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Jacques Fouroux, dix ans après…

Par Jérôme Prévot
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    Jacques Fouroux, dix ans après…
Publié le Mis à jour
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En 2005 disparaissait brutalement Jacques Fouroux, personnalité hors norme. La plus forte peut-être de l’histoire du rugby français.

On allait presque l’oublier… Pas lui, bien sûr, mais la date de l’anniversaire de sa disparition brutale en décembre 2005. Jacques Fouroux, s’il avait vécu, serait forcément toujours sollicité, au moins par les médias pour donner son avis. Mais quelque chose nous dit qu’il serait peut-être encore impliqué, ici ou là, en France, à l’étranger à quinze ou à treize, en politique ou dans les médias. C’était assurément une personnalité énorme, peut-être la plus forte que n’ai jamais connu le rugby français. De lui, il nous reste d’abord sa verve, son vocabulaire et son sens de la formule : chose étonnante quand on réalise qu’il avait arrêté l’école très tôt. Mais il maniait le verbe aussi bien que le ballon, sinon moeux auraient dit ses détracteurs. Car Jacques Fouroux fut d’abord un demi de mêlée aboyeur à Auch, Cognac et La Voulte, il se hissa jusqu’en équipe de France malgré une technique approximative, il était moins doué que la plupart de ses concurrents mais il possédait un atout maître : son charisme et sa faculté à commander les autres. Il avait aussi un culot en acier. C’est comme ça qu’il conquit sa place de titulaire en équipe de France d’ailleurs, au cours d’une tournée en Afrique du Sud en 1975. Il osa pousser un coup de gueule mémorable à l’endroit des sélectionneurs et Albert Ferrasse et Guy Basquet en furent séduits. Voilà comment Jacques Fouroux, et son mètre soixante-trois, se retrouva capitaine de l’équipe du Grand Chelem 1977, cornac d’un pack de fer qui faisait peur à tous les Britanniques. Puis il quitta les Bleus à grand fracas après un France-Roumanie à Clermont-Ferrand en s’adressant à la presse sur un ton grandiloquent : « Messieurs les journalistes, vous qui avez si souvent trempé votre plume dans le vitriol pour écrire sur moi… Prenez vos encriers et buvez un coup à ma santé ! ». Jacques Fouroux était l’archétype du bon client médiatique, son entretien télévisé avec Pierre Salviac demeure un classique : « Vous avez une passe de maçon ! Il n’y a pas de sot métier. »

Quatre ans après sa retraite, il fut nommé sélectionneur du XV de France, il inventa d’ailleurs la fonction car avant lui, les entraîneurs n’étaient pis en avant, ils ne faisaient pas vraiment l’équipe. Fouroux devint le vrai patron des Bleus et d’entrée de jeu les conduisit au Grand Chelem 1981 puis à celui de 1987. Il régna huit ans sur la sélection ce qui fit de lui un acteur de la première Coupe du Monde. À ce moment-là, l’équipe de France dominait le Tournoi, Fouroux la menait à la baguette avec des discours enflammés, des méthodes parfois très rudes, on disait que ses entraînements étaient plus durs que les matchs. La préparation du France-Nouvelle-Zélande de Nantes fut un sommet du genre, une semaine d’enfer où il excita les joueurs contre lui pour en faire des gladiateurs déchaînés. Sa personnalité bouillonnait sans cesse aussi bien dans sa vie sportive que dans sa vie de négociant en produits alimentaires qui lui faisait sillonner la France. Il aurait aussi rêvé de devenir patron de la FFR après Ferrasse ce qui le poussa à allumer la mèche de la plus grande crise de l’Histoire dans les années 90-91. On pourrait ainsi décrire sur des lignes et des lignes les chantiers qu’il ouvrit à partir des années 90 : de la relance du Treize à la montée en puissance du FC Grenoble en passant par les reprises du Racing puis du FC Auch, la ville où tout avait commencé pour lui en 1947. Il avait des avis sur tout, des visions parfois. Dans les années 80, il avait anticipé l’évolution physique du rugby en plaçant de plus en plus de costauds au poste de trois quart centre. On se souvient aussi de lui, ferraillant (c’était son grand mot) contre les premiers critères du professionnalisme voulus par la LNR. Fouroux était un polémiste infatigable même si dans les dernières années, il avait moins la baraka. On l’avait croisé alors qu’il entraînait un club italien, l’Aquila. On le comparait souvent à Napoléon, il mourut dans une forme d’exil lui aussi-même s’il n’y avait pas un océan entre lui et ses anciens champs de bataille. Il aurait rebondi, c’est sûr. Une attaque cardiaque nous a privés de ça.

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