La chronique de Pierre Villepreux

Par Rugbyrama
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Notre expert Pierre Villepreux revient sur la règle dans les rucks qui fait beaucoup parler d'elle depuis le début de la saison. Pour lui, il faudra du temps avant de faire acquérir aux joueurs, les automatismes nécessaires à son intégration.

D'UN RUCK A UN AUTRE

L'analyse des techniciens après trois journées de championnat se focalise sur les difficultés rencontrées dans la situation placage et post placage. Il ne s'agit pas en l'occurrence; comme on le dit, d'une nouvelle règle. Mais il a été demandé aux arbitres de veiller à ce que les joueurs s'inscrivent bien dans des comportements tactiques et techniques qui n'ont pas radicalement changé mais qui ont été clairement reprécisé. Si les postures et positions qu'imposent la règle posent problèmes, c'est surtout que les habitudes acquises ces dernières années en terme de conservation du ballon pour l'attaque et de contestation pour la défense ont la vie dure et qu'il s'agit maintenant de réapprendre comment se comporter pour à la fois ne pas être à la faute et être efficace. Sont forcement concernés tous les joueurs attaquants et défenseurs dans la proximité du ballon. Ils se doivent d'agir et réagir, à la vitesse du jeu en intelligence avec la situation créée. Celle-ci est définie par le terme "ruck". On peut penser que cette situation caractérisée et caractéristique implique les différents intervenants à adopter les gestes techniques relatifs à ceux que réclame la règle et qu'il suffit de les travailler pour résoudre les difficultés.

Cette situation de ruck est au contraire loin d'être figée. Elle demande pour les joueurs impliqués à comprendre chronologiquement les différentes composantes de l'action de jeu :

- pourquoi intervenir,
- où le faire,
- enfin comment réaliser le geste technique adéquat.

Le tout réalisé avec la vitesse et la force optimale et avec l'agressivité utile qui convient dans cette phase de combat.

Pour faire acquérir aux joueurs les automatismes indispensables pour être efficaces et ne plus encourir les pénalités abondamment, mais logiquement, octroyées par les arbitres, il faudra du temps, et la mise en place d'un travail d'entraînement qui permettra de faire les raccords indispensables entre les composantes de l'action citées plus haut.

Cette phase de jeu est à prendre en compte dans une "systémologie générale" du jeu. En ce sens, il conviendra de la travailler prioritairement dans le mouvement général du jeu (comme en match), là où il y a le plus de complexité, là où le jeu demande la plus grande compréhension car les "événements situationnels" s'enchaînant, il s'agira à un moment T de prendre en compte l'émergence de cet "accident de jeu" singulier que génère le placage du porteur de balle.

Seul ce travail dans le mouvement général peut faire comprendre comment agir avant, pendant et comment anticiper le futur mouvement. Cet "accident de jeu" et ils sont nombreux (beaucoup trop dans le rugby actuel) se répètent, mais autrement, en tout cas jamais de manière totalement identique. Ce passage de formation, par le mouvement général me semble indispensable pour faire accéder, dans cette phase sans mouvement du ballon, le joueur à la fois à une bonne maîtrise de la règle et aussi à des comportements adaptatifs et créatifs.

C'est en effet le mouvement général qui contient toute l'information qui va légitimer l'organisation intelligente de la situation plaqueur -plaqué-ruck et donc la construction de ce dernier avec la technicité appropriée.

Il n'est pas vain de procéder différemment mais on n'est pas sur d'obtenir dans le temps les mêmes effets ni la même efficience. D'un coté on cherche à former des joueurs à même de répondre à tous les événements du jeu, à tous ses aléas, voire à l'improbable, incontournable pour donner du sens à la technicité requise.

Procéder différemment en partant de situations figées en accordant la priorité au travail technique ne contiendrait qu'une partie des informations nécessaires. A ce titre celles-ci sont plus difficilement réinvestissables avec pertinence dans une situation précise en l'occurrence dans l'exemple choisi, le ruck mais ce discours est évidemment applicable pour toutes les situations de jeu.

Ce souci de "trop organiser" le jeu parla mise en place de séquences non évolutives borde toujours la créativité et la prise d'initiative du joueur. Ce sont pourtant des aptitudes qu'il détient en tant qu'humain. Il s'agit simplement de les réactiver mais la bonne démarche de travail devient essentielle.

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