"Des prestations collectives proches du néant"

Par Rugbyrama
  • Maestri - Xv de France Ecosse - 16 mars 2013
    Maestri - Xv de France Ecosse - 16 mars 2013
Publié le Mis à jour
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Pour Léo Faure, journaliste de Midi Olympique, les Bleus, forts individuellement, n'ont jamais trouvé une osmose collective pendant le Tournoi. Revivez le chat.

aaallleeexxx: Peut-on tirer quelque chose de positif pour l'équipe de France dans ce Tournoi?

Léo FAURE: Sur le plan individuel, oui. Samson, que l'on pouvait craindre physiquement un peu juste à ce niveau de la compétition, a bien l'envergure internationale. Domingo a retrouvé son niveau de 2010, après ses deux graves blessures. Fofana s'affirme comme le facteur X de cette équipe, celui capable à lui-seul de faire basculer un match, comme contre l'Ecosse. Picamoles s'installe comme un huit de rang planétaire.... Sur le plan collectif, par contre, on ne saurait voir plus loin que la mêlée! Exceptées 40 minutes (20 contre l'Angleterre et 20 contre l'Irlande), les prestations collectives ont été proches du néant. Les joueurs ont régulièrement paru perdus sur le terrain, les connections rouillées, les prises de décision très aléatoires, sans fil conducteur. Bref on est très loin du niveau collectif requis. Et la Coupe du monde 2015, puisque le staff a voulu la placer comme préoccupation première, n'est que dans deux ans et demi. Inquiétant.

Tlse 31: Pensez-vous que l'équipe de France devrait beaucoup changer d'ici à la tournée en Nouvelle-Zélande ?

Léo FAURE: Le groupe sera élargi à 35 joueurs et on peut imaginer voir de nouvelles têtes. Lopez et Wisniewski sont sur toutes les lèvres. Buttin ou Fickou pourraient aussi pointer le bout de leur nez. Mais globalement, je ne suis pas persuadé que les problèmes des Bleus soient le manque de qualités individuelles des joueurs. A chaque poste ou presque, on a de quoi rivaliser. Il faut par contre que les joueurs se trouvent. Pour cela, il faut du temps de travail, certes, mais aussi de la confiance qui ne vient qu'avec les victoires. On peut se poser dès lors la question du discours "On est derniers et il faut l'accepter. L'objectif, c'est la Coupe du monde 2015". Peut-on préparer un Mondial sans gagner? Cela semble illusoire. Et la perspective de trois matchs face aux All Blacks n'est pas rassurante. On perd beaucoup de temps. Dès lors, l'idée de garder une ossature stable semble à privilégier. Au moins pour gagner en cohésion, quasi inexistante pendant ce Tournoi.

akira om: Avons-nous trouvé notre paire de centres Fofana-Bastareaud?

Léo FAURE: Cela y ressemble en tout cas fortement. D'abord parce qu'ils ont prouvé qu'ils étaient capables d'assurer la continuité du jeu, après eux. Bien sûr, leur première force reste la perforation, dans deux styles différents. Mais on est par exemple loin du Fofana à qui on avait reproché, l'an dernier, de n'avoir fait qu'une seule passe pendant le Tournoi. Il a progressé dans ce secteur. Surtout, dans un contexte où les rouages sont ensablés, voilà une association qui se trouve, pour avoir grandi rugbystiquement ensemble dans les catégories de jeunes. Cette paire de centres fait partie des satisfactions. A suivre...

STRUGRY: La France est-elle encore une grande nation du rugby?

Léo FAURE: Évidemment. On n'efface pas cent ans d'histoire avec un (très) mauvais Tournoi! C'est par contre une grande nation en proie aux doutes et qui ne séduit pas. Mais les joueurs français, individuellement, sont au niveau du concert international. On le voit avec les clubs. Il faut par contre accepter que depuis dix ans, le Tournoi ne se résume plus à Angleterre-France, comme c'était souvent le cas entre 1992 et 2002. Les nations celtes travaillent et sortent de nouveau des générations de grande qualité, pas seulement quelques joueurs. La concurrence est exacerbée. Tant mieux. A nous de réagir au plus vite.

harlem shake: PSA va-t-il démissionner ?

Léo FAURE: Ce n'est absolument pas la tradition française et l'éventualité a été écartée par Pierre Camou. Le sujet n'existe donc pas, qu'on le regrette ou non.

gg: Fofana est-il indispensable ?

Léo FAURE: Il a disputé chaque minute du Tournoi, est le meilleur franchisseur des Bleus, celui à qui on s'en remet quand on est en difficulté. Difficile de s'en passer.

Charles: On se plaint du faible nombre de joueurs sélectionnables (une centaine environ), pourtant les Gallois ou les Australiens font mieux avec moins...

