L'énergie du désespoir

C'est un drôle de paradoxe. Aussi triste qu'absurde. En quasiment deux saisons au sein du Top 14, soit 49 journées au total, le SC Albi n'a jamais été en position de relégable. Pas une seule fois. Des clubs plus huppés comme Montpellier, Brive, Agen et même... Perpignan (lors de la première journée cette saison) ont occupé ce fauteuil peu enviable. Pourtant, le sort des Tarnais a déjà été scellé. A défaut de justice sportive, la sanction administrative est tombée le 19 mai: rétrogradation automatique en fin de saison. Motif? Un résultat déficitaire pour l'exercice 2006/2007 ainsi que des fonds propres qui n'ont été constitués de manière définitive que tardivement.

Voilà, depuis deux semaines, le drôle de destin du SCA, qui lutte sur le terrain pour conserver sa place dans l'élite, tout en sachant que les dés sont probablement jetés. Les dirigeants tarnais ont fait appel de cette décision en estimant que la situation financière du club, qui a connu trois présidents en une saison, "est saine et que le club est géré avec la plus grande rigueur ". Mais l'avenir du club demeure pour le moins incertain. C'est dans ce contexte si particulier que les joueurs (et le staff), eux, doivent faire abstraction de ces éléments extra-sportifs pour tenter de se battre, comme si de rien n'était.

Une marche dans la ville samedi

Le mérite des acteurs sportifs du SCA est grand compte tenu du contexte troublé. Sébastien Pagès a bien résumé le sentiment général, lundi, dans les colonnes de Midi Olympique. "Tous les deux mois, c'est Santa Barbara chez nous, peste le demi de mêlée. Nous n'en avons pas parlé mais tu ne peux pas empêcher les mecs d'y penser. Certains ont des crédits, des familles. Et tous les clubs viennent faire leur marché chez nous. Sauf que nous n'avons pas envie de quitter ce club alors nous allons tout faire pour nous en sortir. "

Témoignage vivant de cet attachement, le troisième ligne Yohan Misse, un des éléments les plus courtisés de la maison jaune et noire, a signé une prolongation de contrat de trois ans mardi. Le président Bernard Archilla est encore à la recherche de est à la recherche de quatre à cinq nouveaux joueurs pour compenser notamment le départ des deuxièmes lignes Arnaud Méla (Brive) et de Philippe Guicherd (Pau), ou celui de l'ouvreur Andre Hough, également en partance pour le Béarn. Mais Archilla, combatif, prépare la saison 2008-2009 comme si Albi restait en Top 14. Dans ce club, à tous les étages, on se bat avec l'énergie du désespoir. Celle qui fait soulever des montagnes.

Samedi, en cas de victoire face à Bayonne, le SCA pourrait d'ailleurs assurer mathématiquement son maintien au sein du gratin hexagonal, indépendamment des décisions administratives. Pour ce match capital, la ville sera mobilisée comme jamais. Une marche a même été organisée dans les artères principales de la cité, en amont de la rencontre. Les Albigeois sont invités à porter une tenue noire agrémentée d'un coeur jaune) et à participer dès 11H00, à un défilé "festif et populaire". Non, Albi ne veut pas mourir. Le SCA, porté par une force insoupçonnée, semble même plus vivant que jamais. Sur le terrain, en tout cas...