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6 Nations féminin - Lina Queyroi (XV de France) : "J'ai regardé 10 fois la pénalité de Thomas Ramos face à l'Angleterre"

  • Lina Queyroi a pris endosser le rôle de numéro 10 des Bleues avec assurance
    Lina Queyroi a pris endosser le rôle de numéro 10 des Bleues avec assurance Icon Sport - Sandra Ruhaut
Publié le Mis à jour
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Brillante depuis le début du Tournoi, la numéro 10 de Blagnac, aujourd’hui patronne du jeu des Bleues, est pourtant méconnue du grand public. Elle nous livre ici un long entretien dans lequel elle évoque sa passion pour l’exercice du tirs aux but, l’apport de Romain Teulet dans ce domaine, son parcours partagé entre le handball et le rugby, le lourd héritage laissé par Caroline Drouin, ainsi que son éveil en tant que leader de jeu…

Qu’avez-vous retenu de cette victoire contre l’Italie ?

On a le sentiment d’avoir livré notre meilleur match depuis le début du Tournoi. Il nous en reste néanmoins deux, et le discours était de continuer sur cette lancée. L’équipe du pays de Galles va être totalement différente de l’Italie mais on doit garder ce qu’on a bien fait la semaine dernière et corriger ce qui n’allait pas, comme notre fin de match.

Que s’est-il passé d’ailleurs ?

Le score était large, je pense qu’inconsciemment on s’est laissées aller. On a moins communiqué par exemple. Même si on change de joueuse ou qu’on ressent la fatigue, le mot d’ordre est de garder la même intensité ce week-end.

On a le sentiment que vous avez enfin trouvé l’équilibre entre le fait de surjouer à la main ou de ne pas tenter certaines relances…

C’est vrai. On maîtrise mieux notre stratégie de match. Avant, on se perdait dans les rencontres. Soit on jouait tout, soit on ne jouait rien. Contre l’Italie, on a mieux maîtrisé : on a beaucoup joué à la main mais dès qu’on sentait qu’on reculait, on mettait du pied. Cela nous a permis d’aller chez elles et d’exploiter les décalages.

Les Galloises et les Anglaises sont plus puissantes. En tant que numéro 10, vous attendez-vous à utiliser davantage le jeu au pied ?

Les collisions seront plus fortes au milieu du terrain, c’est sûr. Si on ne gagne pas la ligne d’avantage ou si on ne franchit pas, on ira chercher les extérieurs car on a vu que c’était à cet endroit que les Galloises sont un peu plus friables. L’important sera de garder le ballon pour les déplacer, les faire courir car nous sommes plus mobiles qu’elles. On ne les affrontera pas frontalement comme on l’a fait avec les Italiennes.

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Que vous apporte votre consultant jeu au pied Romain Teulet ?

Romain a commencé à faire des interventions dans les clubs depuis décembre dernier, après le dernier WXV. Il nous apporte beaucoup dans le jeu au pied courant ou face aux perches. Il est hyper précis, ne laisse rien au hasard et il nous a fait changer des détails qui ont tout changé. Il est la clé de notre jeu au pied.

À titre personnel, qu’a t-il changé chez vous ?

Il m’a énormément apporté dans les tirs au but et en termes de confiance. Ce dernier point me faisait défaut : en club, je ne butais pas régulièrement et je ne demandais pas à le faire. Je n’osais pas. Aujourd’hui, grâce à Romain, je n’hésite plus et je cherche même à prendre mes responsabilités face aux perches.

Comment fait-on pour passer d’un tel extrême à un autre ?

Le pire, c’est ce que c’est arrivé très vite. Il a tout de suite changé ma façon de buter : mes pas, et mon tir. Les résultats ont été immédiats. Sur le match suivant, avec Blagnac, je n’ai pas eu peur de prendre des pénalités lointaines et tout s’est bien passé. Plus on les passe, plus on est en confiance.

J’adore même écouter la frappe du ballon !

D’où vient votre frappe d’ailleurs ?

Petite, j’ai passé mon temps à jouer au foot dans mon jardin. Je tapais sans arrêt. Et dès que j’ai commencé le rugby, j’ai rapidement posé le ballon sur un plot. Je ne savais pas faire mais ça m’amusait. J’ai toujours aimé ça. Cela m’a donné une bonne coordination de frappe, chose qui fait souvent défaut aux filles parce qu’on leur apprend à buter tard, et j’ai continué de le faire en jouant avec les garçons.

