Adrien Pelissié : "Traverser le terrain me ferait rêver"

Contre les Maori All Blacks (victoire 19-15), vous inscrivez le deuxième essai des Barbarians... Racontez-le nous ?

C'est un essai collectif qui part d'une touche : le ballon me revient puis je pars légèrement sur le côté en voyant le maul tourner, et de l'espace devant moi. Tout le monde fait l'effort de pousser, à tel point qu'on finit dans l'en-but. Je réussis à aplatir mais c'est surtout beaucoup de fierté d'avoir obtenu cette sélection avec les Barbarians, parce que cela représente beaucoup dans le rugby français. Avoir joué à Bordeaux entouré que de bons mecs, dans un stade plein et devant un public magnifique, c'est un super souvenir rugby !

Si on vous aviez dit au début de la saison que vous porteriez le maillot des Barbarians...

Je jouais encore en Pro D2, il y'a six mois ! J'étais donc loin de penser que tout allait s'enchaîner à cette vitesse pour moi. Cette sélection avec les Baa-Baas c'est quelque chose de super pour moi, maintenant il faut que je continue à travailler et surtout ne pas me prendre la tête. Je dois rester à ma place parce que dans ce sport tout peut aller très vite, en haut mais également en bas.

"On s'est tous envoyés comme des fous"

Sur l'action, vous êtes au lancer puis à la conclusion. On imagine que c'est particulièrement jouissif de marquer après un maul porté...

Un maul c'est comme une mêlée, quand on l'enfonce et qu'on l’emmène dans l'en-but c'est très important, parce que cela marque l'adversaire au fer rouge. Il pleuvait donc nous ne pouvions pas multiplier les passes. Nous avons réussi à les concentrer devant et à leur faire des mauls portés : au vu du scénario, c'est un essai qui leur remet un petit coup de massue sur la tête (les Maoris venaient d'inscrire un essai et de revenir à 8-8). Sur l'action, nous avons tous poussé ensemble, dans le même sens, ce qui nous a permis de franchir la ligne.

Sur cette action, on a l'impression que vous répétez vos gammes et que chacun sait très bien ce qu'il a à faire...

Même si tous les clubs ne procèdent pas de la même façon, un maul reste un maul : on sait que si tout le monde est bas, serré, pousse dans le même axe et dans le même sens, et que le ballon est au fond... Alors nous allons construire quelque chose de fort et ce fut le cas sur cette action. Vendredi, tout le monde s'est envoyé comme des fous ce qui nous a permit de marquer cet essai. C'est une phase de jeu très importante dans le rugby parce qu’avoir un bon maul permet d'avancer et de mettre en difficulté l'équipe d'en face.

"Je ne rêve pas à plus que je ne peux avoir"

Votre coéquipier Sébastien Taofifenua vient d’être appelé avec le XV de France pour préparer le match contre l'Afrique du Sud. Est-ce que cela vous donne des idées ?

Je suis très content pour Sébastien qui le mérite et qui a encore fait un gros match vendredi soir : cela montre surtout que le staff du XV de France a jeté un œil sur ces Barbarians. La saison dernière, je jouais à Aurillac en Pro D2 et il n'y avait pas beaucoup d'internationaux français donc c'est un changement pour moi. Cela fait cinq mois que je suis à Bordeaux, j'ai pu disputer quelques matches de Top 14 mais n'ai encore rien prouver. Je bosse dans des conditions de travail qui sont idéales, avec une bonne équipe mais aussi de bons coaches. Je suis très dur avec moi même donc je travaille dans tous les domaines pour être bon partout. Je ne suis pas de ceux qui rêvent à plus qu'ils ne peuvent avoir mais comme tout joueur de rugby je garde l'équipe de France dans un coin de la tête.

Le score est alors de 8-8 quand vous décidez de jouer une pénaltouche qui débouchera sur votre essai. C'est ça l'esprit Baa-Baas ?

L'esprit Barbarians ce n'est pas de faire n'importe parce qu’on sait très bien que nous aurions pris des essais et perdu le match si nous avions jeté des ballons. Sur le moment, nous avons décidé de prendre la touche dans une logique pragmatique mais également parce qu’il y'avait l'esprit Baa-Baas. C'était un choix d'équipe de prendre la touche, et tout le monde a tiré dans le même sens. Si la décision du capitaine avait été de prendre les points, alors nous nous serions exécutés sans nous poser de question. Une fois la touche trouvée, chacun a rempli son rôle à la perfection.

"Nous avons donné une belle image du rugby"

Vous aviez inscrit cinq essais la saison dernière, déjà deux cette saison. Est-ce que c'est celui-ci dont vous êtes le plus fier ?

Je suis surtout fier d'avoir gagné avec cette équipe, tout en restant modeste parce que nous n'affrontions pas les "vrais" All Blacks. On a réussi à préparer quelque chose cohérent, à montrer qu'avec beaucoup d'envie et de courage nous pouvions réaliser de belles choses. L'esprit des Barbarians était présent toute la semaine et a débouché sur une belle prestation face aux Maori : c'est une belle image du rugby, et c'est très important dans le monde d'aujourd'hui. Après avoir vécu de tels moments, nous avons forcement tous envie d'y revenir.

Quel serait l'essai de vos rêves ?

Un essai au cours duquel je parviendrais à traverser le terrain suite à un exploit personnel (rires). Si possible avec une succession de raffuts, de changements d'appuis, et dans un Chaban (stade Chaban-Delmas) plein à craquer, sur un match serré... Mais ce n'est qu'un rêve !