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Coupe du monde de rugby 2023 - Exclusif. David Campese : "Aujourd’hui, personne ne sait qui sont les Wallabies actuels"

Par Clément Labonne
  • David Campese (à droite) a remporté la Coupe du monde en 1991 aux côtés de Nick Farr-Jones (à gauche).
    David Campese (à droite) a remporté la Coupe du monde en 1991 aux côtés de Nick Farr-Jones (à gauche). PA Images / Icon Sport - PA Images / Icon Sport
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L’ancien ailier des Wallabies David Campese a analysé les difficultés de l’Australie dans cette Coupe du monde 2023. Du haut de ses 101 sélections, "Campo" estime que le rugby australien est gangréné par un système désuet.

Pour la première fois de l’histoire de la Coupe du monde, l’Australie est éliminée dès la phase de poules. Quel est votre état d’esprit ?

Nous ne sommes plus l’un des plus grands pays du monde. On aurait dû gagner par soixante-dix points contre la Géorgie et le Portugal. Les joueurs ont attendu toute la semaine avec cet infime espoir de se qualifier... Cela aurait été tellement plus simple si l’ancien système avec les victoires à deux points était encore en place (rires). Il n’y avait pas ces cas avec des bonus défensifs ou offensifs et c’était peut-être plus clair. Mais cette équipe australienne a certaines similitudes avec l’équipe de France de 2007.

Lesquelles ?

Il y a beaucoup de jeunes joueurs. Aujourd’hui, notre buteur a 23 ans alors que le pays de Galles a trois buteurs de classe mondiale (Biggar, Anscombe, Halfpenny). Et on a bien vu que notre ouvreur n’était pas assez expérimenté mais ce n’est pas de sa faute. Le XV de France du Mondial 2007 était également assez jeune, et je me rappelle qu’ils avaient subi une grosse pression en ouverture de la compétition. Lors du premier match contre l’Argentine, j'étais consultant pour la télévision. Bernard Laporte avait choisi d’isoler ses joueurs pour les protéger du bruit et de la ferveur. Mais au final quand ils sont rentrés sur la pelouse, Agustin Pichot rigolait en disant que c’était déjà fini parce qu’ils voyaient les Français liquéfiés par la pression du stade de France. Cela prouve que vous devez comprendre l’engouement d’une Coupe du monde. En 2023, l’Australie a elle aussi subi la pression à mon sens. En 1991 nous étions dans un hôtel situé dans une des rues les plus bruyantes de Dublin, on était constamment avec la foule. C’est une Coupe du monde ce n’est pas n’importe quelle compétition.

Quel regard avez-vous sur le XV de France ?

La France revient à ce qui a fait leur force dans les années 1980, à savoir le jeu d’évitement et le fameux french flair, avec un sélectionneur qui était un grand demi de mêlée.C’est notable ! Il y a peu de sélectionneurs qui jouaient derrière, beaucoup ont fait carrière devant. Ils ont donc un bagage plus porté sur l'affrontement que sur l’espace. Et la France a réussi ce retour vers le jeu que produisait Serge Blanco, Denis Charvet, Jean-Baptiste Lafond etc.

Plus globalement, que ressentez-vous en voyant les performances de l’Australie ?

Il y a beaucoup d’émotions. De la frustration, de la tristesse… C’est dur parce qu’Eddie Jones est un grand entraîneur mais je trouve cela étrange de l'avoir intronisé sept mois avant un Mondial. Toutes les autres équipes se préparent correctement depuis quatre ans, y compris les nations qui ne sont pas favorites comme le Portugal par exemple.. En tant qu’ex international je suis triste pour les joueurs. Vraiment. On parle de cela avec mon fils et j’ai de la peine pour lui quand il voit cette équipe par rapport aux succès que nous avons pu avoir dans les années 1990.

Pourquoi l’Australie est autant en difficultés selon vous ?

Je vais vous donner un exemple. Chris Latham était à un moment donné dans les rumeurs pour intégrer le staff des Wallabies, mais ce qui est triste, c’est que l’Australie ne veut pas de ces anciennes gloires australiennes. Cela a été notre histoire. Avant nous avions un flair semblable à celui des Français.On se passe de la connaissance de ces légendes sous prétexte qu’ils pourraient intimider leur environnement. Mais j’ai envie que ces genres d’entraîneurs apprennent à nos buteurs à taper des deux pieds, par exemple. Pourquoi l’Australie n’a pas un Manie Libbok, capable de se dégager du pied droit ou gauche ?

Pointez-vous l’échec de tout un système ?

Oui, il ne marche pas, il n’y a pas de fondations. On a des gens qui sont en place depuis trente ans et qui ne sont jamais remis en question, même s’ils font des erreurs. Et il y aussi l’émergence du rugby à XIII qui attire les foules. Pourquoi ? Parce que c’est un sport où l’Australie gagne. La NRL est plus qu’un sport c’est un spectacle, et les gens réclament du spectacle.

Qu’est-ce que le rugby à XV australien doit faire pour inverser la tendance ?

Gagner ! Peu importe la compétition ! Que ce soit les jeux du Commonwealth, le Super Rugby ou le Rugby Championship peu importe. L’Australie a besoin de gagner à nouveau pour embarquer les gens. À mon époque, tout le pays connaissait les joueurs des Wallabies parce que nous gagnions. Aujourd’hui personne ne sait qui sont les joueurs actuels. C’est triste. Nous sommes dans un monde divertissant et les joueurs doivent séduire le public. Aujourd’hui l’argent a changé la perception du sport. Et puis, il y a tellement d’arbitrage vidéo dans le rugby moderne, on ne veut pas voir cela, on veut voir du rugby !

Eddie Jones est-il toujours l’homme de la situation ?

Je ne peux pas répondre mais je dois admettre que c’est très frustrant de voir cette situation. Je ne sais pas s’il comprend les problèmes profonds de l’Australie et qu’il ait le bon plan.

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Les commentaires (2)
Djive-ST Il y a 6 mois Le 14/10/2023 à 00:59

Eddie Jones ÉTAIT un grand entraîneur ! Il n'a pas suivi l'évolution moderne du rugby via les datas (données)

fojema48 Il y a 6 mois Le 09/10/2023 à 11:27

Le Rugby Woke, ça ne marche pas, ça rampe !