La chronique de Pierre Rabadan

On n'a pas perdu le Nord...

L'hémisphère Nord du rugby n'est pas mort pendant ce week-end que beaucoup, moi y compris, annonçaient tragique.
Il a même été tonitruant, jouissif, exceptionnel, simplement énorme...
Comme pour démarrer ce samedi, ouvrant les quarts de finale après des matchs ennuyeux et inquiétants, dans ce que l'on vendait comme la revanche écrite de la finale de 2003, les rosbeefs ont repris des couleurs en punissant des Australiens que l'on supposait bien meilleurs.
Signe précurseur ?

21h, les hymnes, un haka "chaleureux" prévoyant la fin des Bleus dans leur Coupe du monde, à Cardiff ?...
Ce n'était pas possible et pourtant le début de match nous conforte dans cet état d'esprit.
Il faut que l'histoire se répète, que la France du rugby revive au travers d'un exploit qui est propre à cette nation (Impossible ?) et si les Français sont bien dans le match, ils ne sont pas encore en avance...
Mi-temps, 10 points de retard, ça va être dur pourtant on l'a déjà fait !
Et c'est reparti, une deuxième mi-temps historique se dévoile sous les yeux des millions de supporters tout à coup transcendés par une valeureuse, talentueuse et opportuniste équipe de France.
Le rêve est en marche, les Néo-Zélandais semble hantés par les démons du passé, ils tentent mais butent sur une équipe bleue à short et bas blanc, qui ne veut pas mourir.
Et elle existe d'autant plus que le match bascule à la sortie d'une mêlée dérangée, un coup de "quick" Michalakien qui, au relais de Traille, envoie Jauzion à dame... le top.
(Coup de chapeau aux préparateurs, il était bouillant quand il est entré Fred)
Les gris vont s'accrocher, tenter avec acharnement et même parfois avec un certain dépit mais sans succès.
Carter-Kelleher-Collins out, Evans dehors quelques minutes après son entrée, regards perdus, horreur en vue.
"Black Day" dirait Patrick Bruel en sortie de tournoi de poker après un mauvais coup.
Ils sont vraiment noirs en Coupe du monde, eux qui dominent le rugby mondial depuis 4 ans, ne ramèneront pas le trophée Webb Ellis au détriment de tout un peuple, en deuil du rugby à l'économie.

Mais soyons égoïste et savourons ce moment incroyable, inespéré, déroutant et magique.
Des émotions que seul le sport nous fait ressentir. Bravo Messieurs !
Vous avez battu les Brésiliens du rugby, l'ogre Blacks, franchi l'Everest du rugby mondial.
Il y a des favoris mais le sport n'obéit à aucune loi et c'est ça qui lui donne toute son essence et sa beauté.
Quelle bouffée d'oxygène pour le rugby de l'hémisphère Nord et la France.
Il fallait un événement après le coup de griffe argentin du match d'ouverture.
Difficile de se relever mais pas impossible. La preuve !

Il y a aura une équipe "européenne" en finale de cette Coupe du monde et c'est une très bonne nouvelle, mais il faut que cette performance serve ces pays nordiques du rugby mondial à se développer encore, sans cacher certaines vérités.
L'argent est massivement en Europe et attire beaucoup de monde.
Mais il faut conserver la formation pour ne pas aller vers de grandes désillusions dans un avenir proche. S'il n'y a plus de place pour les jeunes joueurs français, leur formation sera plus longue, plus difficile et moins performante.
Le Sud est à mon sens, et malgré tout, dans des saisons plus cohérentes, avec une meilleure place dédiée à la préparation et à la technique individuelle, avec un temps d'avance sur la gestion de leur formation.

Demi-finalement pour cette fois ça n'a pas suffi, et c'est tant mieux pour nous.
Aujourd'hui on a un avantage énorme, nous pouvons encore rêver à la plus belle fin qui soit, après le pire début que l'on ait connu, l'histoire est belle, elle est en marche...
Et plus rien ne parait impossible... Angleterre en vue !