Toulouse, l'implacable réalisme

Ne jamais baisser sa garde. Ne jamais manquer de vigilance. Ne jamais relâcher la pression exercée sur l'adversaire. Voilà les sévères enseignements que pourront retenir les Montpelliérains de leur confrontation face au champion d'Europe. Contre l'ogre toulousain, chaque erreur était immédiatement sanctionnée. Beaucoup disent que c'est dans cette faculté que l'on trouve la marque des grands. Et Toulouse l'a encore démontré jeudi soir en donnant une véritable leçon de réalisme à son adversaire. Il fallait tout de même attendre vingt bonnes minutes pour que le collectif toulousain n'entre véritablement dans ce match: pris à la gorge par l'excellent pressing défensif montpelliérain, menacé sur les extérieurs par la vitesse des jeunes trois-quarts héraultais et leur inépuisable soif de jeu et de relances, les Toulousains mettaient un certain temps avant de mettre la machine en ordre de marche.

Personne ne s’affolait et chacun prenait ses responsabilités. Toulouse commençait par assurer sa conquête avec un Jean Bouilhou encore impérial dans les airs (avec 5 prises à lui seul) en première mi-temps et en favorisant les lancers courts pour le capitaine Thierry Dusautoir en seconde. Le pack avait également su réagir quand il le fallait. La conquête assurée, les Toulousains pouvaient faire confiance au jeu au pied de David Skrela pour retourner dans le camp adverse et marquer après un enchainement de quatre temps de jeu: trois départs au ras, avec Vergallo, Poux et Lecouls, avant d'écarter le ballon à quarante mètres de là, où Maxime Médard attendait patiemment de porter son premier coup. Enchainer au ras puis écarter pour déborder une défense qui recule. Simple, efficace, imparable.

La variation toulousaine

Piqués par cette incartade adverse, les Montpelliérains ont ensuite été bien plus vigilants sur les extérieurs. "Cela fut plus compliqué que ne l'indique le score. Leur défense était très agressive. Nous avons fait quelques fautes de main qui à chaque fois cassaient la dynamique que nous tentions de mettre en place ", avouait le troisième ligne toulousain Louis Picamoles. Skrela, en fin tacticien, dégainait alors une autre arme: le jeu au pied court, et ainsi portait le danger dans la zone située juste derrière le premier rideau défensif. Là encore, le coup porté était aussi rapide que brutal: jeu au pied rasant, récupéré par Médard, essai. "On les savait très bon dans le jeu au pied, et ça n'a pas loupé: ils ont su s'en servir", déplorait le capitaine héraultais Ouedraogo.

Quatre minutes plus tard, Skrela délaissait cette fois le jeu au pied pour tirer de son attirail un autre atout, tout aussi dévastateur, en la personne du pilier samoan Census Johnston, lancé plein champ. Essai. Là encore, une recette simple et efficace. La dernière réalisation était également symbolique: acculé dans ses cinq mètres, l'alignement montpelliérain déviait une touche toulousaine. Surgi de nulle part, Johnston aplatissait au nez à et à la barbe des héraultais. Là encore, erreur, sanction.

Bref, Toulouse s’envole en tête du Top 14, disposant de sept unités sur son nouveau dauphin, Clermont. Les champions d’Europe en titre ont quasiment deux jokers en main mais ne veulent pas s’emballer. L’entraîneur des trois-quarts Jean-Baptiste Elissalde soulignait : "Il ne faut pas tirer de conclusions hâtives pour la suite du championnat. J'ai le calendrier en tête et nous allons avoir un mois d'avril très difficile avec trois déplacements consécutifs en Top 14 et notre quart de finale européen à Biarritz. C'est loin d'être joué". Toulouse avance prudemment…mais sûrement.