Tebani : "Je veux que le rugby se développe en Algérie"

  • Salim Tebani donne ses consignes aux joueurs de la sélection algérienne
    Salim Tebani donne ses consignes aux joueurs de la sélection algérienne
  • International - Le filles du club de M'Sila entourées (à droite) par Salim Tebani et son frère Djemaï (à gauche)
    International - Le filles du club de M'Sila entourées (à droite) par Salim Tebani et son frère Djemaï (à gauche)
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INTERNATIONAL - Aujourd’hui âgé de 41 ans, l’ancien talonneur passé notamment par le Stade français, Lyon ou Oyonnax, où il a été sacré Champion de France de Pro D2 en 2013, œuvre avec son frère Djemaï pour le développement du rugby en Algérie, membre associé de World Rugby depuis mai dernier.

Premier capitaine de l’histoire de sa sélection et premier sélectionneur des Lions, Salim Tebani livre pour Rugbyrama les raisons de son départ du banc fin 2017 et explique l’ambition de son association "Le Coq et le Fennec".

Rugbyrama : Quelle est la genèse de l’histoire moderne du rugby en Algérie ?

Salim Tebani : Le début de l’histoire, c’est en 2006 avec mon frère Djemaï qui a ramené le premier ballon de rugby en Algérie. Il a refait naître le rugby en Algérie et on a créé le premier club à M’Sila. On était passionné par cette idée de créer cette Fédération, d’apporter notre expérience, d’apporter ce sport qui est fabuleux, qui a beaucoup de valeurs et qui pouvait apporter beaucoup de choses à la jeunesse algérienne. On s’était dit que l’on pouvait tenter le coup. Mon frère s’est beaucoup investi en prenant un congé sans solde d’un an pour aller vivre là-bas. Il a fait des tournées dans le désert. Il a tout mis de côté pour le rugby algérien ! C’est un pionnier. Et nous avons travaillé ensemble pour pouvoir créer cette Fédération.

Être le pionnier, l’on imagine que c’est une grande fierté surtout que c’était pour vous deux une prise de risque à l’époque ?

S.T. : J’ai été le premier capitaine lors du premier match en 2007, contre la Tunisie. J’y suis allé avec plaisir et on avait gagné. À l’époque, c’était une association et pas une Fédération. J’ai donc pris le risque, à l’époque, alors que je jouais à Oyonnax, de faire des matchs avec l’Algérie. J’avais l’accord de Christophe Urios (alors entraineur de l’US Oyonnax, ndlr). Je prenais des risques car j’aurais pu me blesser et perdre mon contrat. Ma carrière sportive s’est poursuivie et j’ai joué quelques matchs avec l’équipe d’Algérie. Une fois qu’elle s’est arrêtée, on m’a demandé d’être le sélectionneur. J’ai trouvé cela très gratifiant car c’était une fierté pour moi d’être sélectionneur aux côtés de mon frère. On devenait alors les premiers sélectionneurs officiels de l’histoire du rugby algérien.

Pourquoi l’histoire s’est donc arrêtée en décembre 2017 ?

S.T. : On a fait un premier tournoi à Malacca en Malaisie puis le premier match officiel au pays en 2015, permettant à la Fédération d’être reconnue. Ma mise à l’écart remonte au Tri Nations 2016, un tournoi que l’on a créé au Maghreb entre l’Algérie, le Maroc et la Tunisie. Mais nous avons perdu les deux matchs d’un point à la dernière minute… Avant le Tournoi, on avait pourtant une promesse de notre président pour pouvoir continuer l’aventure. Et j’avais demandé à pouvoir préparer la prochaine édition mais on m’avait expliqué que les stages ne servaient à rien car la Tunisie et le Maroc étaient soi-disant d’un niveau inférieur. Le Tournoi est arrivé et avec mon frère Djemaï, nous avons dû tout gérer : le management, le sportif, et même le ballon en passant par les maillots. Tout en rappelant que nous étions bénévoles ! On partait dix jours, mon frère Djemaï posait des congés sans soldes alors que mon petit frère ostéopathe fermait son cabinet. C’était un investissement mais c’était la normalité car on aime notre pays et notre sport. Plus tard, j’ai reçu un mail du président que je connaissais depuis pas mal d’années et avec qui j’avais joué en équipe d’Algérie m’expliquant que je ne faisais plus partie de l’aventure pour la raison suivante : trop de rigueur vis-à-vis des joueurs. Alors que l’on m’avait recruté pour avoir de la rigueur et du professionnalisme. J’étais alors très déçu, vexé et trahi. On m’a viré ainsi que mon frère, toute la famille Tebani alors que l’on avait œuvré pour le rugby algérien, sans même avoir été convoqués. J’étais le manager, je reste responsable des défaites mais il y a une co-responsabilité car le Tournoi a été mal préparé. Beaucoup de choses ont été défaillantes.

