La chronique de Pierre Villepreux

Par Rugbyrama
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Notre expert Pierre Villepreux revient sur le match du XV de France face aux Gallois. Il évoque plus précisement la force mentale des Bleus.

Il est bien connu que les forces et les faiblesses psychologiques d'un joueur et à fortiori d'un collectif se reflètent dans sa production. Elles sont une des composantes qui permet d'accéder à la réussite ou à l'échec.

Les facteurs psychiques qui touchent entre autres, la motivation, la volonté, la concentration mais aussi les émotions peuvent influencer favorablement l'esprit collectif avec lequel une équipe va aborder un match.

Les motifs pour les Tricolores de se transcender contre les favoris du Tournoi étaient nombreux et chacun a su le faire individuellement car cela relève de la personnalité de chacun. Mais les orientations des motivations individuelles se sont mobilisées derrière l'objectif à atteindre dynamisant ainsi le collectif français. Le comportement collectif des Bleus s'est exprimé et s'est transcendé dans cette relation des actions individuelles avec la tache commune, réaction logique de la remise en cause après les deux derniers matchs. Chacun s'attendait à un match difficile, raide, et certainement porteur de conséquences en cas de défaite.

Ce contexte a encore plus mobilisé la volonté de tous alors qu'il aurait pu inhiber cette force psychique. Si elle a, au contraire, été activée, c'est aussi certainement que le staff a su trouver les mots justes pour modifier le comportement moral jugé défaillant contre les Ecossais. Comme par hasard, l'éventuelle fatigue qui, disait-on ici et là, menaçait ce collectif, vu les travaux forcés imposés par le calendrier, s'est brusquement transformée en une robustesse physique qui ne s'est jamais démentie. Elle s'est d'ailleurs le mieux et essentiellement exprimée dans le secteur défensif plus accessible quand une équipe a besoin de se rassurer. Cette défense de fer a permis au fil du match de créer des liens collectifs consistants. L'esprit collectif dans ce match possédait cette assise émotionnelle qui, a contrario, a fait défaut aux diablotins rouges.

C'est aussi cette cohésion et énergie en défense qui leur a permis de faire déjouer les Gallois surpris, sauf sur leur essai, de ne pas pouvoir développer leur jeu. Leur meneur de jeu Jones y perdit son rugby, la pression défensive française très haute ne lui permis pas d'animer le jeu comme il avait su si bien le faire dans les matchs précédents ce qui permit en même temps de transformer leurs joueurs les plus talentueux en joueurs ordinaires.

Pourtant, à 13- 6 en faveur des Gallois, le degré de vigilance d'attention et de concentration pouvait se briser. Ce ne fut pas le cas, loin s'en faut, et Nallet y est sûrement pour quelque chose.

Quand une équipe a de bons résultats, le sentiment de satisfaction est grand et éveille le désir d'aller plus loin mais la force psychique qui a permis ce résultat risque de ne pas être aussi puissante pour la compétition successive (match contre l'Angleterre).

Tous ces facteurs psychiques ont permis à la France de gagner et de reconquérir le c&oeligur des supporters .Ces facteurs sont nécessaires à la performance et il convient de les entretenir mais ils ne sont pas suffisants et pas forcement répétitifs à la demande.

Cette priorité psychologique a rendu un peu fade le jeu offensif des français. Il n'a pas été à la hauteur, les Tricolores étaient frileux pour entreprendre, et quand ils ont essayé, les mouvements collectifs semblaient grippés et les incompréhensions entre partenaires se traduisaient par de mauvaises décisions ou choix de jeu. Le recours au jeu au pied et à l'affrontement individuel a pris le pas sur la recherche d'un jeu plus ambitieux et plus volumineux. L'investissement dans une dimension du jeu se fait souvent au détriment des autres. Ce qui illustre que la crise morale provoquée par les deux matchs précédents a eu du bon mais de manière perverse a aussi provoqué d'autres effets, en particulier au niveau tactique.

Ce jeu sans trop de risques peut satisfaire sur un match qu'il ne fallait pas perdre, mais il ne tiendra pas la route et n'est pas reproductible ipso facto dans d'autres circonstances et d'autres matchs. Déjà, le problème du jeu, de son volume, de sa qualité se posera contre les Anglais. Le rugby rationnel et volitif produit dans ce match ne suffira pas. Il faudra savoir jouer les Anglais sur un registre plus riche sous peine de voir le processus d'évolution recherché par le staff remis à plus tard.

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