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Champions Cup - Denis Charvet avant Toulouse - Racing 92 : "Je crains qu'il n'y ait pas photo"

Par Nicolas Zanardi
  • Denis Charvet qui a joué pour Toulouse et le Racing voit forcément cette confrontation d'un œil particulier.
    Denis Charvet qui a joué pour Toulouse et le Racing voit forcément cette confrontation d'un œil particulier. Icon Sport - Johnny Fidelin
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L'ancien centre international, Denis Charvet, passé par le Stade toulousain et le Racing 92, connaît bien ces deux institutions du rugby français et porte un regard singulier sur leur rivalité centenaire.

Si l’on vous parle des Toulouse-Racing, qu’est-ce que cette affiche vous évoque ?

Spontanément, il me revient ce match du 10 avril 1988, qui est un souvenir incroyable. Ce jour-là, quand nous étions sortis du vestiaire avec Toulouse, nous nous étions aperçus que les trois-quarts du Racing s’étaient peints en noir, de la tête aux pieds (rires). Après le match, Jean-Ba' Lafond m’avait dit que même leurs avants n’étaient pas au courant de ce qu’ils allaient faire, et que ça les avait un peu inquiétés… C’était la grande époque du show-biz et ce jour-là, ils avaient fait ça officiellement pour rendre hommage à leur pilier, Momo Lelano. Mais la vérité, c’est que ça nous avait pas mal désorientés car sur le terrain, on avait du mal à savoir qui était qui. À tel point que la rencontre s’était terminée sur un score nul (18-18), alors que nous étions quand même un peu plus forts qu’eux, à l’époque…

L’âge d’or des confrontations entre les deux clubs réside probablement en cette période, non ?

Sans doute, mais je vais vous dire : ces matchs, ce sont des crève-cœurs et essentiellement des mauvais souvenirs pour moi ! J’ai joué deux Toulouse-Racing en demi-finale du championnat de France : une avec Toulouse en 1990 à Béziers, l’autre avec le Racing un an plus tard à Bordeaux. Eh bien, j’ai perdu les deux ! (sourire) La deuxième à cause de ce fameux drop accordé à mon ami Philippe Rougé-Thomas alors qu’il était passé sous la barre transversale… Ce sont des matchs qui ne m’ont jamais porté chance.

Paradoxalement, les Toulouse-Racing sont toujours considérés comme de grosses affiches alors que, du strict point de vue des palmarès et des confrontations directes, cela ne se justifie pas vraiment…

Sans faire injure au Racing, c’est vrai qu’en termes de rivalité sportive entre les deux clubs, il n’y a pas photo. Toulouse règne sans partage sur le rugby français depuis trente ans… Mais il y a quand même un lien qui unit ces deux clubs, qui ont toujours eu beaucoup de respect l’un envers l’autre. C’est une querelle d’écoles, en fait. Toulouse, même si certains peuvent trouver ça prétentieux, c’est une école de jeu, avec sa propre culture. Et au Racing, il y a une forme d’éducation très spécifique, très anglo-saxonne, presque aristocratique. Je ne vais pas aller jusqu’à dire que c’est le peuple contre l’aristocratie, mais il y a un peu de ça. D’autant qu’il faut se souvenir qu’avant l’émergence du Stade français, le Racing incarnait l’image des titis parisiens lorsqu’il se déplaçait en province. Et il s’en nourrissait.

Les joueurs passés par les deux clubs incarnent génération après génération une idée d’esthétisme : de Borde et Jauréguy à Gaël Fickou en passant par vous, Gérald Martinez, Erik Bonneval ou bien sûr Jean-Pierre rives… Comment vous l’expliquez-vous ?

À titre personnel, ce petit rejet m’avait toujours interpellé et a beaucoup contribué à ma volonté d’aller un jour évoluer en ciel et blanc, pour voir ce qui se passait de l’autre côté de la barrière. Quand le Racing se déplaçait à Toulouse, comme partout ailleurs en province, on ressentait vis-à-vis d’eux une espèce de… (il hésite) Oui, une espèce de jalousie qui ne disait pas son nom. Je savais qu’en signant là-bas, j’y perdrais un peu en matière de jeu et de rigueur par rapport au Stade toulousain mais que j’allais y toucher autre chose. Une vie différente, qui m’attirait : Paris, c’était Saint-Germain, les acteurs, le show-business, et le Racing était la porte d’entrée à tout ça. Jean Castel avait joué au Racing et à travers lui, tu avais tes entrées partout dans la nuit parisienne. En vivant cela, je comprenais bien mieux le pourquoi de la jalousie que les autres clubs ressentaient vis-à-vis du Racing, et qui perdure qu’on le veuille ou non de nos jours, malgré tout. Il n’y a qu’à voir le beau monde qui se presse régulièrement à l’Arena…

Pour parler d’actualité, que vous évoque le huitième de finale à venir ?

Cela risque de ne pas faire plaisir à mes amis du Racing mais malheureusement, je crains qu’il n’y ait pas photo. Mon principal regret, il est que ce match ne puisse pas se jouer au Stadium comme cela était initialement prévu, car cela génère très souvent des ambiances extraordinaires. Les Toulousains adorent y jouer, et j’imagine que cela a été une petite déception pour eux que de devoir le disputer à Ernest-Wallon. Mais je n’imagine pas une seconde que cela puisse les perturber, au contraire. C’est leur jardin, qu’ils connaissent dans les moindres recoins. Et la Coupe d’Europe, c’est « leur » compétition, celle qui les fait rêver, celle qui les place actuellement le plus en compétition puisqu’ils sont à la lutte avec le Leinster en termes de trophées gagnés. Les Toulousains seront prêts.

Comme toujours lorsque les phases finales approchent, nous direz-vous…

C’est certain. Même lorsqu’il est dans un mauvais jour comme il l’a été contre Pau, le Stade gagne, c’est un signe qui ne trompe pas. Comme l’a dit Antoine Dupont, certains Toulousains avaient probablement déjà la tête au huitième de finale. Historiquement, Toulouse répond toujours présent dans ses grands rendez-vous européens. Le Stade a récupéré Romain Ntamack qui a faim de jeu et qui semble plus costaud que jamais, Dupont est en pleine forme après sa parenthèse à 7, la ligne de trois-quarts va à 2000 à l’heure et le banc est juste monstrueux… Cela semble d’autant plus déséquilibré que, même s’ils vont peut-être récupérer Kolisi qui sera quoi qu’il arrive en manque de rythme, les Racingmen ont perdu très gros le week-end dernier avec les blessures de Le Garrec et Gibert, dont on a mesuré l’importance pendant les doublons.

L’expérience de Stuart Lancaster, qui a battu Toulouse lors de ses trois dernières défaites en phases finales de Coupe d’Europe, n’est-elle pas un argument en faveur du Racing ?

Peut-être, oui… Mais l’expérience, c’est surtout sur le terrain qu’elle compte. Les Toulousains ont réussi le doublé en 2021 tandis que le Racing a perdu à trois reprises en finale de Champions Cup, et que Stuart Lancaster n’en a gagné qu’une sur quatre… Même le facteur de l’expérience penche en faveur de Toulouse, à mes yeux. J’ai beau chercher, j’ai du mal à voir comment le Racing pourra enrayer la machine toulousaine…

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Les commentaires (4)
CUBITUS Il y a 22 jours Le 07/04/2024 à 12:01

charvet = futur commercial de "comme j'aime" :))

rugbypass Il y a 22 jours Le 07/04/2024 à 06:17

on verra au coup de sifflet final!

pasali Il y a 22 jours Le 07/04/2024 à 00:21

Charvet, une lumière ^^