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Coupe du monde de rugby 2023 - "On veut forcément chercher des coupables...", Peato Mauvaka se livre après la défaite en quart de finale

Par Jérémy Fadat
  • Peato Mauvaka se livre après la défaite face à l'Afrique du Sud.
    Peato Mauvaka se livre après la défaite face à l'Afrique du Sud. Patrick Derewiany - Patrick Derewiany
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Arrivé à Toulouse mercredi soir, après être resté quelques jours à Paris pour profiter de certains de ses amis de la sélection, il était l’invité de l’émission ViaMidol avant de nous accorder cet entretien. Toujours extrêmement marqué par l’élimination en quart de finale, il revient sur ce Mondial qui l’a fait changer de dimension.

Trois jours après le quart de finale perdu (entretien réalisé mercredi soir, NDLR), comment vous sentez-vous ?

J’ai dit après le match que j’étais triste et dégoûté. C’est toujours pareil. Je suis triste et dégoûté. C’est encore dur de réaliser que c’est fini… Terminer comme ça, c’est… (Il s’interrompt) J’aurais tellement aimé qu’on continue l’aventure, que la compétition ne s’arrête pas là.

Avez-vous revu le match depuis dimanche soir ?

Non, je ne l’ai pas revu. Je n’en suis pas encore capable. Je vais attendre un peu avant de regarder de nouveau ce match.

Avez-vous peur que cela vous fasse trop mal ?

Oui. Franchement, c’est difficile…

C’est quoi le plus dur aujourd’hui ?

Le lendemain du match, on a quitté l’hôtel. Tout le monde est parti et, dans les jours suivants, les joueurs sont chacun leur tour rentrés chez eux. Entre la préparation et la Coupe du monde, cela faisait trois ou quatre mois que nous étions ensemble, que nous vivions tous les jours ensemble. Et là, ça se finit. Comme ça, pour un petit point. C’est vraiment très dur à encaisser et à digérer.

Qu’est-ce qui vous a le plus marqué après cette défaite ?

Il y a eu des moments forts sur le plan humain. Mais, la première chose qui me vient à l’esprit, c’est le silence dans le vestiaire après le match. C’était le silence complet. C’était un instant tellement dur à vivre. On pouvait entendre les mouches voler. C’était terrible.

Un rêve venait de s’écrouler pour vous tous, celui de devenir champions du monde…

Oui, absolument. C’était un rêve pour tous les joueurs de notre groupe et j’ai l’impression que c’était aussi un rêve pour tous les Français.

Vous êtes resté à Paris jusqu’à mercredi après-midi. Avez-vous ressenti le besoin de profiter encore de certains de vos coéquipiers ?

Oui, je suis resté avec Romain (Taofifenua) et Uini (Atonio), dont je suis très proche et avec qui j’ai passé toute cette Coupe du monde. Avec Gaël (Fickou) aussi, qui vivait déjà à Paris. J’ai profité un peu de ces deux ou trois jours avec eux parce que, derrière, on ne va pas se revoir pendant un certain temps. Puis, je ne reverrai plus Romain et Uini en équipe de France (ils ont annoncé tous les deux leurs retraites internationales, NDLR). Ils vont laisser un grand vide dans le groupe derrière eux. J’ai beaucoup mûri grâce à eux.

Avez-vous évoqué le match entre vous ou vouliez-vous surtout vous aérer l’esprit ?

On en a forcément parlé… On a cherché des explications et, quand tu es aussi dégoûté que nous le sommes actuellement, tu essaies de remettre la faute sur des gens. Puis, tu remets beaucoup de choses en question. Tu te refais tout le film et tu as beaucoup de regrets, sur de nombreux faits de match… Tu te dis aussi que tu aurais dû essayer de faire d’autres choses, ou de les faire différemment. De toute façon, quand on perd, on refait toujours le match ensemble.

Beaucoup d’entre vous étaient très frustrés par l’arbitrage de Ben O’Keeffe après le coup de sifflet final. Est-ce toujours le cas, quelques jours plus tard ?

J’ai pris un peu plus de recul là-dessus mais beaucoup de choses me restent toujours en tête. Je suis persuadé que certaines décisions auraient dû nous êtres favorables mais n’ont pas été sifflées. Je ne comprenais pas que plusieurs en-avant n’aient pas été sanctionnés. Du coup, mentalement, c’était parfois difficile de se ressaisir. Sur ce point, c’était très dur après le match. C’est toujours dur aujourd’hui. Cela passera certainement une fois la Coupe du monde terminée. Mais là, il y a des demi-finales et nous espérions tellement y être.

Allez-vous les regarder ce week-end, ainsi que la finale la semaine prochaine ?

Non, je ne vais pas les regarder et je vais couper pour ce qui est de la Coupe du monde. Si je me pose devant ces matchs, je vais me dire que cela aurait dû être pour nous.

