On a vécu la cérémonie d’ouverture de la Coupe du Monde au cœur de Twickenham

"Which Scottish dialect you speak ?*" La remarque est cocasse mais traduit bien la situation plutôt inhabituelle. Quelques Français utilisant donc la langue de Molière mais vêtus de kilts, dans les travées de Twickenham (sic). Le hasard fait qu’elle émane d’un Norvégien de passage à Londres sans savoir que la Norvège était – autrefois – alliée à la France et l’Ecosse contre… l’Angleterre ! La "Vieille Alliance" dit-on. Ce groupe de Français débarque donc dans le temple du rugby pour l’ouverture de ce mondial anglais. Dans quelques heures débutera le premier duel entre le XV de la Rose et les îles Fidji.

"Sweet Caroline" puis la cérémonie

On connaît l’humour britannique, mais la provocation française interpelle et a parfois du mal à passer. Bien sûr, les remarques sont toujours conviviales et cherchent surtout à savoir si la tradition est totalement respectée… Qu’importe, la cérémonie d’ouverture va bientôt débuter. Pas le temps de s’attarder sur les plaques des illustres noms ayant un jour foulé la pelouse de Twickenham et jonchant les murs de l’enceinte. Le public anglais donne de la voix et reprend un mythique "Sweet Caroline, ba ba ba !", bras en l’air, qui lance enfin l’ambiance dans cette illustre enceinte qui se remplit à vitesse grand V.

19 heures, le compte à rebours est lancé. Un clip démarre sur les écrans dans lequel le Prince Harry montre ses talents d’acteur, avant son discours, et les premiers frissons sont là. Puis, place au spectacle ! Les effets lumineux s’enchainent tout comme les performances des danseurs, le tout agrémenté d’une bande sonore en live. D’illustres noms du rugby international sont à l’honneur avec une mention particulière pour Martin Johnson et le Sud-Africain Chester Williams. C’est fort, c’est classe, c’est SO BRITISH ! Le spectacle devient pyrotechnique et le Trophée Webb Ellis trône sur un ballon géant.

"Swing Law, Sweet Chariot" versus "Cibi"

"What’s wrong with you ?**" Oui, on l’a peut-être oublié, mais ces Français sont toujours vêtus de kilts. La cérémonie fut courte mais intense, on peut donc relâcher la pression mais les questions reviennent, qu’est-ce qui est bien passé par la tête de ces "frogs***" ? Les mangeurs de grenouilles n’en ont que faire, ils attendent avec impatience l’entrée des joueurs. Ca y est, la bande à Chris Robshaw sort du couloir et c’est tout un peuple qui se lève pour entonner le "God Save the Queen". Les décibels mettent les tympans à l’épreuve et les bras frissonnent. Tout le monde l’attendait !

Puis les Fidjiens forment un V, non pas celui de la victoire mais celui du "Cibi", leur danse. Mais le public anglais a fait son choix, il ne laissera pas ce cri de guerre se faire entendre, préférant entonner son célèbre "Swing Law, Sweet Chariot". "Balance toi doucement, doux chariot" dit-elle, en hommage à Chris Oti qui sorti le XV de la Rose d’une situation bien mal embarquée lors d’un match dans ce même stade en 1988. On peut regretter que les supporters n’aient pas fait silence pour ce moment sacralisé mais c’est leur Coupe du Monde, et le Français en kilt n’a pas vraiment légitimité à l’ouvrir…

"God Save the Queen" versus "La Marseillaise"

"Allons enfants de la patrie… " C’était trop fort pour résister. Le match débute, les minutes passent et les Anglais éprouvent des difficultés face à des Fidjiens joueurs mais l’Angleterre mène au score. Au retour des vestiaires, c’est le moment choisit par les Bleus présents au stade pour se faire (encore) plus remarquer. Une "Marseillaise" débute derrière l’en-but anglais et ces autres Français en kilt reprennent à tue tête. Dans un moment de silence, de doute, elle fait son effet et fera parler. Elle sera chantée deux fois. Le point de départ d’une habitude sur tous les stades de ce Mondial ? Si seulement…

Finalement, le XV de la Rose décroche un bonus offensif pour ouvrir cette huitième édition de la Coupe du Monde sans pour autant véritablement convaincre au terme d’un match où les Anglais ont surtout laissé transparaitre un brin de stress. Quant à ces Français drôlement vêtus, loin du cliché béret-baguette, ils en ont pris pleins les yeux. Ils viennent de vivre une expérience "Highlander", en référence à ces habitants de la région montagneuse des Highlands en Écosse, et ne sont pas peu fier d’avoir voulu jouer les trouble-fêtes dans le temple du rival ancestral. Culottés (ou pas) ces Frenchies !

* "Quel dialecte écossais parlez-vous ?"

** "Qu’est-ce qui ne va pas chez vous ?"

*** Ces grenouilles