Vous avez donc toujours été attirée par ce jeu au pied…

Oui, vraiment. J’ai commencé à taper très tôt, et aujourd’hui j’adore regarder les gens buter. J’ai dû regarder dix fois de suite la pénalité de la gagne tapée par Thomas Ramos à la fin du match contre l’Angleterre lors du dernier Tournoi (victoire 33-31 à Lyon, le 16 mars dernier, tapée à la 79e minute, NDLR.). J’adore analyser les routines des buteurs, leur façon de se concentrer… J’adore même écouter la frappe du ballon !

Vraiment ?

Oui, c’est un peu comme les fans de Formule 1 qui écoutent les bruits des moteurs. Dès qu’on entend le son de la frappe, on sait si elle est bien tapée ou non. Il faut que cela fasse un bruit sourd, ça indique que le buteur a vraiment traversé le ballon.

Comment avez-vous commencé le rugby ?

À 8 ans, avec ma petite sœur et parce que dans la famille, on est très rugby : mon père y a joué, tous ses amis aussi… J’ai ensuite arrêté pour me consacrer au hand, je jouais demi-centre. J’ai repris le rugby à 12 ans, puis j’ai dû faire un choix entre les deux disciplines.

Pourquoi avez-vous choisi le rugby finalement ?

Ce fut compliqué… Mais depuis toute petite, je rêve de faire partie d’une équipe de France. Peu importe le sport. Je me suis dit que la porte était un tout petit plus ouverte en rugby qu’en hand, notamment à cause de mon petit gabarit. J’avais le choix entre le pôle hand à Talence et le pôle rugby à Toulouse, et j’ai opté pour le deuxième.

Avez-vous toujours eu cet objectif de jouer en équipe nationale ?

Depuis toute petite, je regarde énormément de sport à la télé, et souvent les évènements internationaux. J’ai toujours eu envie d’aller le plus loin possible, de jouer en équipe de France. C’est pour cela que je suis parti de chez mes parents à 15 ans. Ce ne fut pas facile mais c’était nécessaire. Au début, c’était compliqué. En semaine, j’étais en internat, et le week-end je restais en famille d’accueil parce que mes parents habitaient à 300 kilomètres de Toulouse. Mais j’ai été tellement bien accompagnée à Blagnac… Il y avait Geoffrey (Slimane, ex-entraîneur adjoint du Blagnac Rugby Féminin, NDLR.), les parents de Célia Domain (talonneuse de Blagnac et du XV de France), ma famille d’accueil… Ils m’ont tellement soutenu que tout s’est très bien passé.

Mon joueur préféré, c’est Beauden Barrett

N’avez-vous pas été impressionnée quand on vous a confié le maillot de demi d’ouverture du XV de France Féminin ? Juste avant vous, c’est Caroline Drouin qui le portait, et il représentait un lourd héritage…

Cela me mettait la pression parce que « Caro » est une très grande joueuse. Et même si elle repartait avec le VII, on savait qu’elle allait revenir à XV. Il fallait donc que je joue mon rugby, sans essayer de l’imiter car nous sommes deux joueuses différentes. J’essayais donc de prendre les devants, de m’imposer, mais ce n’était pas facile. C’est d’ailleurs ce qu’il me manque encore un peu : m’imposer vraiment en tant que numéro 10. Souvent, les coachs me répètent que la patronne, c’est moi. J’avais un peu de mal au début, car je me disais que je n’étais que de passage, puisque « Caro » allait revenir. Ça va mieux maintenant, et j’ai de plus en plus envie de rester à ce poste, même si je sais qu’elle reviendra après les Jeux Olympiques.

Ce leadership pourrait aussi se traduire sur le terrain, avec la possibilité d’aller jouer plus près de la défense grâce à vos qualités d’appuis et de vitesse. Cela fait partie de vos objectifs personnels ?

Oui. J’ai un profil de distributrice, mais je dois être capable d’attaquer plus souvent la ligne pour devenir une menace et peser sur les défenses adverses. Cela va venir avec la confiance des entraîneurs, la mienne, et celle des filles qui jouent à mes côtés comme Gaby (Vernier, la centre, NDLR.) ou Pauline (Bourdon-Sansus, NDLR.) qui m’accompagnent très bien. Aujourd’hui, je n’hésite plus à faire des choix et à les assumer.

Qui sont vos modèles au poste ?

En garçons, il y a tous les grands buteurs comme Jonny Wilkinson. Mais mon joueur préféré, c’est Beauden Barrett. J’adore le regarder jouer, en 10 ou en 15. C’est vraiment celui que je regarde le plus. Chez les filles, j’aimais beaucoup regarder jouer Sandrine Agricole qui possédait un super jeu au pied, qui attaquait la ligne, qui distribuait bien le jeu…

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