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Dans la mêlée de Didier Sanchez

Par Simon Valzer
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    Dans la mêlée de Didier Sanchez
Publié le Mis à jour
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Reconnu comme étant l’un des meilleurs experts français de la mêlée, Didier Sanchez a accepté de nous recevoir pour l’une des séances qu’il mène depuis cinq ans à Colomiers et nous dévoile les secrets de sa méthode qui a façonné les plus redoutables packs de l’hexagone.

Vous ne connaissez peut-être pas Didier Sanchez mais connaîtrez certainement ceux qu’il a façonné à l’image de Nicolas Mas, le droitier aux 85 sélections. Derrière lui, la liste est longue… citons seulement le capitaine du XV de France, Guilhem Guirado, ou encore William Servat, qu’il transforma de numéro huit à talonneur. Mardi dernier, le gourou de la mêlée française nous a donc accepté de nous recevoir pour l’une de ces séances qu’il mène de façon hebdomadaire à Colomiers depuis cinq ans, après avoir officié à Montpellier (où Fabien Galthié dit de lui qu’il est « le meilleur ») et à Perpignan, où il a noué une amitié forte avec Bernard Goutta, actuel manager de Colomiers.

En quoi consiste donc la méthode Sanchez ? D’abord, c’est l’apprentissage de l’impact. Aussi, son instrument favori est le traditionnel joug : « Je n’aime pas l’opposition, car les première ligne tombent dans le duel et oublient la dimension collective. Et puis un joug, c’est dur, stable. Quand on rentre dedans, c’est du bois. Face à cela, il faut faire bloc. » Pour que chaque joueur du huit de devant expérimente les sensations d’un première ligne, Sanchez les fait passer au joug, trois par trois et de façon totalement aléatoire en guise d’échauffement : « D’emblée, les joueurs ressentent l’impact, et l’arrêt net que représente le choc avec le joug », explique Sanchez, « ça les sensibilise tout de suite sur la position de la nuque, du dos, des appuis qu’ils doivent avoir. »

« Dans une mêlée, il faut communiquer »

Rapidement, le technicien passe ensuite au travail à cinq : « à cinq on voit mieux les défauts, donc on peut les corriger dès le début de la séance ». Cette fois, plus de positionnement aléatoire : chacun reprend son poste et soigne les détails. Décryptant l’inclinaison du moindre segment des corps des Columérins, Sanchez donne ses instructions en temps réel : il demande à ses joueurs de relever la tête, au pilier droit de lever ses fesses, au gaucher de garder le dos droit…

Vient ensuite le vrai travail collectif, à huit. Pourquoi le « vrai » direz-vous ? « Parce que dans une mêlée, il est fondamental de communiquer », pose Sanchez. « Les troisième ligne doivent être au service de leurs piliers, et surveiller leur position : vérifier le placement de la tête, du bassin… Si quelque chose ne va pas, il faut le dire. » Inversement, les piliers doivent surveiller les flankers et la précision du positionnement de leurs épaules : « C’est dans le pli fessier », insiste Sanchez, « quelques centimètres plus bas, et les flankers poussent sur les cuisses des piliers et les déséquilibrent. »

La séance se poursuit, et les joueurs enchaînent les mêlées à intensité maximale. Pour corser le tout, Sanchez serre les roulements du joug et ajoute des joueurs dessus. Chaque mêlée comporte trois poussées : l’impact, puis deux poussées successives demandées par Sanchez et commandées par le talonneur. Pour encore compliquer la chose, Sanchez retarde ou avance la seconde poussée : « Afin d’effectuer une reprise d’appui », nous confie-t-il. En fin de séance, pas moins de neuf avants montent sur le joug. L’ensemble approche la tonne et demie. L’objectif ? « Le faire bouger à l’impact », pose le technicien. Les joueurs, répartis en deux packs, se prennent au jeu. Et les deux relèveront avec succès le défi.

Skills et travail en opposition pour finir

Au bout d’une heure de travail, les joueurs commencent à accuser le coup. La séance n’est pas terminée pour autant. Après un débriefing haut en couleur (« Les mecs, en mêlée on relève la tête, on n’est pas là pour se regarder les c... »), Sanchez reprend ses première ligne dans des ateliers spécifiques, cette fois en opposition. En commençant par du un contre un, Sanchez fait retravailler les prises de position et se concentre sur des aspects qu’ils est impossible de travailler contre un joug : la liaison sur l’adversaire, le positionnement du coude, la direction des appuis et de la poussée. Au sujet du coude, Sanchez préconise de le garder haut, afin de résister à la traction vers le bas du pilier adverse.

Ensuite, on passe sur du deux contre un, puis trois contre deux : « l’infériorité numérique met les joueurs sous des pressions inhabituelles, dans lesquelles ils seront obligés d’avoir une position impeccable s’ils veulent s’en sortir. » La séance se conclut sur du trois contre trois, afin de remettre en perspective tous les enseignements précédents. Là, Sanchez vérifie l’orientation des appuis et de la poussée : « Il faut placer les pieds à 13 heures, et pousser dans cette direction, indique le technicien. De cette façon, le droitier fait sortir le gaucher adverse, le talonneur passe sous son vis-à-vis, et le gaucher est plus fort pour relever son pilier droit. Tous doivent pousser dans le même sens, à 13 heures. »

C’est aussi l’heure à laquelle se termine la séance. Après un ultime discours et de longues embrassades avec « ses petits » comme il dit, Didier Sanchez les libère pour le déjeuner. Le technicien a le sourire, et le sentiment du devoir accompli. L’éternel bénévole de la mêlée française peut regagner Lavelanet l’esprit tranquille. La suite de l’histoire appartient aux joueurs. D’ailleurs, le seul essai qu’ils marqueront contre les surprenants Montalbanais sera un essai de pénalité.

par Simon Valzer

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