Mourad Boudjellal : « O'Connor n'a tué personne »

Quelle décision sera prise à l'encontre de James O'Connor, placé en garde à vue dans la nuit de vendredi à samedi, en possession de cocaïne ?

Je vais le recevoir aujourd'hui. Il ne va pas échapper à une mise à pied et ensuite on prendra une décision. Mais nous sommes dans deux cas très différents. D'un côté il y a un joueur de 36 ans (N.D.L.R. 35 en réalité) dont la carrière est terminée, de l'autre un gamin de 26 ans dont la carrière, je l'espère, ne l'est pas. Nous avons un joueur qui, apparemment, aurait été attrapé positif à la cocaïne, et l'autre négatif mais qui apparemment était un bon commerçant. Remarquez je savais qu'Ali Williams était un bon négociateur, et nous en avons encore eu la confirmation... Il négocie bien, aussi bien que ses contrats ! (rires). Ensuite je ne vais pas faire l'apologie de la cocaïne, puisque même dans le Rock & Roll c'est interdit et que dans le rugby c'est fortement déconseillé, mais j'attends, je veux d'abord entendre James O'Connor. 

James O'Connor pourra-t-il profiter de la « jurisprudence Ben Barba », qui a rejoint le RCT fin janvier, après deux contrôles positifs à la cocaïne ?

Certaines personnes répètent « voilà vous avez Ben Barba » mais ce n'est pas pareil. Ben Barba c'était avant. C'est comme si vous vous mettez avec une personne qui avait une relation extra-conjugale avant vous et qui vous affirme qu'en se mettant avec vous elle sera fidèle, vous n'avez rien à lui reprocher, tant qu'elle n'a pas fauté ! Ben Barba c'est un peu le cas. Il a déjà fait une connerie mais je veux lui laisser une seconde chance. La différence c'est que James a également fait une connerie, mais il l'a fait chez nous. C'est donc difficile à défendre. Une seconde chance ? Je vais en discuter avec lui. Mais nous avons affaire à un gamin de 26 ans, et nous ne sommes pas là pour le détruire. 

James O'Connor et Ali Williams sont-ils des cas isolés ?

Je ne pense pas qu'il y ait de dopage dans le rugby, hormis des cas isolés. Pourtant, ça n'engage que moi, mais j'ai l'impression que la cocaïne s'est un peu invitée dans le milieu festif. Il y avait eu l'étape de l'alcool, mais là c'est un niveau au dessus. Nous ne pouvons pas cautionner ça et il faut que ça s'arrête. J'ai envie de savoir si c'est un cas isolé ou si d'autres joueurs aiment bien faire la fête... C'est un sentiment, je n'ai pas de preuve, mais j'ai l'impression que ça s'est invité dans le milieu du rugby. […] Ce qui me choque le plus c'est que nous avons samedi un match très important contre Brive, et qu'un de mes joueurs est à 3 heures du matin dans une boîte à côté de l'Arc de Triomphe avec je ne sais pas combien de grammes d'alcool dans le sang et qui en plus consomme de la cocaïne. C'est ce qui me gêne le plus, après O'Connor n'a tué personne. Il s'est fait du mal à lui, et je ne vais pas défendre la consommation de cocaïne, mais il n'a braqué personne. 

Cette affaire cache-t-elle un mal plus profond ? 

La drogue est un mange cerveau qui détruit la vie. Ça crée un bonheur totalement illusoire, mais cache une détresse bien réelle. Je ne voudrais pas que dans la troisième mi-temps moderne on remplace l'alcool par la coke. […] Pour James O'Connor je mets plus ça sur le compte de la détresse que de la bêtise. On s'est occupé de lui, je sais qu'il a des choses à régler, mais ce n'est pas la cocaïne qui va le régler, c'est certain. C'est un gamin de 26 ans, qui a des soucis et je ne suis pas là pour le tuer. Quelque soit la décision que je prendrai, je tiendrai compte de ne pas abîmer le gamin. 

Par Pierrick Ilic-Ruffinatti