Léo FAURE: On se défend comme on peut! Je suis assez d'accord, dire que le réservoir français est trop faible alors qu'on a 250 000 licenciés, c'est une aberration, une fausse excuse.

FLO41: On nous dit que l'équipe de France est en construction. Est-elle si jeune que cela ?

Léo FAURE: C'est aussi une ligne de communication: en moyenne d'âge, nous ne sommes pas plus jeunes que les Gallois et les Anglais, qui finissent aux deux premières places. Collectivement, nous sommes plus jeunes que les Gallois. Pas que les Anglais. Ce sont aussi là des excuses qui sont loin d'expliquer en intégralité les prestations très insuffisantes des Bleus.

leo: Le Top 14 a-t-il un calendrier si chargé pour que les joueurs soient si fatigués?

Léo FAURE: Oui. le problème du calendrier est réel en France. C'est la schizophrénie du rugby français, qui veut tout: un grand championnat et une grande équipe de France. Mais se plaindre ne fait rien avancer. La convention FFR-LNR, qui doit être renégociée bientôt, saura-t-elle trouver un embryon de solution? Tout le monde l'espère. Mais la lutte entre les deux institutions, défendant chacune leur "produit", s'annonce intense.

Antho: Brock James en équipe de France, est-ce possible?

Léo FAURE: Non. Il n'est tout simplement pas sélectionnable puisque déjà apparu sous le maillot d'une sélection australienne.

Niclo: Quelles solutions pour permettre d'avoir un réservoir de joueurs français en forme pour les grandes échéances ?

Léo FAURE: Libérer des plages de temps dévolues à l'équipe de France pour que les joueurs répètent leurs gammes beaucoup plus régulièrement en collectif complet. Mais cela impose des changements importants: par exemple un Top 12, une H Cup à 20 clubs ou encore un dédommagement financier des clubs plus important par la FFR, pour libérer plus souvent les internationaux tout en ayant les moyens financiers de les remplacer à niveau équivalent. On entre là dans des "guerres" d'institution LNR-ERC-FFR. Pas facile mais franchement, quand on voit le niveau actuel des Bleus, on se dit qu'il y a urgence.

antoine: Un système de province en France est-elle envisageable?

Léo FAURE: Je n'y crois absolument pas. Le rugby français est d'une tradition de village, de clocher. Les entités "clubs" sont extrêmement fortes, plus que dans les pays anglo-saxons par exemple. Les supporters du XV de France sont avant tout, dans leur grande majorité, les supporters d'un club. Et peu d'entre eux souhaiteraient voir disparaître le blason qu'ils supportent. Même pour les besoins de l'équipe de France...

Sulvens: Un Top 12 n'enfoncerait-il pas des clubs moins performants?

Léo FAURE: Forcément. Mais c'est une réalité du professionnalisme. Il évincerait les deux clubs les plus faibles mais, du coup, tirerait vers le haut le championnat tout en libérant des dates pour les Bleus. Il faut savoir ce que l'on veut: un rugby français performant ou un rugby qui fait du "social" envers les clubs historiques. Les Anglais ont eux tranché depuis longtemps...

Carlito: Michalak titulaire pour préparer la Coupe du monde 2015, n'est-ce pas paradoxal?

Léo FAURE: Sur sa forme du moment et donc pour réaliser un bon Tournoi, si. Il vient d'enchaîner énormément de matchs et la fatigue accumulée est simplement logique. Le "brûler" sur ce point serait une idiotie. Pour préparer 2015, non. Mais on en revient à l'idée de départ. Pour préparer 2015, la France a besoin de joueurs en confiance dans le collectif, mais aussi de victoires. Michalak n'a connu ni l'un ni l'autre dans ce Tournoi. Pas sûr que cela le serve au final...

GéGé Papou: Comment répondre à ce paradoxe: pris individuellement, nous avons des joueurs de classe internationale. Mais nous n'avons pas su créer un collectif digne d'être en classe internationale. Il n'y a pas un ensemble de jeu collectif et les joueurs visiblement ne s'amusent pas. Avec tout le respect que je dois à PSA, ne peut-on pas dire qu'il n'est pas l'homme de la situation? La responsabilité de créer un collectif lui incombait pleinement.

Léo FAURE: Sur ce Tournoi, le collectif est effectivement inexistant et logiquement, le sélectionneur est le premier responsable de cet échec. Il va falloir rebondir et vite. Parce que là, on a mis la marche arrière. Le temps presse et la position du sélectionneur est effectivement inconfortable.

Charles: Disposons-nous en France de 7 réellement "openside" comme Tipuric et Robshaw?

Léo FAURE: Nous avons même le meilleur: Julien Bonnaire! Parmi les sélectionnables, Yannick Nyanga, très mobile, se rapproche de ce profil. Malheureusement, il est aussi apparu pendant ce Tournoi loin de sa forme de novembre...

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