La chronique de P. Villepreux

Par Rugbyrama
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Notre expert, Pierre Villepreux, revient sur l'engagement lors du match entre Géorgiens et Irlandais.

Les facteurs qui rendent aujourd'hui le rugby populaire et attractif sont bien sûr d'ordre divers. Un élément de réponse peut être donné par le plus haut niveau de pratique qui est censé produire du spectacle. Derrière ce mot on peut définir celui-ci en terme de beauté voir d'art mais le public peut aussi se mobiliser derrière le jeu engagé d'une équipe qui donne tout et provoque une émotion a même d'assurer un spectacle qui ne relève pas de la qualité du jeu proposé.

C'est ce type de scenario qui a prévalu dans certaines rencontres ayant opposées les meilleures équipes au moins bonnes.

Le résultat est certes toujours resté favorable aux nations fortes mais la contestation proposée par leur adversaire a séduit le public, toujours excité quand la révolte du plus faible se traduit par un engagement dans le combat qui rend soudainement vulnérable une opposition pourtant bien mieux armée dans toutes les dimensions du jeu.

On pourrait citer plusieurs matchs ayant suscité ce type d'émotion et donc de spectacle. Mais le plus représentatif a été réalisé par la surprenante équipe de Géorgie à qui on prévoyait le pire pour son match contre l'Irlande qui avait d'autres ambitions que de gagner petitement et surtout sans bonus.

La stratégie du jeu géorgien est révélatrice de l'impact mental provoqué par l'événement. Tous les comportements individuels et collectifs traduisent un investissement dans le combat qui prend tous son sens dans ce contexte et n'aurait pas eu la même efficacité dans un contexte différent.

Si l'on accepte que le rugby présente logiquement un rapport indissociable entre affrontement et évitement et que chacune des deux formes est censé donner du sens à l'autre, on est bien obligé d'accepter que le jeu géorgien contre l'Irlande s'est réalisé uniquement dans le seul affrontement et qu'il a failli être suffisant pour faire plier les verts d'Irlande particulièrement déboussolés par l'avancée type raz de marée réalisée par leur adversaire du jour tant en attaque qu'en défense. Le score restant toujours très étroit n'a jamais, et ils avaient raison, amené les "Lelos" à modifier leur stratégie. Dans ce jeu l'affectif et le physique prennent forcement le dessus sur le facteur perceptif et décisionnel.

Confronté à un jeu peu habituel qui est en rupture avec le moule tactique européen du haut niveau, cette façon de penser et de jouer le rugby n'a pas permis aux irlandais de trouver la parade et de s'adapter. Le pouvoir de transformation immédiate d'un jeu à un autre pouvait se faire après la mi-temps mais le jeu au large manquait de soutien axial et le jeu au pied bien trop imprécis pour perturber les Géorgiens.

L'Irlande retrouvera des couleurs contre la France puisque le contexte va être différent. Le jeu va se construire sur une autre scène sur un autre type de rapport de force plus conforme au modèle que développe le jeu moderne de haut niveau, celui qui apportera aux irlandais les repères qui leur ont manqués dans ce match particulier.

Quand on sait que les irlandais, il n' ya pas encore si longtemps, étaient reconnus et craints par ce que l'on appelait "le fighting spirit", et, personnellement pour l'avoir subi comme joueur, je trouve plutôt sympa qu'ils aient pu en apprécier à la fois la teneur, l'efficacité et la rugosité.

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