Costantini, partie 1

Par Rugbyrama
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L'ancien entraîneur de l'équipe de France de handball, plusieurs fois champion du monde, Daniel Costantini, prend la parole à Limoges.

L'EXEMPLE DU HAND BALL ET RUGBY 

1.Les pré-requis de la performance en handball :

Pour utiliser une terminologie rémanente, issue de mes "humanités" d'étudiant en EPS, je me hasarderais à décrire l'athlète-handballeur de haut niveau comme un être développé aux plans "cognitivo-affectivo-psycho-moteur", doté, en plus, de facteurs d'exécution performants : Fort, rapide, bondissant, souple et résistant !

Le handballeur connaissant, maître de ses émotions, capable de s'informer puis d'agir en conséquence est l'objectif de toute collaboration de formation entre : Un sujet (l'athlète), un objet (le handball) et un médiateur (l'entraîneur).

Le soin consistant  à le rendre, encore plus, "capable de...", grâce au développement de ses aptitudes physiques, est plus récent dans l'ordre des priorités. Cette mission supplémentaire, apparue avec l'augmentation exponentielle de la quantité d'entraînement, a créé un besoin nouveau qui a nécessité, progressivement, un traitement quasi spécifique et, de ce fait, de plus en plus, encadré "scientifiquement". 

1.Rappel historique des apports scientifiques dans le handball de performance :

Né, vraiment, après la guerre de 39-45, le handball est, de loin, le plus jeune des "grands sports collectifs".

Apanage, à l'origine, des professeurs d'EPS, en France mais, aussi, ailleurs, il a bénéficié d'une approche "éclairée", sinon "scientifiquement encadrée", dès sa naissance.

Alors que, dès les années 60, certains pays de l'Est (CSSR, Roumanie, URSS, Pologne, Hongrie), grâce au statut des athlètes d'Etat, pouvaient consacrer près de 1000 heures par saison pour l'entraînement, en France, les internationaux ne sacrifiaient, en moyenne, que quelques 250 heures/année à leur préparation !

On comprend donc que, dans ce contexte, notre pratique hexagonale se situait sous l'emprise d'un empirisme "suffisant", pendant que, de l'autre côté du "rideau de fer", se bâtissaient des performances avec d'autres moyens.

Nos approches scientifiques de l'époque (jusqu'aux années 80) se limitaient à une amélioration des conditions d'observation du jeu (statistiques et traitement des images) et d'un meilleur encadrement médical et paramédical à vocation, cependant, essentiellement "thérapeutique".

On peut repérer un "changement de mentalité", vers 1987, quand la FFHB, soucieuse d'atteindre, enfin, "la dignité internationale", s'est fixée des objectifs beaucoup plus ambitieux et s'est doté des moyens pour y parvenir.

Les joueurs de l'équipe de France de l'époque, ayant accepté de multiplier par 3 leur quantité d'entraînement, il a bien fallu que les entraîneurs nationaux en charge "du dossier" se posent de nouvelles questions :

  -   Que faire de ces heures d'entrainement supplémentaires ?

  -   Quelles investigations initiales devaient être menées pour être sûr de l'aptitude à supporter cette augmentation de la charge d'entraînement.

  -   Quelles évaluations allaient permettre de vérifier que "le tableau de marche" était bien respecté ?

Toutes ces questions n'obtiendront pas, ensemble, des réponses satisfaisantes mais, le simple fait de se les poser, était, déjà, un progrès conséquent !

Evoquons, ici, pour l'exemple, quelques solutions envisagées, à ce moment-là :

  -   Mise en œuvre de 4 séances hebdomadaires visant à l'amélioration des "qualités physiques". 2 séances à vocation cardio-pulmonaire, par un travail de course. 2 séances de musculation traditionnelle.

  -   Utilisation d'une batterie de tests (HORVATH-LANDURE) pour évaluer l'état du joueur, par segment.

Tests spécifiques : Cooper, Luc Léger, Force/Vitesse (bicyclette ergométrique).

Utilisation d'un suivi informatique de ces données.

Mise au point, dès les années 90, par le médecin des équipes de France, le docteur ROATTINO, d'un questionnaire permettant de mesure "l'indice de forme", grâce à sa corrélation avec des tests spécifiques tels que le test de "charge/vitesse".

On peut, légitimement et raisonnablement, penser que cette approche nouvelle a contribué à rentabiliser les efforts consentis par les athlètes.

