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"Pour la Fédération, le risque financier est nul"

Par Marc Duzan
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Quelles seront les retombées économiques de France 2023 pour le pays ? Et quel impact sur la FFR et ses licenciés ? Le directeur du tournoi Claude Atcher livre les chiffres clés du projet.

Il y a un peu moins d’un an, le projet France 2023 était choisi par World Rugby pour organiser le Mondial. En tant que directeur, de quoi est désormais fait votre quotidien ?

En début de semaine, j’étais à Londres pour une réunion entre les équipes de Rugby World Cup et celles de France 2023. Nous y avons traîté des divers contrats d’assurance. Ce sont des sujets que l’on balaie ensemble toutes les deux mois, à Paris, Londres ou Dublin.

Que s’est-il passé depuis le 15 mai dernier, date à laquelle le Groupement d’Intérêts Public (GIP) chargé de l’organisation de l’évènement a tenu sa première assemblée générale ?

Nous nous sommes d’abord attachés à lever la garantie financière de 236 millions d’euros qui nous avait été imposée par World Rugby dans le cadre du dossier de candidature. J’avais alors dit à Rugby World Cup que je trouvais cette garantie non-justifiée et que dès que j’aurais gagné, je reviendrais les voir à ce sujet. C’est chose faite. 

Pourquoi cette caution était-elle problématique à vos yeux ?

On apporte déjà, via le gouvernement, une garantie financière de 171 millions d’euros, une somme qui n’implique d’ailleurs aucun déboursement anticipé de la part de l’Etat. Nous avons également mis en place un plan de financement sous forme de prêt, puisque le GIP n’aura des recettes propres qu’à partir de 2021. Ce prêt, qui couvrira donc les dépenses effectuées jusqu’en 2021, faisait, à mon sens, double emploi avec la garantie financière demandée par World Rugby.

Quel fut votre argumentaire auprès de World Rugby ?

On a prouvé aux dirigeants qu’à partir de 2021, nous aurions suffisamment de recettes de billetterie pour couvrir les dépenses supplémentaires. Aux côtés du gouvernement, nous nous sommes aussi attachés à transférer vers l’Etat la garantie financière apportée par la Caisse des Dépôts et Consignations (171 milions d’euros).

Qu’est-ce que cela signifie ?

Aujourd’hui, il n’y a plus aucune garantie financière pesant sur la Fédération Française de Rugby en ce qui concerne l’organisation de la Coupe du monde 2023. La FFR va donc organiser un événement planétaire sans risque financier aucun. Ce n’est pas tout. Le GIP va également reprendre les parts achetées par la fédé dans le cadre du programme « hospitalités », établi il y a quelques mois entre Sodexo et la FFR. En termes de marketing, de redevance ou d’hospitalités, le risque pesant sur notre fédération est donc aujourd’hui nul.

Quid de la marque "France 2023" ?

Je suis persuadé qu’il faut que l’on crée une marque très forte, dès cette année. Là aussi, il a fallu convaincre World Rugby : ils étaient d’accord pour que l’on crée une marque mais ils ne voulaient pas qu’on l’annonce avant la fin du Mondial japonais, soit en 2019.

Et alors ?

J’ai expliqué qu’on leur donnait déjà 171 millions d’euros et que l’on n’attendrait pas un an et demi pour créer une marque alors que nous avons besoin de faire la promotion de notre événement dès maintenant. Ils ont compris nos arguments. Après ça, 2000 personnes ont été interrogées à travers le pays. Puis, nous avons interviewé dix-sept personnalités françaises (le réalisateur Olivier Marchal l’ancien capitaine du XV de France Jean-Pierre Rives, Mathieu Bastareaud, le directeur de World Rugby Brett Gosper; etc...) sur leur perception du rugby. Tout ceci nous a permis de créer une plateforme de marque (la plateforme de marque est un outil de management qui permet d’assurer une cohérence dans les actions de communication de la marque, N.D.L.R.) et le logo du tournoi sera quant à lui dévoilé le 15 novembre prochain.

Quel est l’autre chantier ?

Nous venons de faire valider par le ministère du Budget le modèle de convention que l’on souhaite proposer aux neuf villes hôtes. Je commence donc le tour des villes le 20 septembre, dans le but de présenter aux élus le partenariat proposé pour l’organisation des matchs.

Qui paye pour une fan zone, par exemple ? La Fédération ou la ville ?

