiens qui s'y mettent ; Vaka file à mille à l'heure sur le fermé et quand il sert Caucau, la tribune Nord, si amoureuse des siens, a compris que rien ne pourrait arrêter la star : les drapeaux bleus et blancs et les cris "SUA, SUA..." s'emparent du stade muet de dépit et surtout d'admiration.

Ferrou, ce formidable n°9 que l'on nous dit diabétique, venu de Montchanin et passé par Bourgoin, d'un père tyrossais, relance le match par une de ses percées qu'il délivre à chaque rencontre malgré toutes les surveillances que les chiens de garde exercent sur lui. A 10' de la fin, le jeune Espoir Sapparart, en échec des 20 mètres face en première période, loupe des 40 mètres, également de face. Au match aller, le manque de réussite de Dambielle et de Lacoste avait pesé lourd dans la balance finale.

Les deux formations ont des chances de se retrouver dans la seconde moitié de mai, pour une accession plus ou moins directe à l'étage supérieur. Les Maritimes produisent le jeu le plus structuré de la D2 : les lancements sont les mieux travaillés de cette division encore que leurs passages à vide aient paru moins efficaces qu'en novembre ; l'absence d'un accélérateur de jeu comme Vaquin handicape également cette formation. De même, malgré toutes ses qualités à venir, le jeune Sapparart si chaudement choyé par son mentor, David Darricarrère, est-il capable de postuler si jeune pour ce niveau-là ? Le retour de Boboul n'est-il pas d'actualité d'autant qu'il est indispensable, pour l'emporter, de disposer d'un buteur expérimenté.

Côté SUA, le groupe, de plus en plus confiant, semble prêt pour affronter toutes les épreuves éventuelles. Malgré les absences des Lopresti, Chavet, Narjissi, Barrau, Gelez, l'équipe continue de pratiquer un jeu axé sur l'offensive, en témoignent les nombreux essais marqués, encore trois à l'extérieur. Dans le dernier quart d'heure, la défense s'est mise au diapason, contenant les Jaune et Noir dans leur moitié de terrain et comme l'équipe est de moins en moins pénalisée, on croit en Mai ; en attendant, gare aux joueurs de Roland Pujo si ardents sur Marcel-Bendichou.

A noter qu'à la fin de la rencontre de La Rochelle, David Darricarrère malgré sa déception, a tenu à venir saluer les coachs vainqueurs dans leurs vestiaires... La chevalerie montoise !

Lundi 6 avril

Le rugby Pro ne peut laisser mourir le F.C.AUCH.GERS ! Plus petit budget du professionnalisme depuis la création de celui-ci, le club des Mousquetaires a toujours tenu son rang, inoxydable au Moulias – 29 victoires consécutives de 2003 à 2005 ! – orgueilleux à l'extérieur, club atypique, râleur, souvent hors-la-loi, contestataire, dernier des Mohicans, irrationnel... Ne laissez pas tomber ces fous de l'Ovale qui ont fait tomber les ténors du Stade toulousain à 4 reprises sous l'égide de Jacques Brunel, qui ont rompu l'Agen de Caucaunibuca en 2004, l'USAP de Dagrenat – " il n'y a que les imbéciles qui perdent ici" - la même année, le Stade français de Guazzini en 2008, celui de Lorenzetti et de Berbizier cette saison... Eux ne joueront jamais comme dans le Super 14, eux ne seront jamais dans le rugbystiquement correct... Sans eux, vous marcherez tous pareils, uniformes, derrière le plus gros d'entre vous, soumis, au pas des puissants et des bien-pensants. Souvent vous avez dit avec raison : "Ces Auscitains, qu'est-ce qu'ils sont c... !" Sans ces c... à votre table, vous allez drôlement vous ennuyer !

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