Abonnés

200 ans de rugby - 2000, l’Italie entre dans le Tournoi des 6 Nations

Par Jérome Prevot
  • Sur cette photo, l'Italie affrontait l'Irlande au Tournoi des 6 Nations 2000.
    Sur cette photo, l'Italie affrontait l'Irlande au Tournoi des 6 Nations 2000. - PA Images / Icon Sport
Publié le
Partager :

Le 5 février 2000, l’Italie fait une entrée fracassante dans le Tournoi des Six Nations, et non plus cinq. Mais les promesses se sont vite envolées. L’équipe accueillie avec joie a trop déçu.

Le Tournoi bouge très peu et très peu souvent. Tous les 90 ans… C’est le délai qui sépare les entrées des deux dernières nations invitées : la France en 1910 et l’Italie en 2000. Ce 5 février 2000, les Transalpins réussissent une entrée en fanfare. Ils surclassent l’Écosse 34 à 20 et semblent marquer une nouvelle ère de la vénérable compétition. Le pilier remplaçant Giampiero De Carli marque le premier essai de l’histoire de son pays dans le Tournoi. Les envoyés spéciaux avaient décrit une Rome sous le charme de la nouveauté de cette ambiance fraternelle moins clivante que celle du foot. Depuis deux mois, les joueurs italiens ne pensaient qu’à ça. Chaque semaine depuis l’entrée en fonction de leur entraîneur néo-zélandais Brad Johnstone, ils se retrouvaient à Tirrenia, le centre de préparation olympique. "Rentrer dans le Tournoi, avait averti Troncon, c’est le rêve de notre génération. Samedi, nous serons émus, fiers et gagneurs.".

Les Italiens attendaient ce moment depuis vingt ans, depuis les premiers appels du pied, avec, au fil du temps, l’appui de la France, partenaire historique, pas mécontente de trouver un allié pour faire contrepoids aux quatre nations anglo-saxonnes. Les premières demandes furent clairement rejetées jusqu’au vote historique du 16 janvier 1998 quand le Comité prit enfin la décision de passer de cinq à six nations, décision prise à l’unanimité. Pour la première fois depuis 1909, dans le Tournoi toutes les équipes pourraient jouer le même week-end. Et en plus, l’Italie représentait une promesse économique : des grands médias, des gros partenaires.

Cette évolution, on la sentait venir depuis quelques années à partir des années 90, les Azzuri montaient en puissance. Le grand public français les avait découverts à Grenoble le 22 mars 1997 quand ils avaient battu le XV de France à la surprise générale 40 à 32. Mais les Italiens de cette époque ne s’étaient pas limités à cet exploit. Le 4 janvier précédent, ils avaient battu l’Irlande en Irlande, ils l’avaient déjà fait en 1995, ils le referont le 20 décembre suivant. Ils avaient aussi battu l’Écosse en janvier 1998 à Trévise, un succès qui avait influencé bien sûr le vote historique. L’Argentine aussi avait été défaite à trois reprises en 1978, 1995 et 1998.

Au printemps 1997, les Italiens se plaisaient à dire qu’ils auraient fini avec trois victoires s’ils avaient joué le Tournoi des 6 Nations cette année-là, soit au même niveau que l’Angleterre. Tous les clignotants étaient au vert pour enfin entériner la grande décision qui devait, en principe, donner un coup de fouet terrible à ce rugby qu’on ne connaissait que de loin en loin. On savait qu’il importait des entraîneurs étrangers souvent français, dont Pierre Villepreux, Bertrand Fourcade et plus loin dans le temps, Julien Saby, vrai pionnier des années 30. D’ailleurs l’entraîneur de l’embellie de 1997 était aussi français, Georges Coste, de Perpignan. On avait du mal à se faire une idée de la place que pourrait trouver le rugby dans un pays voué au foot, davantage qu’en France en termes de supériorité sur les autres sports. Dans Libération, l’envoyé spécial Philippe Rochette avait analysé ainsi l’identité du rugby par rapport à l’omniprésence presque agressive du football.

Donner du plaisir et de l‘espoir au peuple

Alors, jouer au rugby ici c’est vouloir se singulariser, se démarquer d’une identité collective massive. Le fief est en Vénétie ­ Trévise, Padoue, Rovigo ­, région industrieuse et tranquille où les grandes équipes de foot sont absentes. Là se sont constituées des généalogies de joueurs qui sont la chair vive du rugby italien. Ensuite, les clubs font de l’évangélisation auprès des jeunes dans les autres sports. Comme ça, le rugby italien vit avec 23 000 licenciés. Mais après tout, l’Écosse n’en a pas plus. On avait entendu dire aussi de-ci de-là, qu’en Italie, ce sport n’intéressait que les gens des classes aisées.

Un journaliste passionné, Francesco Volpe, du Corriere dello Sport expliquait : "Il faut avoir l’esprit sportif. C’est un jeu dur et compliqué qui ne se donne pas d’entrée. Et surtout, il faut savoir accepter de perdre. Au rugby, les meilleurs perdent et se renforcent de leurs défaites. En Italie, on ne sait pas perdre." Propos qu’on pourrait bien amender quand on sait ce qui a suivi. D’ailleurs, quand l’Italie découvrit le Tournoi, l’atmosphère était déjà à la baisse, car la Coupe du Monde 1999 avait déjà été décevante. "On ne peut pas ramer contre le calcio, disait Massimo Giovanelli, troisième ligne de Narbonne. Il y a un petit public de rugby et il a été déçu par nos prestations catastrophiques en Coupe du monde. Il faut avant tout lui redonner du plaisir et de l’espoir."

Vous êtes hors-jeu !

Cet article est réservé aux abonnés.

Profitez de notre offre pour lire la suite.

Abonnement SANS ENGAGEMENT à partir de

0,99€ le premier mois

Je m'abonne
Voir les commentaires
Réagir
Vous avez droit à 3 commentaires par jour. Pour contribuer en illimité, abonnez vous. S'abonner

Souhaitez-vous recevoir une notification lors de la réponse d’un(e) internaute à votre commentaire ?