International - Le filles du club de M'Sila entourées (à droite) par Salim Tebani et son frère Djemaï (à gauche)
International - Le filles du club de M'Sila entourées (à droite) par Salim Tebani et son frère Djemaï (à gauche)

On sent beaucoup de frustration…

S.T. : Il y a de la frustration car j’ai des idées, une compétence et une expérience. Avec mon frère, on a beaucoup bossé. On a passé des nuits blanches à travailler sur le rugby algérien. La Fédération a été créée officiellement au moment où l’on a été écarté. On a préparé un gâteau du début à la fin mais quand il a fallu le manger, on n’a pas eu le droit… Après, je ne suis pas aigri. Je veux continuer à participer avec mon association et apporter aux jeunes du plaisir. Je suis encore très jeune, j’ai mes diplômes d’entraineur et je ne ferme pas la porte pour revenir en équipe d’Algérie que ce soit dans le bureau ou dans le sportif. Je veux que ce sport se développe en Algérie. On a œuvré pour parler du rugby algérien. On n’en avait jamais entendu parler. C’était important de le faire. Du coup, le but suprême est vraiment d’apporter quelque chose aux jeunes qui sont demandeurs de ce sport, de pleins de choses et qui ont besoin d’être accompagnés. Je trouve ça bien. Et mon frère Djemaï restera le pionnier ! Je ne veux pas qu’on l’oublie.

On est dans une idée du développement du rugby et du sport, mais surtout pour donner du rêve à ces gamins

Vous continuez donc à œuvrer, avec une association, pour le rugby algérien.

S.T. : L’Algérie restera mon pays autant que la France. Le rugby est une passion et le restera toute ma vie. Et avec mon frère, nous avons créé l’association "Le Coq et le Fennec" pour promouvoir le rugby en Algérie et continuer à travailler là-dessus. Nous avons fait un repas caritatif avec Jonathan Wisniweski et Hamza Kaabèche ou encore les anciens footballeurs Grégory Coupet et Sidney Govou pour pouvoir récolter des fonds.

Quel est plus précisément l’objectif ?

S.T. : L’objectif, c’est de permettre de créer des échanges entre la France et l’Algérie à travers le rugby, mais aussi d’autres activités sportives. On a prévu de partir là-bas avec Sidney Govou, ancien joueur de l’équipe de France, pour qu’il apporte à des clubs de football. J’y suis encore allé en septembre pour faire des journées portes ouvertes. Dans notre club, il y a aussi des filles qui jouent. On les aide pour leur apporter du matériel et des compétences car on forme à distance des entraineurs. On est dans une idée du développement du rugby et du sport mais surtout pour donner du rêve à ces gamins.

Et quelle sont aujourd’hui vos activités ?

S.T. : J’ai créé une société qui s’appelle "Talhonneur Consulting" avec plusieurs activités comme de la formation au management, du Team Building avec d’autres sportifs de haut niveau, de la préparation mentale pour accompagner des sportifs de haut-niveau, et je fais aussi quelques conférences, parfois en duo avec d’autres sportifs. J’essaie d’apporter mon expérience du haut-niveau et suite à ma formation avec Denis Troch, pour apporter une plus-value à une entreprise sur des thématiques comme la solidarité, la cohésion d’équipe, la gestion de conflits, la situation managériale et le changement. Tous ceux qui travaillent dans des entreprises sont, à mes yeux, des sportifs de haut niveau.

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