J’ai réussi à obtenir de Rugby World Cup que nous n’ayons pas d’obligation d’ouverture de fan zone. Si l’on compare avec l’Euro 2016, l’UEFA avait ainsi imposé à toutes les villes hôtes d’ouvrir des espaces dédiés aux supporters pendant au moins trente jours au cours de la compétition. Mais à mon sens, les fan zone ne fonctionnent bien que sur des dates précises. Les villes n’auront donc pas à investir sur des fan zone. On a en revanche demandé aux municipalités de nous proposer des projets -le village rugby, la nuit du rugby, le festival rugby- pour accompagner l’animation dans les cités.

Est-ce tout ?

Non. Si la France est qualifiée pour les quarts, demies ou finale, les fan zone verront alors le jour. Mais dans les stades. Les coûts des collectivités seront donc minimisés.

Lors du Mondial 2007, les stades étaient tous municipaux. Ce n’est plus le cas aujourd’hui. Bordeaux (Matmut), Nice (Allianz) ou Marseille (Orange) sont tous des propriétés privées. Cela veut-il dire que la FFR devra payer pour organiser les matchs de la Coupe du monde 2023 ?

Non. Des études montrent qu’un match rapporte entre 20 millions et 30 millions d’euros de chiffre d’affaires à la cité. Aux villes, donc, de faire leur affaire avec le propriétaire du stade.

Un rapport gouvernemental s’étonnait que World Rugby, qui percevra 110 millions d’euros de votre part, ne prenne aucun risque financier sur l’organisation du Mondial. Est-ce aussi votre point de vue ?

Non. C’est la règle du jeu. Pour World Rugby, les recettes du Mondial représentent 94 % de ses recettes globales. Je peux comprendre que des gens non-initiés soient étonnés de ce schéma mais moi qui suis dans le milieu depuis vingt ans, je conçois que World Rugby ait besoin de cette manne pour développer notre sport à travers le monde.

Vous faisiez déjà partie de l’organisation du Mondial 2007. Quel avait été le bénéfice pour l’état et la fédération ?

La FFR avait obtenu 38 millions d’euros de bénéfices nets et l’impact économique sur le pays avait été estimé à 600 millions d’euros. Pour 2023, on parle de 68 millions d’euros de bénéfices pour la fédération et d’un impact économique d’1,1 milliard d’euros sur le pays.

Pourquoi une telle différence entre les deux éditions ?

En 2007, nous avions eu seulement trois ans pour organiser le Mondial. Nous nous étions donc concentrés sur la logistique proprement dite. Aujourd’hui, nous avons cinq ans devant nous : on va donc se concentrer davantage sur l’économie, les relations avec l’Etat et tout ce qu’on peut apporter au rugby français sur les dix prochaines années. Ce champ d’action, nous ne l’avions pas en 2007.

Quid de l’impact sur les licenciés ?

Il sera très important. En 2008, soit quelques mois après le Mondial en France, le nombre de licenciés avait ainsi augmenté de 35 %. On peut donc s’attendre à ça en 2024. Maintenant, il faudra être en mesure d’accueillir ce flot de pratiquants dans nos écoles de rugby. Il y a donc un gros travail à réaliser en amont au niveau de nos infrastructures.

Existe-t-il un risque pour l’Etat à organiser ce genre d’événement ?

Non. L’Etat couvre la garantie financière du comité d’organisation. Mais pour lui, il n’y a pas de risque sur cette garantie financière (171 millions d’euros). Je m’explique : pour ne pas avoir les moyens de payer cette caution, il faudrait que nous réalisions seulement 36 % de notre recette prévisionnelle en billetterie. Et seul un tsunami ou un cataclysme pourrait avoir un impact aussi néfaste sur la vente des billets…

On peut néanmoins s’étonner du fait que le rapport concernant les retombées financières de France 2023 ait été réalisé par le cabinet Deloitte, l’un des partenaires de l’évènement. Quel crédit apporter à ces conclusions ?

Deloitte était simplement partenaire du dossier de candidature, pas de l’événement en lui-même. La dernière étude qui a été conduite s’est réalisée en complète autonomie et en utilisant une méthode avérée par l’observatoire du ministère des Sports. Vous savez, on a aujourd’hui les chiffres du Mondial anglais de 2015. Il y a eu 1,5 milliard d’euros de retombées économiques sur le pays. Il n’y a donc rien de caricatural ou de surprenant dans le rapport du cabinet Deloitte…

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