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Les personnages du rugby français : Armand Vaquerin, légende à plus d'un titre

  • Armand Vaquerin, figure mythique du rugby français.
    Armand Vaquerin, figure mythique du rugby français.
Publié le Mis à jour
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Armand Vaquerin est une figure mythique du rugby français. De par sa carrière, inégalable, riche de dix Boucliers de Brennus décrochés avec Béziers, dans les années 70 et 80. De par la trajectoire de son destin, aussi, surprenante puis dramatique, avec ce décès encore mystérieux, survenu en 1993. Récit.

Il est des parcours qui s'écrivent comme des romans. Il est des hommes qui sont promis à devenir des légendes. Armand Vaquerin était de ceux-là : une force de la nature à même de repousser toutes les frontières. En 1939, ses parents avaient franchi celle séparant l'Espagne franquiste de la France encore libre pour rêver à un meilleur destin. Armand voit le jour en 1951, à Séverac-le-Château, dans l'Aveyron, et s'éveille à la vie à Béziers. Où ses parents, figures locales, possèdent le bar Le Mondial. Un nom comme un appel à la grandeur : cet adolescent, très énergique pour ne pas dire plus, trouve un terrain d'expression propice à son épanouissement sur le terrain de rugby de Sauclière. Une révélation tardive pour une éclosion rapide : l'activité de ce phénomène physique tape dans l’œil d'un certain Raoul Barrière. « Celui là, surtout, il ne faut pas le perdre de vue. C’est de la graine d’international », dira le sorcier, au premier regard, ou presque.

À 19 ans, le nouveau venu joue déjà d'égal à égal avec les grands, Jean-Pierre Hortoland et Jean-Louis Martin. Témoignage de confiance ultime, son entraîneur l'aligne en finale du championnat contre Toulon dès sa première saison, en 1971. Face au cadet de la grande famille des piliers se dresse un roc nommé Arnaldo Gruarin, 33 ans et 26 sélections avec le XV de France. Au Parc Lescure de Bordeaux, Armand Vaquerin écrit la première ligne de sa légende : il se hisse à la hauteur de l'événement et soulève le Bouclier de Brennus.
 

Dix titres : qui dit mieux ?

L'histoire est en marche. Six mois plus tard, le sélectionneur national Jean Desclaux, épaté par cette progression record, le convoque : comme un symbole, son baptême international se déroule dans son temple, à Béziers, le 11 décembre 1971, contre la Roumanie. Deux mois avant son vingtième anniversaire, ce redoutable combattant capable de grandes chevauchées a ainsi déjà connu les deux aboutissements majeurs d'une carrière : un titre national et une cape en bleu. « Être champion de France, c’est partager la même joie avec ses amis du club et de sa ville, tandis qu’être international, c’est une une grande joie personnelle. Pour moi, l’un vaut l’autre », dira-t-il un jour, lui, l'homme de peu de mots.

Les actes parlent en sa faveur. Avec ses camarades de jeu héraultais, ce monstre de détermination n'en finit plus d'affirmer sa toute puissance : après Toulon, Brive à deux reprises, Narbonne, Perpignan, Montferrand, Toulouse, Bagnères, Nice et Agen s'inclinent devant la bande à Raoul Barrière. « Pour me motiver, j’essaie d’effacer le passé et de recommencer comme si c’était la première finale », répète le pilier polyvalent avant chaque grand rendez-vous. Seul Agen, vainqueur 13 à 10 en 1976, est en mesure d'interrompre le règne. Un petit accroc presque anecdotique, tout compte fait. Car Armand Vaquerin, le fidèle, l'inusable, soulève à dix reprises le Bout de Bois le plus fameux de France. Qui dit mieux ? Personne... De 1971 à 1980, il porte aussi à vingt-six reprises la tunique floquée du Coq pour une victoire partagée dans le Tournoi des 5 Nations 1973.

Voilà pour les chiffres, impressionnants, implacables. Tous ceux qui ont croisé sa route retiennent surtout son tempérament, son aura. L'impression laissée sur le terrain par cet avant, moderne avant l'heure, à la fois dur au mal et doué balle en main. Après seize ans de dure lutte sur les pelouses, Armand Vaquerin tire sa révérence au printemps 1985. Son grand Béziers, au crépuscule de sa gloire, tombe face à une puissance montante du rugby français, le Stade toulousain. Personne ne le sait alors mais le grand Armand, ses 183 centimètres et son bon quintal, ne reviendront plus en jeu. Tout du moins pas avant son grand jubilé, organisé en 1992, à Sauclière, sur le terrain de ses exploits. Son dernier rai de lumière. Avant la pénombre.
 

Un après-carrière déroutant

Ce héros de toute une communauté possède sa part d'ombre, alors méconnue. La deuxième existence d'Armand Vaquerin ressemble à une déroutante partie de cache-cache. Après avoir raccroché les crampons, l'ancien pilier et sa compagne mettent le cap sur le Mexique où les deux amoureux vivent de la pêche et du tourisme. Une parenthèse enchantée, émaillée d'un accident de voiture. La quiétude de l'exil ensoleillé ne sied pas à cet aventurier patenté, constamment en quête de nouvelles sensations. Après une escale en Espagne, sa quête de bonheur et de liberté le ramène paradoxalement à Béziers. Dans sa ville, il ouvre « Le Cardiff ». Son propre bar. Comme une jolie manière de rendre hommage à ses parents et à un rugby véritable. Le destin du natif de Séverac-le-Château le mène à une fin tragique et soudaine : Armand Vaquerin décède le 10 juillet 1993, à Béziers, en fin de matinée, dans « Le bar des amis ». A-t-il perdu à la roulette russe, au terme d'une soirée enivrante à l'excès ? Peut-être. Probablement, même. Les enquêtes menées sur le sujet n'ont jamais permis d'apporter le fin mot de l'histoire, semant même encore plus le trouble, sur fond de liaisons dangereuses avec des personnes peu recommandables et de démons intimes. Ce décès encore inexpliqué est devenu, qu'on le veuille ou non, partie intégrante de la légende.

Sans clôturer pour autant le récit. Le roman d'Armand s'écrit encore après sa mort tant le personnage reste présent de nos jours. Chaque été, le Challenge Vaquerin, tournoi de rencontres amicales devenu incontournable, ressuscite la mémoire de ce joueur unique ; et à chaque match, les supporters de Béziers passent devant une stèle à son effigie, installée en 2007, auprès du stade de la Méditerranée. Sur ce bloc de pierre sont écrits quelques mots suffisants à mesurer le grand rugbyman qu'il était, par-dessus tout : « Armand Vaquerin, 1951-1993, pilier international, 11 finales, 10 titres, avec l'AS Béziers Rugby. » L'essentiel est dit.

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Les commentaires (1)
Armagnol Il y a 3 années Le 20/05/2020 à 18:18

Quelques erreurs dans cet abrégé sur la carrière d'Armand Vaquerin !