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Coupe du monde de rugby 2023 - Frans Steyn, ancien demi d'ouverture de l'Afrique du Sud : "Le vainqueur sera champion du monde"

Par Marc Duzan
  • Frans Steyn, 78 sélections, a gagné deux fois la Coupe du monde avec les Springboks.
    Frans Steyn, 78 sélections, a gagné deux fois la Coupe du monde avec les Springboks. - PA Images / Icon Sport
Publié le Mis à jour
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Il y a quelques mois, Frans Steyn (36 ans), double champion du monde et ancien joueur de Montpellier et du Racing 92, mettait un terme à son immense carrière. Pour nous, il se projette aujourd’hui sur le quart-de-finale le plus attendu du week-end, évoque la révolution du « bomb squad » et parle de "Berbize", de drop-goals de 60 mètres et même du scooter d’Andrew Mehrtens... C’est à vous, Frans...

À quoi vous attendez-vous, dimanche soir ?

Les Français sont favoris mais ce sera acharné, indécis... Moi ? J’aime ces deux équipes de tout mon cœur. Je suis Sud-Africain mais j’ai passé une grande partie de ma vie en Top 14 et j’ai gardé de cette époque-là quelques-uns des plus beaux souvenirs de ma vie d’homme. (il marque une pause, se marre) Ce que je riais, les jours où Andrew Mehrtens me mettait à l’arrière de son scooter pour me promener dans Paris...

Et ce drop de 60 mètres face à Clermont, en 2010 ? Vous en souvenez-vous ?

Comment l’oublier ? C’était ma première saison au Racing et on jouait ce soir-là un quart-de-finale de Top 14. Toute la semaine, Pierre Berbizier avait chauffé les Clermontois et l’ambiance était dingue, au stade Michelin. Il y avait de l’électricité dans l’air et ce que j’aimais le Top 14, ces week-ends-là...

Avez-vous tapé d’autres drops similaires, dans votre carrière ?

Hmmm... Je crois qu’il y en a eu quelques-uns, oui ! (rires)

Face à la France, je ferais débuter Mannie (Libbok) et Handré (Pollard) entrerait à la mi-temps

Qui va gagner le quart-de-finale, dimanche soir ?

Va savoir... Dimanche matin, j’irai d’ailleurs miser sur les deux équipes pour être certain de ne pas perdre d’argent ! (rires) Je peux juste vous dire que l’équipe qui remportera ce match sera championne du monde derrière.

Ah oui ?

Ce France-Springboks est le match que tout le monde attend depuis quatre ans. C’est la finale avant l’heure. Et ce qui m’ennuie le plus, c’est que ce match monstrueux, magnifique, se jouera probablement sur une décision d’arbitrage, un carton rouge tiré par les cheveux ou un coup d’esbroufe de leur nouveau truc, là, le "bunker"....

Vous avez peut-être raison... Selon vous, les avants français peuvent-ils rivaliser avec le pack sud-africain ?

Pour avoir joué quelques années au Racing et à Montpellier, je sais de quoi sont capables les avants du Top 14. Ils sont costauds, agressifs, disciplinés. Ils peuvent évidemment traiter d’égal à égal avec les avants sud-africains. (...) Les matchs les plus durs de ma carrière, je les ai joués en France.

Les Sud-Africains vont-ils cibler Antoine Dupont, de retour sur le terrain après avoir été opéré d’une fracture il y a trois semaines ?

Ce serait idiot. Si vous faites une cible d’Antoine, vous avez déjà perdu le match parce que vous serez bien incapables de l’attraper... Il est trop fort, ce mec...

Vous avez longtemps été le coéquipier de Paul Willemse à Montpellier. Ne pensez-vous pas que son profil manquera au pack des Springboks, dimanche soir ?

Bonne question. En un sens, Paul est unique en son genre, dans le rugby français. Mais Thibaud Flament et Cameron Woki amènent quelque chose de différent au jeu français. Je trouve d’ailleurs leur attelage très intéressant, depuis le début de la Coupe du monde.

Si vous étiez sélectionneur des Springboks, débuteriez-vous ce quart-de-finale avec Handré Pollard ou Mannie Libbok à l’ouverture ?

Mannie a été magnifique depuis le début de la compétition mais son jeu au pied rend parfois un peu les gens nerveux, au pays. (il marque une pause) Il est pourtant devenu un très bon buteur, depuis qu’il a signé aux Stormers (en 2021).

Je l’adore, Ramos

Mais que feriez-vous, vous ?

Je ferais débuter Mannie (Libbok) et Handré (Pollard) entrerait à la mi-temps. Je me dis qu’en titularisant Pollard et Lukhanyo Am (le trois-quarts centre revient également de blessure, N.D.L.R.) à la place de ceux ayant qualifié l’équipe pour les quarts-de-finale, le risque est de perdre certains joueurs en route, de provoquer la colère de quelques joueurs... Or, quand arrivent les phases finales, un groupe a besoin d’une saine énergie, de calme, de bonnes ondes...

En quoi Rassie Erasmus est-il si spécial, aux yeux des Sud-Africains ?

