Nyanga : "Je ne voulais pas avoir de passe-droits"

  • Yannick Nyanga (Racing 92)
    Yannick Nyanga (Racing 92)
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Au sommet de son art, Yannick Nyanga raccrochera les crampons à l’issue des phases finales de Top 14. Pour Rugbyrama, il s’est confié sur cette décision et les raisons qui ont guidé ce choix.

Rugbyrama : Vous avez officialisé votre fin de carrière à l’issue de la finale de Champions Cup. Pourquoi avoir attendu si longtemps ?

Yannick Nyanga : Je ne voulais pas être au centre de l’attention et je ne voulais pas non plus avoir à le regretter trop vite. Mais c’est quelque chose de mûrement réfléchi et je pense que c’est la meilleure décision pour moi. Plutôt que d’être triste en me disant que c’est fini, je préfère me dire que je suis content que tout cela me soit arrivé.

C’est-à-dire ?

Y.N. : Je suis heureux de m’être retrouvé par hasard sur un terrain de rugby alors que je ne connaissais rien de ce sport. À Agde, mon père voulait que je fasse une activité, j’ai vu des enfants jouer au rugby un mercredi après-midi et j’ai été jouer avec eux. Mon premier entraîneur m’a tellement bien accueilli que même si je pensais faire du foot plus tard, je n’y suis jamais allé. J’ai rencontré des gens formidables qui m’ont fait aimer ce sport. Du coup, je m’y suis donné corps et âme, j’ai fait des bons matchs et Béziers est venu me chercher. L’histoire est magnifique ! J’ai pu vivre des moments exceptionnels qui ont dicté ma vie. J’ai eu la chance de bien la gagner en me levant tous les matins pour faire ce que j’aime le plus au monde. Avant de commencer la vraie vie, j’ai eu droit à 30 ans de bonheur incroyable (il a démarré le rugby à 5 ans). Je suis un privilégié et j’ai plus envie de dire merci que dommage.

Même si vous affirmiez encore avant la finale ne pas avoir pris votre décision, on imagine que ce n’est pas l’échec face au Leinster (15-12) qui l’a précipitée..

Y.N. : Effectivement, le cheminement n’a pas été : on a perdu, je suis triste, j’arrête. Cela fait un petit moment que le club m’a proposé quelque chose pour l’après-carrière et les discussions ont démarré très tôt, dès la fin de saison dernière. On m’a dit : "si tu veux continuer, on a quelque chose pour toi, si tu veux arrêter, on a aussi quelque chose à te proposer". C’est quand même un immense privilège ! Pour avoir vu beaucoup de joueurs arrêter, je me suis bien rendu compte de la chance que j’avais.

Il était important pour moi de ne pas faire l’année de trop

Pourquoi avoir choisi d’arrêter ?

Y.N. : Je devais être honnête envers moi-même et envers mes coéquipiers. En tant que leader, j’ai un devoir d’exemplarité. Et l’exemplarité, ce n’est pas seulement quatre-vingts minutes le week-end. C’est aussi tout le reste de la semaine. Si tu peux t’entraîner de moins en moins et en faire de moins en moins…cela a penché dans la balance. Je ne voulais pas avoir de passe-droits. Plein de gens m’ont dit : "tu aurais pu continuer un an de plus et te gérer". Mais pour ma part, si je fais quelque chose, je le fais à fond ou je ne le fais pas.

À quel moment de la saison avez-vous décidé de dire stop ?

Y.N. : Je ne saurais pas le dire exactement car même si la décision est prise, calée, réglée…au fond de moi, il y avait toujours un petit doute. C’est comme dans un couple, parfois cela ne va plus et on sait que cela va se terminer mais tant que ce n’est pas officiel il y a toujours ce petit quelque chose qui te fais dire "Et si finalement…".

Vous n’avez jamais semblé décliner, que ce soit physiquement ou rugbystiquement. Cela a-t-il contribué à instaurer ce petit doute ?

Y.N. : Si cela avait été le cas, je l’aurais franchement mal vécu. Pour avoir vu plusieurs coéquipiers arrêter, certains l’ont fait au bon moment, d’autres moins. Et il était important pour moi de ne pas faire l’année de trop. Après, je ne dis pas que c’est une décision facile à prendre car quand le livre se ferme, il se ferme pour de bon.

Avec l’âge, tu sens que tu récupères de moins en moins vite et que ce que tu dois faire pour être bon te demande énormément

Y-a-t-il eu malgré tout un déclic ?

Y.N. : Pas vraiment. Mais avec l’âge, tu sens que tu récupères de moins en moins vite et que ce que tu dois faire pour être bon te demande énormément. Beaucoup plus d’étirements et de soins, beaucoup de récupération, je vais voir plus souvent les kinés et les osthéos… Je me permets aussi beaucoup moins d’écarts car plus on avance dans l’âge, plus les excès sont durs à éliminer. Plus on vieillit, plus on doit faire de choses contraignantes pour être bon et il faut se les imposer, car c’est à ce prix-là que tu peux être bon. On peut moins en faire aussi. Avant, je restais toujours plus tard à la musculation ou à faire du cardio. Là, c’est plus aux soins pour récupérer car le moteur n’encaisse plus les mêmes charges. Il y a plein de petits facteurs qui te pousse à te dire que c’est la fin.

Les retraites annoncées de vos anciens partenaires Vincent Clerc, Frédéric Michalak ou Florian Fritz ont-elles influencées votre choix ?

Y.N. : Non mais je les ai eus au téléphone. Ils savaient pour moi comme je savais pour eux avant qu’ils ne l’annoncent. Je ne sais pas si cela a rendu les choses plus faciles mais ils savent en tout cas ce que je vis, on échange et on peut se conseiller mutuellement.

Vous êtes à deux matchs d’un dernier titre en carrière. On imagine votre détermination à finir en beauté.

Y.N. : On cherche toujours dans un match la petite histoire qui peut nous apporter un supplément de motivation. Là, elle est toute trouvée. On a passé une saison exceptionnelle et je me suis vraiment régalé avec ce groupe. Il ne sera plus le même la saison prochaine et on a vraiment à cœur de bien terminer. Et il sera alors de temps de penser à la suite, toujours au Racing 92 mais plus sur le terrain.

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