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XV de France - Anthony Jelonch revient sur la Coupe du monde : "Si on garde la tête au fond du seau pendant 4 ans, ça va être long"

Par Vincent Franco
  • Anthony Jelonch revient sur la défaite face aux Boks, en avouant être passé à autre chose.
    Anthony Jelonch revient sur la défaite face aux Boks, en avouant être passé à autre chose. Icon Sport
  • Le Toulousain l'avoue, les Springboks ont été "plus malins".
    Le Toulousain l'avoue, les Springboks ont été "plus malins". Abaca / Icon Sport
Publié le Mis à jour
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Avec un certain recul assumé, Anthony Jelonch revient, plus d’un mois après, sur la défaite face à l’Afrique du Sud en quart de finale. Il le martèle : il faut passer à autre chose et avancer.

Un mois après, avez-vous digéré la défaite face à l’Afrique du Sud ?

Il faut passer à autre chose. On a eu cette période dans laquelle nous avons broyé du noir après ce quart de finale mais il faut avancer. Le fait de retrouver le Stade toulousain m’a fait énormément de bien. Je suis tourné vers l’avenir, c’est-à-dire le Top 14 et le prochain Tournoi des 6 Nations en ce qui concerne l’équipe de France.

Pour vous, la page est complètement tournée ?

Oui et il fallait le faire assez vite. C’est une réelle déception mais on ne va pas garder la tête au fond du seau pendant quatre ans en attendant le prochain Mondial, sinon ça va être long. Nous sommes des sportifs professionnels, donc il faut repartir au boulot, analyser ce qui a fonctionné ou pas et aller de l’avant.

Quels souvenirs restent-ils de ce quart de finale ?

Me vient forcément en tête cette première mi-temps, durant laquelle nous sommes dominants. Le problème, c’est que leurs trois essais à zéro passe ou presque nous plombent le match. C’étaient des essais faciles à éviter et on les laisse clairement dans la partie. Nous avons gagné nos duels mais ils s’en sortent à la pause avec seulement trois points de retard. C’est très frustrant de ne pas avoir réussi à complètement faire la différence lors de nos temps forts.

On a énormément parlé d’arbitrage à l’issue de cette défaite. Comment avez-vous vécu les décisions litigieuses de Ben O’Keeffe sur le terrain ?

Je ne crierai jamais au scandale en ce qui concerne l’arbitrage. Si on regarde bien, peut-être qu’Eben Etzebeth ne fait pas en-avant en début de match. Je pense simplement que les Springboks ont été plus malins. Ils ont réussi à jouer à la limite comme certaines équipes savent bien le faire et félicitations à eux. De notre côté, nous sommes restés sobres. Peut-être est-ce dû à un léger manque d’expérience.

Avez-vous revu le match ?

Oui, bien sûr. Je l’ai regardé dès le lendemain matin dans ma chambre d’hôtel car je n’arrivais pas à dormir. À chaque fois que je joue à 21 heures, je ne trouve pas le sommeil à cause de l’adrénaline ; donc j’en ai profité pour revoir le match.

Quels enseignements en avez-vous tirés ?

Que les Springboks n’auraient jamais dû être dans le match à la mi-temps. La frustration était encore plus grande mais bon, on ne va pas rejouer la rencontre donc j’ai essayé de positiver pour rapidement passer à autre chose. Le résultat est cruel mais on se l’est cherché aussi. S’apitoyer sur son sort n’a jamais aidé personne.

Est-ce la déception d’une vie ?

Je ne sais pas si c’est la déception d’une vie. Bien sûr que c’est dur de perdre d’un petit point en quart d’une Coupe du monde qui se déroule chez toi. Mais ce qui est certain, c’est que nous sommes tous très jeunes et je suis persuadé que nous allons gagner d’autres titres avec le XV de France. Le talent y est, donc je ne suis pas vraiment inquiet.

Comment était le vestiaire quelques minutes après le coup de sifflet final ?

Tout le monde était forcément triste, le moral dans les chaussettes. Mais ce qu’on s’est dit, c’est qu’il fallait relever les yeux. On n’allait pas se tirer une balle dans la tête non plus et personne n’allait mourir parce qu’on avait perdu.

Vous avez l’air un peu indifférent au sujet de cette défaite…

C’est simplement que je suis passé à autre chose. Je ne minimise pas le résultat. Ce fut très brutal pour tout le monde. Mais c’est dans les prochains mois que nous saurons si nous avons le caractère pour retrouver les sommets.

Est-ce dans votre nature de rapidement faire la part des choses ?

Tout le temps. J’ai connu d’autres défaites importantes dans ma carrière et j’ai toujours réussi à rapidement basculer du bon côté. Je sais que nombreux de mes coéquipiers ont la même mentalité, même si personne ne réagit de la même manière. Aujourd’hui, ma seule volonté, c’est d’être bon avec Toulouse et performant lors du prochain Tournoi des 6 Nations pour faire plaisir à tous les Français qui nous soutiennent depuis de longs mois.

Comment avez-vous vécu « l’épisode Dupont » juste avant le quart de finale ?

Sur le terrain face à la Namibie, nous avons rapidement compris que c’était sérieux car Antoine nous a directement fait comprendre que ça avait pété. Mais au fond de moi, je savais qu’il serait avec nous pour le quart de finale. Cela ne pouvait pas en être autrement. Je me suis dit que si j’étais revenu des croisés en six mois, il allait bien revenir d’une blessure au visage en trois semaines (rires).

