Marseille, planète rugby?

Capitale populaire du football français, Marseille n'entretient encore que des rapports très épisodiques avec le rugby. Le club de la ville navigue en toute discrétion en Fédérale 2, loin des joutes enfiévrées de l'élite. Alors, à la quantité, la cité phocéenne privilégié la qualité des rendez-vous. Du coup, chaque étreinte avec l'ovalie prend ici des allures de fête, avec une envie certaine et un goût de reviens-y. La demi-finale du dernier Top 14, entre Toulouse et Clermont, fut un magnifique succès, dans le plus pur esprit rugby. Difficile après un tel match, dans une pareille ambiance, de ne pas admettre que le rugby au Vélodrome, ça a de la gueule.

Même les aficionados de l'OM, habitués de l'ambiance sulfureuse des soirées de Ligue 1, ont savouré le moment. "Plus que l'ambiance elle-même, confie un habitué du Vélodrome, c'est la convivialité entre les adversaires des deux équipes qui m'a impressionné. Tout le monde buvait des coups ensemble avant et après le match. Ca ne risque pas de nous arriver de prendre l'apéro avec les Parisiens après avoir rencontré le PSG !" Le rugby a encore cette chance de pouvoir concilier enthousiasme pour les uns et respect pour les autres.

Rue du Rugby pour le Mondial

Samedi soir, la question du choix du camp ne se posera de toute façon pas. Le public phocéen fera bloc derrière l'équipe de France. A vrai dire, en posant ses guêtres au Vélodrome, le XV tricolore ne s'inquiète pas quant à la qualité de l'accueil qu'il recevra. Si les Bleus ont longtemps boudé Marseille, optant plus souvent lors de leurs rares sorties en province pour Nantes, Toulouse, ou Lyon, la Canebière est aujourd'hui une destination quasi traditionnelle depuis le début du XXIe siècle. Marseille aime l'équipe de France, et celle-ci le lui rend bien. C'est notamment là que les hommes de Laporte ont signé leur dernière victoire contre la Nouvelle-Zélande, en 2001. L'Australie y a subi deux fois la loi française. L'Afrique du Sud et les Anglais aussi, lors d'un match de préparation, déjà, au Mondial 2003. Seule l'Argentine a réussi à s'imposer ici.

De là à dire que les Bleus se sentent chez eux ici, sur une pelouse qu'ils ne foulent pourtant que très rarement, il n'y a qu'un pas. "C'est vrai que nous n'avons quasiment que des bons souvenirs ici, souligne Jo Maso, le manager français. Ce n'est pas négligeable de se sentir dans un environnement favorable." Jean-Baptiste Elissalde, qui sera vraisemblablement amené à buter contre l'Angleterre, avait ainsi réussi un festival en novembre 2005 face aux Australiens. Malgré la défaite, le demi de mêlée toulousain n'avait pas été maladroit non plus contre Clermont au printemps dernier. Il sait déjouer les pièges du vent, souvent présent à Marseille.

Un nouveau succès permettrait d'entretenir la réputation de porte-bonheur que s'est gentiment taillé le Vélodrome vis-à-vis des rugbymen français. Ils les retrouveront d'ailleurs le 30 septembre, lors du premier tour du Mondial, pour France-Géorgie. Quatre matchs au total, dont un quart de finale, se tiendront à Marseille. Pour célébrer l'évènement, la ville met les petits plats dans les grands. Bandas, animations, opérations spéciales, tout a été prévu. Dès vendredi, une journée spéciale rugby, avec ateliers, animations et initiation, était organisée sur la plage du Prado, avant un grand concert le soir. Mieux, la rue Venture, artère piétonne du centre, sera rebaptisée "Rue du Rugby" le temps du Mondial. Pas de quoi faire de l'ombre à l'OM chéri, qui retrouvera au même moment la Ligue des champions, mais suffisamment pour rappeler qu'à l'occasion, Marseille la généreuse sait aussi se mettre en quatre pour le rugby.