Avez-vous des regrets sur la manière dont le XV de France a abordé ce quart de finale ?

Non, ça se joue à un point… Voilà, c’était sûrement un très beau match à voir, à vivre aussi. Mais, j’y reviens, il y a quand même eu des décisions… (Il s’arrête) Je le vis mal parce que c’est encore difficile d’en parler. Dans ce genre de contexte, on veut forcément chercher des coupables.

Et quelle est votre part de responsabilité collective dans ce revers ?

Nous aurions dû mieux gérer certaines situations, c’est évident. Mais, avec des si, on refait toujours le monde…

Vous sembliez pourtant dominateurs jusqu’à la 55e minute

Oui. En tout cas, sur le terrain, je sentais qu’on faisait un gros match, qu’on jouait bien, qu’on marquait des essais construits. Mais le plus frustrant, c’était de constamment les laisser revenir dans la partie avec des essais un peu casquettes. Nous avons commis des erreurs et les Sud-Africains ont su les bonifier au maximum, en marquant à chaque fois.

Est-ce le gros point noir de cette rencontre ?

Oui, parce que nous n’avons jamais su réaliser un gros écart de points, comme nous aurions dû le faire. Avec nos erreurs, nous leur avons permis de rester dans le match, et il a finalement basculé à un moment où nous avons commencé à baisser en intensité.

À titre personnel, vous avez néanmoins été rayonnant. Avez-vous réalisé l’un des meilleurs matchs de votre carrière ?

Je ne sais pas. J’espère que je vivrai encore beaucoup de matchs comme celui-là, ou mieux encore, avec un meilleur résultat. En tout cas, je ne me suis pas mis de pression sur les épaules et cela a fonctionné.

Vous n’êtes pas du genre à vous en mettre beaucoup…

C’est vrai, je suis plutôt du genre décontracté avant les matchs. Et puis, avec ce que j’avais dit sur les Springboks la veille à la conférence de presse ("Ils disent partout qu’ils dominent tout le monde devant, j’ai donc hâte d’être à dimanche", NDLR), je savais au plus profond de moi que je devais assumer mes propos sur le terrain. Oui, je suis content de ce que j’ai fait sur le plan personnel. Mais, ce qui compte à l’arrivée, c’est le collectif. Et je retiens malheureusement la défaite.

Peato Mauvaka face aux Boks lors du quart de finale de cette Coupe du monde.
Peato Mauvaka face aux Boks lors du quart de finale de cette Coupe du monde.

Vous aviez effectivement eu des mots forts la veille…

Oui, on savait qu’il fallait relever le défi physique. Nous les avions déjà affrontés lors de la dernière tournée d’automne à Marseille. Ils mettent beaucoup en avant leur fameuse "physicalité" (sic) pour dominer tout le monde, ils en parlaient partout… Mais nous étions prêts. Nous avions travaillé pendant plus de trois mois pour répondre présent dans un match de ce calibre, avec une telle intensité. Une fois sur le terrain, tu te dis que ce sont des humains, comme nous. à la fin, c’était soit eux, soit nous…

Vous avez été remplacé par Pierre Bourgarit à la 64e minute. Vu votre performance exceptionnelle jusque-là, l’avez-vous accepté facilement ?

Tous les joueurs ont envie de rester sur la pelouse. C’était évidemment mon cas. Mais ce n’est pas moi qui décide. C’est le choix du staff et, s’il sent que c’est le bon moment, c’est qu’il considère que c’est la meilleure solution. Je ne peux rien dire de plus mais, pour un tel match contre l’Afrique du Sud, j’aurais pu jouer pendant encore deux ou trois heures.

Cette compétition restera-t-elle, malgré l’échec final, à part pour vous ?

Bien sûr. J’ai quand même participé à une Coupe du monde en France. J’avais participé à celle au Japon en 2019, mais sans avoir une seule minute de temps de jeu parce que je m’étais blessé avant le match que je devais jouer. Là, le fait d’avoir disputé toutes les rencontres de la compétition, et aussi toutes celles de préparation durant l’été, c’était énorme. On m’a fait confiance. Comme à Toulouse, quand je sens que le staff me donne beaucoup de confiance et d’affection sur le plan humain, j’arrive à me lâcher sur le terrain.

Votre Coupe du monde a totalement basculé à la 11e minute du match d’ouverture, contre la Nouvelle-Zélande, quand vous remplacez votre coéquipier toulousain Julien Marchand, sorti sur blessure…

Quand Julien s’est blessé, j’ai compris qu’il risquait d’être absent pendant quelque temps et j’ai eu envie de prouver que le staff n’avait pas à s’inquiéter, qu’il pouvait compter sur moi. C’est un sport avant tout collectif et je voulais apporter le maximum pour l’équipe. Au départ, cette compétition, c’était pour Julien. On ne peut jamais complètement se préparer à passer dans la peau du titulaire du jour au lendemain, mais j’étais prêt à assumer ce rôle.

