Ranger : Noir Désir

Avec sa langue percée, ses nombreux tatouages, sa barbiche peu entretenue et ses cheveux ébouriffés, Rene Ranger ne pays pas de mine, et la légende veut même qu'il fasse parfois peur aux clients de l'hôtel où son équipe réside. Pourtant, sur le terrain, cet ailier néo-zélandais de 23 ans est bien connu des supporters des Auckland Blues, club où il évolue. Ses percées fantastiques et ses esquives balle en main ont fait de lui, après une saison et neuf essais, l'un des chouchous de l'Eden Park. Et nombreux sont les observateurs qui s'accordent à dire que ce jeune joueur très prometteur est un diamant à l'état brut qui n'attend plus que d'être poli.

Il soulevait du matériel à la pelleteuse

Car si le joueur est capable du meilleur sur le terrain, il a aussi et déjà connu le pire en dehors. Inculpé d'agression physique en août 2009 à la sortie d'un bar de Mangawhai, au nord d'Auckland, l'ailier est condamné deux mois plus tard pour blessures intentionnelles. Fêtard invétéré, il doit également à l'alcool bon nombre d'incidents et d'altercations avec la police.

Pourtant, dès qu'il chausse les crampons, Rene devient un autre homme, un joueur discipliné qui se fait remarquer pour ses prestations et non pour ses frasques. D'ailleurs, cet ancien talonneur de formation a notamment été sélectionné avec l'équipe de rugby à VII de 2006 à 2008. Il avait aussi connu les honneurs d'une sélection nationale avec les -19ans et -20ans. Un bien beau palmarès pour un garçon qui, il n'y a pas si longtemps, soulevait du matériel à la pelleteuse en tant que machiniste pour les artistes en tournée.

Un début mitigé avec les Blacks

Ranger le reconnaît, il a longtemps hésité entre son travail qui, s'il ne lui plaisait pas, lui offrait au moins une sécurité, et le rugby, sa véritable passion. "C'était difficile de trouver du temps pour le rugby et de travailler en même temps. J'ai du faire un choix" reconnait le joueur. Ce que l'on ignore, c'est que Ranger avait, dans un premier temps, choisi son travail. Ce n'est que lorsqu'il a été certain d'être titulaire avec les Blues et de pouvoir vivre de sa passion qu'il a définitivement choisi le rugby.

Dans la lignée de ses performances avec les Junior All Blacks, le jeune ailier a ainsi connu sa première sélection avec l'équipe première de Graham Henry le 26 juin dernier lors du test contre le Pays de Galles. Entré en jeu à vingt minutes de la fin, il s'est surtout illustré pour avoir manqué un essai. L'entraineur adjoint Wayne Smith a admis que les capacités du joueur au plus haut niveau étaient toujours en question, mais a estimé que son talent évident valait la peine de courir le risque.

Titularisé pour son deuxième match

En effet, la vitesse et la précision de ses débordements seront un atout intéressant pour les Néo-Zélandais ce samedi face à l'Afrique du Sud. Car pour sa deuxième sélection seulement, Ranger se retrouve titulaire à l'aile gauche suite à la blessure de son compatriote Joe Rokocoko, qu'il côtoie également chez les Blues. Voilà ce qu'on appelle gravir les échelons! Conscient de la pression que cela représente pour le joueur, Wayne Smith n'y voit toutefois rien d'exceptionnel: "Rene est comme tout nouveau joueur. Arriver à ce niveau est un gros challenge parce qu'il faut apprendre notre schéma tactique ainsi que les combinaisons que nous utilisons. Ensuite, il faut s'adapter mentalement". Il faut donc espérer que Ranger supporte la pression, car il s'agit tout de même d'un deuxième match de Tri-Nations qui pourrait bien déterminer le futur vainqueur de l'épreuve.