Parce qu’il est l’homme ayant offert leur dernier titre aux Springboks, déjà ! Mais depuis la dernière tournée des Lions britanniques en Afrique du Sud (2021), il est néanmoins soumis à pression : je pense que les matchs n’ont pas généré cette année-là autant de bénéfices financiers qu’espérés et pour cette raison-là, Rassie a, aux yeux de certains, l’obligation de gagner aujourd’hui.

Qui est le boss dans le staff des Springboks ? Rassie Erasmus ou Jacques Nienaber, le sélectionneur ?

Rassie est le directeur de rugby. Il est donc le patron. Mais Jacques est sans aucun doute l’un des meilleurs techniciens qu’il m’ait été donné de côtoyer dans ma carrière. Il connaît les équipes internationales sur le bout des doigts, peut te citer les lancements de jeu des Français ou des Irlandais par cœur, est capable de te donner les annonces en touche de la Nouvelle-Zélande sans avoir besoin de jeter un œil à ses notes... Sa connaissance du rugby international est dingue...

Les Springboks sont-ils meilleurs qu’en 2019 ?

Ils sont plus expérimentés, c’est certain. Mais en 2019, l’esprit qui se dégageait de notre équipe était juste incroyable... Je ne sais pas ce qu’il est aujourd’hui, je n’en fais plus partie.

La constitution du "bomb squad" n’est jamais due au hasard. Tout est pensé, étudié, adapté à l’adversaire

Quel joueur français vous impressionne-t-il le plus, depuis le début de la Coupe du monde ?

Thomas Ramos, sans hésitation possible. Son tir au but est parfait, son sens de la relance excellent et il est plutôt efficace, sous les ballons hauts... Je l’adore, Ramos.

En France, on se fait un monde du "Bomb Squad", ce banc de touche où cohabitent six ou sept avants appelés à entrer en jeu au même moment. Quelle est votre définition de cette arme technique là ?

Le bomb squad a changé le visage du rugby mondial. Il a poussé les autres équipes à réfléchir elles aussi à la constitution de leurs bancs de touche, à leur façon de terminer un match. Quand deux équipes se tiennent, c’est toujours le banc de touche qui fait basculer la rencontre, lui donnant un autre rythme, accélérant le tempo général ou le ralentissant...

Frans Steyn aux côtés du capitaine Siya Kolisi lors du Mondial 2019.
Frans Steyn aux côtés du capitaine Siya Kolisi lors du Mondial 2019.

Êtes-vous certain que cela n’existait pas, il y a dix ans ?

Oui ! Quand j’ai été champion du monde en 2007, les remplaçants n’avaient pas du tout le même impact sur le match. Je me souviens qu’en finale au Stade de France, Bismarck (du Plessis) n’était entré en jeu que parce que John Smit saignait du nez... L’approche était radicalement différente, à mes débuts...

En 2019, vous étiez un membre à part entière du "Bomb Squad"...

Oui. Ma polyvalence (il était capable de jouer ouvreur, arrière ou centre, N.D.L.R.) et le fait que Lukhanyo (Am) puisse glisser à l’aile en cas de besoin offraient à Rassie (Erasmus) ce luxe-là. Aujourd’hui, je sais que Faf De Klerk (le demi de mêlée, N.D.L.R.) s’entraîne énormément à l’ouverture, par exemple. La constitution du "bomb squad" n’est jamais due au hasard. Tout est pensé, étudié, adapté à l’adversaire.

Vous avez mis un terme à votre carrière il y a seulement quelques mois. Que diriez-vous à Rassie Erasmus, si jamais il vous appelait demain en équipe nationale ?

Je dirais non ! (rires) Je ne peux plus courir, mon genou est mort ! On doit d’ailleurs m’y mettre une prothèse...

Quelle est votre vie désormais, Frans ?

J’ai une ferme non loin de Bloemfontein, dans le Free State. Je fais aussi quelques analyses pour Super Sport, qui est l’équivalent de Canal +, chez nous. D’ici quelque temps, j’aimerais aussi pouvoir intégrer le staff des Cheetahs. On verra...

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Les commentaires (5)
LeGallois Il y a 6 mois Le 12/10/2023 à 18:01

Il est effectivement dommage que le tirage au sort fasse se rencontrer Springboks, Français, Irlandais et All-Blacks ... en 1/4 de finale ! - Ce sont des finales avant la lettre ... Oui, dommage pour l'intérêt de la suite de la compétition ... Cela dit le vainqueur final sera le vainqueur du match All-Blacks/Irlande. C'est-a-dire les Blacks ...

unquartdecentre Il y a 6 mois Le 12/10/2023 à 15:26

Qu'est ce que j'ai pu kiffer ce joueur!! Légende

PRIAM30250 Il y a 6 mois Le 12/10/2023 à 19:59

Idem, le voir tenter... et réussir des pénalités de plus de 50m au GGL Stadium...
Et quelle gentillesse !

JiaimeP Il y a 6 mois Le 12/10/2023 à 07:39

Quel bonhomme ! Jolis mots dans ce bel entretien. Respect.

JiaimeP Il y a 6 mois Le 12/10/2023 à 08:13

Mais l'autre quart Irlande-NZ c'est pas du pipi de chat !