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Top 14 - Yannick Bru - Philippe Tayeb : les raisons d’une brouille à Bayonne

  • Yannick Bru et Philippe Tayeb ont incarné le renouveau de l'Aviron bayonnais entre 2018 et 2022.
    Yannick Bru et Philippe Tayeb ont incarné le renouveau de l'Aviron bayonnais entre 2018 et 2022. Icon Sport - Icon Sport
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Yannick Bru et Philippe Tayeb vont se recroiser pour la première fois, samedi, lors de la rencontre qui opposera l’Union Bordeaux-Bègles à l’Aviron bayonnais. D’abord proche, Leur relation avait volé en éclats après leur collaboration chez les Basques. Aujourd’hui, les deux hommes n’ont plus aucun contact.

C’est l’histoire d’un duo qui a œuvré côte à côte pendant quatre ans, qui a connu des très hauts (deux accessions), des très bas (une descente) et dont le chemin s’est séparé un soir de sacre, au GGL Stadium de Montpellier, en finale de Pro D2. Yannick Bru et Philippe Tayeb ont incarné, entre 2018 et 2022, le visage du renouveau de l’Aviron bayonnais. La relation entre les deux hommes a, depuis, pris un virage à 180 degrés. "Aujourd’hui, on ne se parle plus du tout. C’est comme ça. C’est la vie", reconnaît Tayeb, l’actuel président du conseil d’administration du club.

C’est en avril 2018, alors que l’Aviron sort d’une saison compliquée d’un point de vue sportif (8e du classement), que Philippe Tayeb est élu président du directoire de Bayonne. Quelques jours plus tard, Yannick Bru est intronisé manager de l’Aviron. "C’est un ami depuis 25 ans", dit alors Tayeb, lors de sa conférence de rentrée. L’ancien adjoint en équipe de France apporte vite une certaine rigueur sur les bords de Nive, autour d’un staff étoffé (Artiguste, Loustau, Rey, Etcheto). "Ce que je vous promets, c’est du travail et une attitude. Je me suis engagé pour ça", déclare alors Bru, à sa prise de fonction, à l’aube de la saison 2018-2019. Un an plus tard, au bout d’une finale à Pau face à Brive et d’un coup de pied de Martin Bustos Moyano, Bayonne accède à nouveau au Top 14.

Divergences autour du projet "Jean-Dauger Etxea"

Tout semble aller pour le mieux à l’Aviron où l’équipe basque, profitant de la Coupe du monde, réussit son retour dans l’élite. Bayonne, habitué à faire parler pour son instabilité, a trouvé un technicien de renom et un président qui compte donner un coup de neuf à Jean-Dauger, où les préfabriqués sont là depuis des années. L’Aviron pointe à la neuvième place du classement au moment où le championnat est arrêté (mars 2020) en raison de la pandémie de Covid. "À Bayonne, il y a une unité sans faille avec la direction et les actionnaires. Cette unité, je ne l’avais pas connue depuis au moins deux ans", glisse encore Yannick Bru, au cours d’un long entretien qu’il nous accorde en juin 2020. Des propos qui font écho à ceux tenus par Philippe Tayeb, en mai 2019, puisqu’il clame, dans les colonnes de Sud Ouest : "Il n’y aura jamais de dissolution Tayeb/Bru, c’est comme ça." Alors, comment est-on passé de ces déclarations d’union "pour la vie" à une telle défiance froide ?

Yannick Bru est arrivé à Bayonne en 2018.
Yannick Bru est arrivé à Bayonne en 2018. Icon Sport - Icon Sport

En coulisses, le premier point de tension arrive. Il concerne le virage stratégique pris par le club autour de la rénovation et de la modernisation du stade Jean-Dauger. "Je suis venu pour un projet qui s’appelait "Jean-Dauger Etxea", basé sur les jeunes du club, la formation locale, le territoire. Etxea, ça veut dire la maison. La priorité était la construction du centre de performance, une usine à champions. Après la montée en Top 14, on m’a informé que la vision avait un peu changé", regrettera Bru auprès de nos confrères de Sud Ouest, au moment de quitter l’Aviron.

Dans le planning des travaux de refonte de Jean-Dauger, la direction décide de prioriser la construction de deux tribunes (Kéolis et Europcar), pour faire grimper le nombre de places hospitalités, lesquelles doivent, derrière, permettre à l’Aviron d’assurer des revenus supplémentaires. Ces deux tribunes sont, en partie, construites pendant la pandémie, à une période où les matchs doivent se disputer à huis clos ou avec des jauges restreintes. Le club limite donc le manque à gagner au niveau de la billetterie pendant une période de travaux. "Tout ce qui a été dit a été fait" répète souvent Tayeb, comme pour rappeler que, pendant longtemps, les projets "sur le papier", se sont succédé à Bayonne, sans jamais voir le jour.

Bru reste malgré la descente

Le centre d’entraînement (AB Campus) est, lui, livré après les tribunes (août 2022). Surtout, Bru vit comme une trahison la différence qui existe entre le projet de centre de performance qui lui avait été vendu et pour lequel il s’était engagé à Bayonne (avec huit pôles distincts et des logements pour les jeunes) et celui qui est officiellement lancé, en décembre 2021. " Le club a délégué la construction du centre à la ville et aux pouvoirs publics, poursuit Bru dans le quotidien local. La symbolique était forte. Il n’y a pas une écurie de Formule 1 qui confie la création de son moteur aux pouvoirs publics. Ou alors, c’est que tu considères que ce n’est plus ton moteur. […] Je n’en veux surtout pas à la municipalité. Par contre, j’ai le droit de ne pas être d’accord avec cette orientation stratégique prise par la direction du club."

