Baky écrit - Françafrique 2023

Par Rugbyrama
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BAKY ÉCRIT - Tout jeune retraité, Bakary Meité profite de sa liberté retrouvée pour intégrer l’équipe des chroniqueurs Midi Olympique. L’ancien troisième ligne a tout connu du rugby, d’abord amateur et finalement professionnel. Pour Rugbyrama, L’ancien international ivoirien va désormais s’attacher à poser un regard libre, décalé et forcément engagé sur l’actualité du rugby. Welcome "Baky".

La nouvelle est tombée il y a quelques semaines. La phase de qualification pour la prochaine Coupe du monde, zone Afrique, se déroulera en France. Dire que je m’interroge sur le bienfondé du choix du lieu est un doux euphémisme. Effectivement, se pose la question de la souveraineté africaine, en matière de sport et notamment de rugby. Pourtant, dire que j’ai été surpris serait un mensonge que je n’oserais partager ici.

Ce n’est malheureusement pas la première fois que l’Afrique du rugby vient se départager en France. En juillet 2018, le Sénégal, l'Algérie et la Côte d’Ivoire avaient déjà croisé le fer à Toulouse, terre de rugby s’il en est. Les équipes étaient logées dans un lycée dortoir, nous étions 6 par chambre, nous nous restaurions à la cantine du lycée et nous pratiquions le covoiturage avec nos voitures personnelles. Bien loin du Lodge de Kampala ou du Novotel de Dakar.

Il y aurait tant à dire sur le rugby africain et sa gouvernance. La CAR (confédération africaine de Rugby) nouvellement Rugby Afrique voit son développement avancer à la vitesse d’un escargot. La périodicité, déjà : quand mes collègues planifiaient leurs vacances d’été, je devais jouer les prolongations pour aller ferrailler à Antananarivo ou Windhoek. Il ne fallait surtout pas gêner les différentes divisions du championnat français, gros pourvoyeur de joueurs africains, avec des matchs en cours de saison. Et même si le calendrier du rugby est surchargé, ce n’est pas les fenêtres internationales qui manquent (tournée de novembre, tournoi des six nations…). Mais le pilier marocain ne pèse pas grand-chose face à un demi de mêlée espagnol, dans un effectif de ProD2.

Si bien qu’à titre personnel, j’ai joué plus de 15 ans pour le maillot frappé de l’éléphant, pour une petite trentaine de sélections. Quand dans le même temps mon ami, Mihai Macovei, troisième ligne de Colomiers et capitaine de la Roumanie, en compte quasiment trois fois plus (88).

Le format des compétitions africaines, au cours de toutes ces années, n’a eu de cesse de changer au gré des désidératas des décideurs (africains et non africains). Match sec, aller-retour, tournoi, championnat… la liste étant loin d’être exhaustive. J’ai connu tellement de phases différentes, tellement de changements d’organisation, parfois même en cours de compétition. Dernier exemple en date : la Tunisie. La pandémie et les conditions sanitaires au pays n’ont pas permis à la fédération de se déplacer ou d’accueillir sur son sol le Burkina Faso et le Zimbabwe, qui étaient dans sa poule. Les aigles de Carthage ont vu leur participation à la phase de qualification purement et simplement annulée. Pour le plus grand bonheur d’Antoine Yameogo et le pays des hommes intègres (Burkina Faso), qualifiés d’office.

Le choix de la France comme lieu de compétition est dramatique. D’aucuns pourraient s’en réjouir. Les entraîneurs réfractaires à laisser partir en sélection leurs joueurs africains pourront, dès lors, faire preuve de complaisance. (Plus facile de libérer un joueur pour la Haute-Garonne que pour Nairobi)

Mais quand on se met de l’autre côté du spectre, on peut comprendre l’agacement des joueurs des pays de l’Afrique australe (Kenya, Zimbabwe, Namibie, Uganda) qui peuvent se sentir lésés par ce choix. Leurs contingents n’étant pas massivement représentés en France. Je vous passe, entre autres, les difficultés pour l’obtention de visas dans les différentes ambassades.

Rien ne justifie ce choix. Si ce n’est que la France accueillera la compétition en 2023. Dans ce cas, le match qui opposait les USA à l’Uruguay, il y a quelques jours, aurait très bien pu se dérouler à Clermont–Ferrand.

Alors, on pourra toujours ergoter avec condescendance sur la capacité de l’Afrique à prendre son destin en main. Peut être considère-t-on qu’elle n’est pas encore rentrée dans l’Histoire du rugby, la nation arc-en-ciel mise à part.

Claude Atcher le Directeur Général de France 2023 "rêve d’un France-Algérie à Marseille. Un symbole incroyable" (interview parue dans Le Figaro). Une bonne affaire pour la billetterie, aussi, concernant le match le plus "abordable" dans la poule de la France. Bernard Laporte, concernant la mise à disposition éventuelle de joueurs éligibles à la jeune et talentueuse sélection algérienne, avait déclaré il y a quelques semaines : "On a des liens très proches avec l’Algérie et on essaie de répondre à leurs besoins."

Pas sûr que les Lions de la Teranga du Sénégal, futurs adversaires des fennecs de l’Algerie, voient ça d’un très bon œil.

Vous l’aurez compris. La qualification de la zone Afrique pour la Coupe du monde devrait être une affaire continentale. Sans interventionnisme ni ingérence.

J’ai hâte que cette Coupe du monde arrive pour que j’enfile mon costume de supporter de la France. À moins que ne résonne dans le stade vélodrome, un soir de septembre 2023, l’Abidjanaise juste avant la Marseillaise. Ça aussi, moi, j’en rêve…

En bref :

100 match avec l’ASM pour Judicaël Cancoriet. Fier de toi mon bébé.

Le retour de Jean Abeilhou et de rencontre à XV. Toujours aussi fringant, Jeannot.

Ma mère m’a souhaité bon anniversaire avec un jour de retard. Trahison.

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