La mêlée argentine en souffrance

La vérité d'un match, n'est pas forcément celle du suivant, c'est entendu. Mais la performance des Pumas la semaine dernière à Dublin avait de quoi nous interpeller. Les Argentins ont clairement perdu ce match en mêlée. C'est un événement très rare, presque une révolution copernicienne. Depuis les années 60-70, les Sud-Américains s'étaient toujours faits une spécialité de l'épreuve de force. On se souvient même d'une époque où ils ne comptaient guère que sur ce domaine pour exister (péniblement) au niveau international.

Samedi, les Argentins n'ont pas été ridicules en Irlande, loin de là. Mais la physionomie de la rencontre nous a désarçonnés. Dès la huitième minute, l'arbitre refusa un essai aux Irlandais après une "pénaltouche" et sur la mêlée à 5 mètres qui suivit, on sentit la foule gronder, gronder pour accompagner l'explosion du pack argentin et l'essai facile de Kieran Marmion.

A la 24eme, rebelote, une mêlée à 5 m argentine prit franchement l'eau au point de voir le ballon sortit du côté des verts. Ce fut une humiliation en bonne et due forme, et ce fut le point de départ du second essai signé Bundi Aki. Même le dernier essai, à la 66eme, fut marqué directement sur mêlée par le demi de mêlée remplaçant Luke McGrath s'est engouffré tout droite dans une brèche après une autre mêlée à 5 mètres, moins enfoncée que les deux autres, mais en difficulté quand -même.

Jacques Brunel aura donc forcément analysé cette déconfiture d'autant plus flagrante que les Pumas ont fait mieux que rivaliser sur le plan du jeu offensif. L'essai de Deguy provint d'une combinaison en première main aux petits oignons du trio Orlando-De la Fuente-Sanchez. Une chose est sûr, les quatre piliers argentins, relativement méconnus : Medrano, Garcia Botta, Sordoni et Zeiss ont entendu parler du pays cette semaine de la part de Mario Ledesma et du capitaine Agustin Creevy. Peut-être aussi que Lavanini et Alemano, les deuxième-ligne ont été rappelés aussi aux devoirs de leur charge.

Sinon, c'est un ballon oxygène inespéré pour les Français pas mauvais, eux, face aux Springboks. Ecoutons ce qu'a dit Mauricio Reggiardo dans les colonnes du Petit-Bleu avant de rejoindre ces pumas. Il est conscient du problème : "Ce match va se jouer sur la mêlée et, actuellement, l’Argentine a deux piliers droits qui sont très jeunes. Le titulaire, Santiago Medrano, est de 1996. Son remplaçant, Lucio Sordoni, est de 1998 ! Si l’Irlande a battu l’Argentine samedi dernier (28 à 17), c’est vraiment grâce à la mêlée."

Rendons tout de même hommage à ce pilier au nom de cirque Santiago Medrano. Même s'il a souffert en mêlée, c'est incontestable, il a fini le match avec un total de 25 plaquages (100% de réussite), ce n'est pas l'essentiel mais cela valait le coup d'être précisé.