Staff et direction "très professionnels jusqu’au bout"

Au-delà de ces dissensions en coulisses, malgré la prolongation du contrat de Bru jusqu’en 2025, la fin de saison 2020-2021 est compliquée d’un point de vue sportif et Bayonne, au bout d’un match d’accession devenu légendaire, repart en Pro D2 alors que Biarritz monte en Top 14.

C’est un coup de tonnerre sur les bords de la Nive. Le technicien, après quelques jours de réflexion, décide de rester. "Yannick Bru va s’engager pendant un an avec l’objectif de faire remonter le club, au même titre que moi en tant que président. Au bout de cette année, il aura le choix de continuer l’aventure avec Bayonne ou de partir vers d’autres horizons. Je suis persuadé qu’il est l’homme de la situation" dit Tayeb en juin 2021. Un mois plus tard, interrogé sur Rugbyrama.fr par l’ambition affichée de son président, Bru rétorque : "Vous pouvez tout relire et je ne l’ai jamais annoncé (l’objectif de remontée, N.D.L.R.). Je connais trop le sport de haut niveau et les aléas liés à la performance. Moi, je vais m’attacher à ce que l’Aviron bayonnais assume son statut d’écurie costaud de Pro D2."

Les supporters bayonnais avaient rendu hommage à leur entraîneur, après le retour en Top 14 en 2022.
Les supporters bayonnais avaient rendu hommage à leur entraîneur, après le retour en Top 14 en 2022. Icon Sport - Icon Sport

Équipe à battre, avec son étiquette de favori de la division, Bayonne passe une grande partie de la saison à la troisième place du classement mais connaît deux faux pas à la maison, contre le Stade montois (14-33) et Grenoble (35-37). Le staff est alors sous pression, les joueurs cadres sont sondés par le président Tayeb (lequel fait face à la grogne de certains actionnaires) au cours d’une réunion au domaine Etxezahar de Bardos (Pyrénées-Atlantiques). Les leaders de l’équipe demandent à continuer avec le staff en place. Bru et ses adjoints finiront la saison, malgré tout. En interne, on évoque une grande solidarité entre les différents membres du staff, en mission pour ramener l’Aviron dans l’élite du rugby français. "Nous étions au courant qu’il y avait des tensions entre eux (la direction et le staff, NDLR), mais, pour le bien sportif de l’équipe, à aucun moment on ne les a ressenties. Ils ont été très professionnels jusqu’au bout", remarque Jean Monribot, un des leaders du groupe.

L’équipe monte en puissance avec l’arrivée des beaux jours, domine Oyonnax (32-20) en demi-finale et écrase le Stade montois en finale à Montpellier (49-20), offrant ainsi à son manager une sortie par la grande porte. "Yannick a rempli sa mission, ça a été un bon professionnel. Il a fait du bon travail pendant quatre ans, il a su faire remonter le club en 2021/2022. C’est la mission qui lui a été demandée. La fin de notre relation nous appartient, je n’en parlerai pas publiquement", commente sobrement Philippe Tayeb, joint cette semaine. Yannick Bru, lui, n’a pas souhaité réagir à son sujet de sa relation avec son ancien président. Il a tourné la page de Bayonne, où il a découvert le rôle de numéro un et où il s’est forgé, malgré tout, des souvenirs marquants avec deux boucliers de Pro D2. Philippe Tayeb incarne toujours, à l’hiver 2024, la tête du projet ciel et blanc. Même si l’histoire entre les deux hommes est désormais terminée, ils auront eu, côte à côte, un impact sur l’histoire récente de l’Aviron bayonnais.

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Les commentaires (5)
Zaintza Il y a 3 mois Le 05/01/2024 à 11:57

Très embêté et triste de cette situation. Il faut rappeler que Yannick Bru a eu la classe de rester à l'aviron après la descente surprise et inattendue de juin 2021 pour faire remonter le club et ainsi ne pas laisser tomber Bayonne. En revanche son attitude de cette année nous a tous surpris et extrêmement déçu. Pousser pour avoir des jeunes talents du club encore sous contrat (Perchaud) et soutenu par un président qui avait condamné à cette même période de juin 2021 ce type de pratiques c'est vraiment très moyen...maintenant on ne connait pas toutes les coulisses mais c'est dommage qu'une si belle histoire se termine ainsi.

ruedos Il y a 3 mois Le 05/01/2024 à 10:32

Personnellement, et même si differends entre le pdt de l'Aviron et Y. Bru, assez déçu du comportement de ce dernier envers le club et la formation bayonnaise, je ne reconnais pas, dans ses agissements actuels, les valeurs que Y.Bru laissaient croire et ses discours de façade....paroles, paroles

Morisketou Il y a 3 mois Le 05/01/2024 à 09:31

Je me trompe ou bien !
C'est dingue cette propension du Midol à aller chercher du croustillant, à surfer sur les antagonismes, les inimitiés réelles ou supposées, à racler les fonds de gamelles sales.
Ca me rappelle certains sketchs des Inconnus :
"dont on m'a dit qu'au sujet duquel, j'ai oui dire que ..."
Mais cela ne nous regarde pas !