Il paraît que vous l’avez bien chambré avecsoncasque sur la tête…

On lui a simplement dit qu’il ressemblait à un Géorgien. C’était un petit chambrage. On s’est aussi demandé s’il s’inspirait de Baptiste Jauneau, le jeune demi de mêlée de Clermont pour être bon avec un casque sur les oreilles. Je n’ai pas été surpris, moi, puisque quand il était petit, il en avait un.Je l’avais déjà vu avec quelque chose sur la tête.

Vous parlez beaucoup du Tournoi dans vos précédentes réponses. La victoire est-elle obligatoire en 2024 pour « effacer » d’une certaine manière la déception du Mondial ?

Je ne pense pas que ce soit obligatoire. Si on perd, ce ne sera pas la fin du monde mais il est vrai qu’il va falloir montrer un très beau visage pour rendre fier nos supporters. Ensuite, nous ne sommes pas les seuls déçus. Les Irlandais vont arriver revanchards, tout comme les Anglais, qui se sont remis la tête à l’endroit.

Est-ce excitant de jouer contre l’Irlande dès le premier match ?

Je m’en fous un peu de l’adversaire. Il me tarde simplement de commencer ce Tournoi des 6 Nations. En plus, on sait que nous allons commencer notre aventure dans le Vélodrome de Marseille. On se sent vraiment bien dans ce stade. Le public est toujours extraordinaire là-bas, donc c’est forcément excitant.

De votre côté, vous avez réussi votre pari d’être de retour pour la Coupe du monde après une grave blessure à un genou. Que retiendrez-vous de votre course contre-la-montre ?

Que j’y suis arrivé et c’est déjà pas mal (rires). Dès que je me suis fait opérer, je me suis mis dans la tête que je ferais tout pour me donner la chance de prendre part au Mondial. J’ai tout mis en œuvre pour y arriver, j’ai été très bien accompagné et j’y suis parvenu. J’ai réalisé mon rêve de gosse, qui était de représenter la France lors d’une Coupe du monde.

Avez-vous eu quelques moments de doute ?

Bien évidemment ! D’entrée, quand je savais qu’il ne me restait que six mois, j’étais parfois refroidi. Je me disais : « OK, tu peux revenir sur le terrain, mais pas tenir la cadence d’un match international. » Ce qui est normal. J’ai douté mais je me suis accroché.

Aviez-vous mal à un genou pendant le Mondial ?

En jouant, je n’avais pas de douleur. Au réveil, il était toujours un peu raide mais dans l’ensemble, ça allait plutôt bien. J’étais à 100 %, je n’avais pas de protocole spécifique par rapport aux autres joueurs.

Après une blessure comme celle-ci, est-ce que le plus dur est de reprendre confiance en son corps ?

Pas du tout. J’ai toujours fait confiance aux médecins qui m’ont accompagné. On m’a simplement expliqué qu’à six mois, j’avais un taux de pourcentage élevé de chances de me refaire les croisés. J’étais conscient de ce risque mais si ça doit péter une nouvelle fois, ça pétera. Le risque zéro n’existe pas, il faut vivre avec.

Avez-vous la crainte de subir une grosse baisse de régime durant cette saison après plusieurs mois de sprint pour participer au Mondial ?

J’ai eu trois semaines de vacances, j’en ai bien profité. J’avais vraiment besoin de couper mais au bout de troisjours, la balle ovale me manquait. Donc, honnêtement, je n’ai pas du tout peur d’avoir le contrecoup de cette période de travail intense. Aujourd’hui, j’ai simplement faim de rugby. Je veux jouer avec Toulouse en Top 14 et passer mes semaines sur un terrain. C’est facilement compréhensible.

Qu’avez-vous fait pendant cette période de repos ?

Je suis allé à la chasse à la palombe avec mes potes dans le Gers. Mon père a construit une palombière durant ma période de convalescence. J’ai pu en profiter pendant mon repos. Ça m’a fait énormément de bien.

Comment avez-vous retrouvé vos proches. Étaient-ils plus touchés quevous ?

Oui, comme toujours. Lors de ma blessure, ils étaient plus tristes que moi. De mon côté, j’ai cette faculté à rapidement passer à autre chose. Ils étaient déçus pour moi, ce que je comprends.

Dans quel état d’esprit êtes-vous revenu au sein du Stade toulousain ?

J’étais simplement heureux. Avec ma blessure, cela faisait neuf mois que je n’avais pas porté le maillot de Toulouse. Je ne m’attendais pas à être titulaire dès mon premier match contre Perpignan mais je l’ai été, tant mieux. Ugo (Mola N.D.L.R.) a peut-être trouvé que j’étais bien revenu de vacances donc il a directement voulu me lancer.

Vous avez manqué la fin de saison dernière. Est-ce qu’on se considère tout de même champion de France à 100 % quand on vit la phase finale en tribunes ?

Je pense que j’ai tout de même participé à l’aventure. J’ai joué des matchs en début de saison et je suis resté au contact du groupe lors des matchs à gros enjeu donc oui je me considère comme champion. Je ne sais pas ce qui est le plus dur à accepter entre être hors groupe par décision du coach ou être à l’infirmerie. Après, je concède que ça n’a pas le même goût que lorsque tu es titulaire en finale. Mon objectif est de gagner cette saison en étant sur le pré.

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Les commentaires (3)
moijeu Il y a 5 mois Le 20/11/2023 à 15:31

Très très très Grand Monsieur! Voilà qui peut réconcilier avec le rugby , le vrai, par celui des charlatans!

Eusebius Il y a 5 mois Le 20/11/2023 à 07:31

Illustration magistrale d'un bon sens terrien en tout point solide au service d'une force qui ne se préoccupe que de l'essentiel : avancer.

Ninja31 Il y a 5 mois Le 20/11/2023 à 19:40

Exactement. Ça fait du bien de lire une interview comme celle-ci.