Cet investissement ne se démentira pas, au fil des années et des changements de staff technique.

Des compétences techniques sont venues s'y agréger : Podologue (par exemple). 

1.Quid du handball féminin ?

Si l'on se réfère à la lecture des palmarès, on constate la même réussite, au niveau des filles, mais avec quelques années de décalage.

En effet, si le handball masculin semble avoir monopolisé énergie et moyens, à partir de 1987, force est de remarquer que les mêmes investissements seront accordés au hand féminin à partir de 1996, après le 1er titre mondial des garçons.

Les résultats de cet effort ne se feront pas (trop) attendre, puisque, dès 1997, nos filles remportaient la compétition des "Jeux Méditerranéens",  très relevée au niveau du hand ; puis enchaînaient par une 10e place au Mondial de la même année, avant de s'envoler vers les sommets (finalistes du Mondial 99, Championnes du Monde 2003, série à poursuivre) !

Pour être exhaustif quant aux moyens consentis au secteur féminin vers son complet épanouissement, il faut se souvenir que dans les années 81 à 83, une expérience d'entraînement intensif avait été menée, dans le cadre de la préparation du Mondial junior, en "internant", à l'INSEP, notre équipe nationale, avec tout les soutiens logistiques, scientifiques et techniques, disponibles à cette époque.

Malheureusement, cette expérience ne fut pas un succès, ni au plan du résultat, ni à celui de certains effets secondaires mal maitrisés tels que les ravages d'une pliométrie balbutiante au niveau des genoux de ces demoiselles !

Ce traumatisme mis quelques années avant d'être "digéré".

Il apporte "de l'eau au moulin" de votre séminaire dans le sens des précautions élémentaires à prendre avant d'augmenter la charge de travail. 

1.Qu'en est-il, aujourd'hui ?

De 5 personnes, lors de l'expérience relatée, au niveau des garçons dans le chapitre 2, les staffs tricolores, en masculin et féminin sont, aujourd'hui, de 10 personnes au minimum : 

1 chef de délégation (le DTN)

1 Coach principal

1 coach adjoint

1 manager général

1 Médecin

2 ostéopathes-kinésithérapeutes

1 Préparateur physique

1Vidéoman-statisticien

1 Responsable de la Communication

Et, parfois, au féminin, un préparateur mental. 

Au niveau des apports scientifiques utilisés : 

  1er) Le logiciel "Master coach" qui permet au responsable vidéo de numériser les matchs (ou les entraînements), en temps réel et de pouvoir, ensuite, grâce à ce logiciel, effectuer des montages "à la carte", de séquences de jeu à l'attention de l'équipe ou de certains joueurs en fonction des besoins.

  2e) Les bases de données utilisées par le préparateur physique pour réaliser des programmes de préparation personnalisé et de pouvoir suivre l'évolution de chaque athlète.

  3e) La batterie des tests d'investigation médicaux, tournés, essentiellement, vers la mission de prévention, identifiée, depuis longtemps, comme "fondamentale". 

1.Conclusion

L'entraîneur recherche, en permanence, le progrès pour son équipe.

Ce souci d'amélioration constante passe par différents axes :

La maitrise collective faite de capacité à mémoriser les expériences et d'accumulation de  répétitions à l'entraînement pour déboucher sur des automatismes collectifs.

Le développement des capacités individuelles sur tous les plans : physique, technique, psychologique...

La créativité de chacun, découverte, respectée, entretenue et qui sera susceptible de faire la différence dans les moments déterminants, basée, essentiellement, sur le sens de l'anticipation.

Tous ces éléments seront traités, successivement et spécifiquement, par la pratique de l'exercice grâce à la collaboration de tous les intervenants autour de l'équipe.

Il demeure, cependant, essentiel que le joueur soit capable de faire, à son niveau, la synthèse de toutes ces interventions.

A ce sujet, l'apport de démarches ou procédés scientifiques doit contribuer à mieux cerner cette problématique de "la recherche du progrès permanent".

Dans le domaine sensible de "l'évaluation", des outils mieux maitrisés permettront, certainement, une meilleure mesure.

Mais, ce qui importe, avant tout, c'est que le binôme de base : Joueur-Entraîneur ait la même perception des objectifs poursuivis et la même compréhension des moyens mis à leur disposition pour devenir meilleurs. 

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