Avez-vous le sentiment d’avoir changé de dimension ces dernières semaines ?

Aux yeux du grand public, oui, c’est certain. Je sais désormais qu’on ne me voit plus de la même façon qu’avant cette Coupe du monde. Ou même avant le match de préparation contre les Fidji.

Pourquoi évoquez-vous ce match contre les Fidji à Nantes ?

Parce qu’avant cette rencontre, on commençait même à remettre en question ma position de numéro deux dans la hiérarchie. On se demandait si ce serait Pierre (Bourgarit) ou moi pendant la Coupe du monde. Cela m’avait mis un peu dans le dur personnellement. Mais j’ai su montrer sur ce match-là qu’on pouvait me faire confiance. À partir de là, les choses ont changé. J’ai senti cette confiance justement, de la part du staff, et j’ai pris beaucoup de plaisir sur le terrain.

Où puisez-vous cette force de caractère ?

Dans mon histoire et dans tout ce que j’ai vécu. Quand je pénètre sur un terrain, je joue pour une personne en particulier (il fait référence à son père, décédé brutalement en décembre 2018, NDLR) et j’oublie la fatigue.

Votre maman, venue assister au match d’ouverture contre les All Blacks, est finalement restée à vos côtés et a assisté à toutes les rencontres… Oui, cela m’a offert une raison supplémentaire de tout donner sur le terrain.

Parvenez-vous déjà à vous projeter sur la suite avec le XV de France, sur le prochain Tournoi ou même sur la Coupe du monde 2027 ?

Pour l’instant, c’est assez dur d’imaginer la suite. C’est trop tôt. Maintenant, je suis revenu à Toulouse et je vais d’abord penser au club. On verra ensuite ce qu’il va se passer.

De quoi avez-vous envie pour les prochaines semaines ?

Ugo (Mola) m’a appelé ce matin (mercredi, NDLR) pour me dire que j’allais avoir un peu de vacances. Mais moi, je pourrais rejouer demain sans problème s’il le fallait. Je suis jeune, j’ai encore du jus dans les jambes (sourire).

Votre motivation pour remporter d’autres titres en club, dans les mois à venir, est-elle décuplée après cette immense déception ?

J’espère en gagner, oui. Mais je n’ai toujours pas joué un seul match avec Toulouse cette saison, donc on va y aller pas à pas.

Votre papa aurait été très fier de vous, en tout cas…

Je l’espère. Je sais qu’il me regarde de là-haut.

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Les commentaires (15)
grimin777 Il y a 6 mois Le 20/10/2023 à 11:12

La course de Chelsin Kolbe n'a rien de super sonique. S'il était supersonique il serait sélectionné pour les jeux olympiques ce qui n'est pas le cas. C'est la course d'un tricheur aidée, cautionnée par une équipe d'arbitrage qui avait déjà choisi son camp. 


Quand l'arbitre feint de ne pas voir les en-avants des SudAf ni leurs fautes dans tous les rucks ou le départ illicite de Chelsin KOLBE, ou le maul écroulé au bout 60 m de perforation des bleus qui valait essai de pénalité, vous trouvez normal que les TMO n'interviennent pas. Eben Etzebeth et Cheslin Kolbe ont copieusement triché ce soir avec la bénédiction des arbitres.

Quand une telle concomitance de "pas vu pas pris" de l'arbitre principal et des TMO se produit cela s'appelle de l'entente préalable, c'est de la corruption.


Les narratifs de Grill et des vieilles gloires du rugby puent le protectionnisme indigent. Comme s'il devenait plus important tout à coup de protéger sa soupe, là où, au contraire, un peu de souverainisme devrait pousser tout le monde y compris les Sud-africains à réclamer justice immédiatement justement pour sauver l'honneur du rugby. Vous êtes grotesques et indignes lorsque vous trouvez les réseaux sociaux cruels de publier les vraies prises de vues que vous auriez vous-mêmes dû publier avant tout le monde pour rétablir la vérité. La démonstration est faite vous ne supportez ni la démocratie ni le moindre débat sur l'idée de justice. Vous êtes pas dignes de la place qui vous a été octroyée. Dehors !

fojema48 Il y a 6 mois Le 19/10/2023 à 20:53

This referee stole the match from the French team ! It is a scandal

CasimirLeYeti Il y a 6 mois Le 19/10/2023 à 18:59

Que je suis fier de cette équipe et de Peato, en particulier, qui ont montré qu'ils jouaient désormais dans la cour des grands. Maintenant le 6 Nations à gagner !