Chronique de P.Villepreux

Par Rugbyrama
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Retrouvez chaque semaine la chronique de Pierre Villepreux, notre consultant. Il évoque les différentes démarches de formation.

La propension soudaine des entraineurs avant la Coupe du monde à se mobiliser sur un jeu qui demande de la part des joueurs une réactivité adaptative plus élaborée, nous amène forcement à entrer dans la dimension si complexe de la formation du joueur.

Je ne suis pas pour autant certain que derrière les discours, les formes de travail réalisées soient en adéquation avec le jeu espéré.

En effet, la manière de s'entrainer devient déterminante pour accéder à un jeu dont la caractéristique essentielle reste sa dynamique, avec la volonté d'aller vers plus de mouvement. Il s'agira alors de jongler avec les aléas du jeu et, forcement, de sortir de la notion de jeu programmé qui était il y a encore peu de temps le credo indispensable pour espérer gagner.

2 options :

- soit les formes d'entrainement placeront les acteurs du jeu en situation de restituer des formes modélisées, avec l'espérance que, le travail bien fait, la reproduction idéale sera à même de garantir une parfaite réalisation .

Le joueur dans ce type de travail perd l'initiative. C'est de la répétition de séquences et placements imposée de l'extérieur, hors de la complexité du jeu, que viendra éventuellement l'adaptation. (Les directives de l'entraineur ne posent pas les vrais problèmes, il réduit considérablement leurs singularités : on est dans le comment faire). Le joueur perd son identité et, sans prise de risque, se soumet aux formes travaillées. Le jeu est celui de l'entr aîneur, il n'appartient plus aux joueurs.

- Soit les joueurs sont confrontés au jeu dans toute sa complexité ce qui les amène à traiter eux-mêmes les problèmes, les incertitudes, les moments d'imprévisibilité que posent le rapport d'opposition (la relation joueur - contexte situationnelle devient premier). L'activité décisionnelle du joueur est mobilisée, le sens qu'il va donner à la situation va lui donner le pouvoir de créer , d'adapter son jeu, de le construire en relation avec ses partenaires afin de répondre aux réactions défensives. Ainsi libéré, le joueur sera engagé à rechercher dans la gamme des possibles la meilleure option (on est dans le pourquoi). On donne du sens au jeu puisque c'est le jeu qui génère du sens. L'incertitude qui surgit devient familière. Choisir, décider, changer devient un 3art de vivre son activité".

Dans cette forme de travail les joueurs seront à même de prélever les indices pertinents nécessaires à sa compréhension de la situation. Ces indices guideront l'action. A force de les vivre, ils seront de mieux en mieux identifiés, reconnus, analysés et la réponse du joueur de plus en plus adaptée. Réponse qui inclut bien les savoir faire techniques.

Les deux démarches de formation ont le même objectif, mais elles différent dans le comment travailler, donc dans la présentation des contenus d'entrainement.

Les tâches à réaliser seront dans un cas imposées, dans l'autre elles émergeront logiquement des situations- problèmes créées et aménagées. L'activité adaptative du joueur sera sans cesse mobilisée en fonction des problèmes rencontrées (les solutions ne viendront pas de l'extérieur).

Les démarches sont non seulement différentes mais l'entraineur n'y a pas le même pouvoir ni ne procède de la même manière pour animer et évaluer.

Il s'agit bien de perfectionner des joueurs pour les amener à une activité adaptative supérieure, pour former des joueurs qui savent ce que c'est que prendre des risques.

On peut toujours penser que cette dimension est la propriété des meilleurs joueurs qui quelle que soit la méthode s'en sortiront tout le temps. Certainement, mais les plus pénalisés seront les moins doués qui dans les situations rencontrées n'auront pas la même malléabilité cérébrale pour sortir de ce qui est prévu. J'ajouterai que même ceux ayant eu une formation adaptée ont du mal à désobéir, car le "tu dois faire" lui enlève une part de sa responsabilité ( sinon toute).

Il est navrant d'entendre dire régulièrement par les joueurs "on n'a pas suivi les consignes". Explication logique qui reflète la tendance des entraineurs à mettre en place tout en même temps des situations standards et les solutions qui ne sont qu'une partie du jeu. On cantonne les joueurs dans un registre préétabli, (ces derniers d'ailleurs trop souvent s'en accommodent) limitant ainsi les occasions de les placer dans des situations et options de jeu plus créatives.

S'entrainer à agir et réagir face aux incertitudes que proposent le jeu demande du temps et implique que la formation se réalise durant toute la carrière du joueur. Accumuler un maximum d'expérience permettra tout en même temps d'accéder "en plein mouvement" à une confiance en soi incontournable pour prendre des initiatives et ne plus être soumis à des schémas.

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