La chronique de P.Villepreux

Par Rugbyrama
Publié le
Partager :

Notre expert Pierre Villepreux revient sur l'utilisation des nouvelles règles dans le match Nouvelle-Zélande-Afrique du Sud.

Le match des Tri Nations Nouvelle Zélande-Afrique du Sud a donné lieu à un grand spectacle rugbystique. Une des raisons réside d'abord dans l'application des nouvelles règles qui ont été testées pour la première fois dans une compétition majeure.

Le jeu produit m'a semblé bien répondre aux possibilités offertes par ces règles et le fait d'avoir limité le nombre de pénalités en les transformant en coup francs en donnant la possibilité de choisir de jouer à la main donc de dynamiser le jeu me parait déterminant et permet de multiplier les initiatives. En enchaînant rapidement à partir de ces coups francs, les All Blacks ont placé ainsi les Sud-Africains souvent en situation de déséquilibre et construit en partie leur victoire sur le dynamisme créé. Le fait de rendre la balle, sur les rucks, à la défense quand un coup franc est accordé semble avoir créé des comportements différents pour les défenseurs qui nous ont semblé être plus impliqués en nombre dans la contestation du ballon et autour de cette phase. Le rapport de force attaque-défense étant modifié (plus de défenseurs dans la zone du ballon), en conséquence l'utilisation du ballon sur les extérieurs devient plus aisé et la chance d'y jouer efficacement plus grande.

Même constat sur les mauls, la possibilité de l'écrouler offre maintenant des options de jeu plus riches en utilisant le déséquilibre créé par "l'écrouleur". Il devient plus facile de mobiliser les défenseurs en attente autour du maul et grâce à une deuxième avancée individuelle ou collective de mobiliser et d'attirer sur la zone de pénétration d'autres défenseurs créant ainsi les conditions favorables au jeu successif à condition que le jeu soit enchaîné vite dans la zone de plus grande faiblesse défensive. La bonne utilisation de la règle dans ce type de jeu a permis aux Néo-Zélandais de trouver des solutions collectives pour avancer qui ne sont pas encore à la disposition des Sud-Africains.

On peut objecter que le jeu a donné lieu à beaucoup de jeu au pied (74 coups de pied dans le jeu courant) mais il faut relativiser ce constat compte-tenu des mauvaises conditions atmosphériques. La tendance tactique de ces coups de pied a consisté à laisser le ballon sur le terrain, on peut donc regretter que certains n'est pas généré des contre-attaques. Avec la règle des 22 m (l'équipe qui renvoie le ballon dans ses 22 mètres et que le ballon est ensuite botté directement en touche, il n'y a pas gain de terrain.) les initiatives pour contre-attaquer efficacement vont à l'avenir devenir indispensables. Pour qu'il en soit ainsi, il s'agira de savoir organiser la récupération des ballons en impliquant plus de joueurs en défense sur le plan profond et de mettre en place des options collectives de contre-attaque si l'on veut éviter de voir se multiplier le jeu au pied.

L'efficience des All Blacks s'est particulièrement exprimée dans la capacité à avancer individuellement, mais aussi dans leur aptitude à assurer, grâce à leur plus grande réactivité et l'immédiate implication des premiers soutiens. Leur vitesse d'intervention dans la "cellule de vie du ballon" a été impressionnante en terme de puissance et de qualité technique. Il n'est pas facile à ce niveau d'obtenir les deux. Il devenait du même coup difficile pour les Springboks de contester la possession du ballon dans les rucks .

L'affrontement a même quelquefois été féroce et on peut regretter que l'arbitre ait laissé passer l'occasion de sanctionner des comportements de déblayage au-delà du ballon qui sont interdits par la règle et malheureusement encore non arbitrés (c'est là que les arbitres de touches appelés maintenant assistants doivent trouver leur place).

Avant de porter à ce niveau un jugement sur les nouvelles règles il convient bien sûr de voir la suite de la compétition, qui nous donnera une idée plus claire sur le temps de jeu et le comment de l'utilisation du ballon.

La compétition des Tri Nations nous propose 12 matchs au lieu de 8, il conviendra de s'en inspirer pour accéder à un rugby non réducteur où la multiplication des initiatives ne sont pas un frein au résultat mais bien la conséquence (Toulouse en finale est le bon exemple) En ce sens, je retiens aussi que la production des noirs et la victoire a rendu anecdotique les 7 ballons perdus en touche par les All Blacks, même si je suis sûr aussi que l'encadrement Néo-Zélandais eux ne les ont pas oubliés.

Voir les commentaires
Réagir
Vous avez droit à 3 commentaires par jour. Pour contribuer en illimité, abonnez vous. S'abonner

Souhaitez-vous recevoir une notification lors de la réponse d’un(e) internaute à votre commentaire ?