Diarra à la folie

Par Rugbyrama
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Le XV de France a découvert un sacré personnage cette semaine au CNR de Linas-Marcoussis, avec l'arrivée du Montalbanais Ibrahim Diarra. Et un sacré joueur? Réponse dimanche face à l'Italie.

Au-delà de son impact sportif sur ce Tournoi 2008, la (très) large ouverture prônée par le staff tricolore depuis le début de la compétition a au moins une vertu, immense. Celle de nous faire découvrir des joueurs, bien sûr, mais surtout des hommes. Des personnages. Dans ce registre, Ibrahim Diarra n'est pas la moindre des trouvailles. Diarra, c'est un peu un mix entre Mous Diouf et Eddy Murphy. Un gars qu'on a envie d'aimer tout de suite, même sans le connaître. Il émane de lui une force physique, qu'impose son gabarit (1,85m pour 105 kilos), doublée d'une gentillesse que l'on devine profonde.

Pour la presse, le Montalbanais est en tout cas ce qu'on appelle un bon client. Drôle, attachant, intarissable, il a tout d'un showman. Il ne joue pourtant aucun rôle. S'il est aussi percutant dimanche pour sa première cape que devant les journalistes à Marcoussis, les Italiens peuvent s'accrocher. Mardi, lors de sa première apparition devant les médias au CNR, il avait déjà fait sensation. "C'est la première fois que je suis dans une sélection. Pardon pour l'expression mais je suis un petit puceau", s'était-il exclamé avant de partir dans un grand éclat de rire. Mais c'est surtout sa phrase sur le retour au "French kiss", alors qu'il voulait parler de "French flair", qui avait déclenché l'hilarité.

Picamoles: "On a l'impression que c'est lui, l'ancien"

Trois jours après cette entrée en fanfare, l'ami Ibrahim est apparu toujours aussi rieur, avec quelques sorties remarquées, comme celle-ci: "L'Italie, je la vois comment? En Bleu! Putain on se marre ici." Il est aussi revenu sur ses premiers pas médiatiques chez les Bleus. "Je me suis vu à la télé, je me suis dit ' ils sont en train de me ridiculiser'. Mais je le prends zen. Sans rancune, comme on dit!" Diarra ne calcule pas. Il ne recherche rien. Pas de médiatisation, encore moins de starification. Il est juste lui-même et cela suffit à le mettre dans la lumière. Pour un peu, il s'en passerait. "Ca parle de moi un peu partout, mais je n'ai pas envie que ce soit comme ça , avoue-t-il. Je veux rester dans ma bulle, je suis bien dans ma bulle. J'ai envie de rentrer chez moi tranquille (il prend l'accent), me faire mon petit café, être pépère."

Depuis son arrivée au CNR de Linas-Marcoussis, qu'il ne connaissait pas puisque contrairement à tant d'autres il n'a pas connu les sélections de jeunes, Diarra découvre. Il écoute. Il profite. Les autres aussi le découvrent. Et visiblement, il n'y a pas que chez les journalistes que Diarra fait un tabac. "C'est un mec super", lance Jérome Thion, conquis. "Ibrahim, c'est quelqu'un de bien, confirme Louis Picamoles, qui l'accompagne avec Fulgence Ouedraogo en troisième ligne. Il met de la bonne humeur. C'est quelqu'un de très ouvert, ce n'est pas dur d'aller discuter avec lui. C'est lui qui vient vers vous. On a l'impression que c'est lui l'ancien. Il est très à l'aise, et c'est rassurant d'avoir quelqu'un comme ça dans un groupe."

"Le rugby, j'en suis tombé amoureux"

Cette décontraction naturelle semble le maintenir à l'abri de toute forme de pression. Pour le moment en tout cas. "Franchement, il n'y a aucun stress", assure-t-il. Une insouciance salutaire, à condition de ne pas dériver. Souriant mais ferme, Marc Lièvremont met en garde son néophyte. "Ca fait plaisir cette fraîcheur, cet enthousiasme, mais il va falloir qu'il digère ça. Qu'il se dise qu'il a mérité sa place, qu'il va jouer au Stade de France devant 80.000 personnes et qu'il va devoir ranger son appareil photo", prévient le patron des Bleus.

Mais Ibrahim Diarra sait trop bien d'où il vient pour ne pas laisser passer sa chance. Sa "carte chance", comme il l'appelle. La deuxième de sa carrière. "La première, c'est Montauban qui me l'a offerte en me faisant passer pro. Je ne sais pas comment je pourrais les remercier", dit-il. De sa cité de Viry-Châtillon, dans l'Essonne, où il est né et où il a grandi, ce Sénégalais d'origine était alors bien loin du rugby, du Top 14 et plus encore du Stade de France. Après avoir tâté du ballon rond, sans succès, et essayé le saut à la perche, il débute le rugby sur le tard, à 16 ans. "J'ai un frère qui faisait du rugby, je l'ai suivi. J'ai commencé le rugby tard, à 16 ans, et j'en suis tombé amoureux".

Huit années plus tard, son ascension fulgurante le conduit jusqu'en équipe de France. Bien sûr, on lui sort le costume du "symbole" du gars de banlieue qui a percé. Gentiment, il repousse l'encombrante offrande. "Je ne suis pas un symbole, explique-t-il. Je ne représente rien ni personne. J'espère simplement que ça aidera certains jeunes à s'investir dans le rugby. Si ça peut inciter certains à s'inspirer de moi, tant mieux. Le rugby peut être une bonne école, ça permet de se défouler, de sortir de la galère, d'évacuer la frustration. C'est ce qui s'est passé pour moi." Un symbole? Peut-être pas. Mais un exemple, à n'en pas douter.

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