Abonnés

Finale Coupe du monde de rugby - Nouvelle-Zélande - Afrique du Sud : une bataille entre chiens et loups

Par Marc DUZAN
  • Les All Blacks et les Springboks vont se livrer une bataille acharnée.
    Les All Blacks et les Springboks vont se livrer une bataille acharnée. ActionPlus / Icon Sport - ActionPlus / Icon Sport
Publié le
Partager :

Si la sortie de route du XV de France a largement emplâtré l’intérêt du pays pour la Coupe du monde, cette finale entre les deux plus grandes nations du rugby s’annonce pourtant acharnée, indécise voire inoubliable. Ladies and gentlemen, faîtes vos jeux…

Il paraît que cette Coupe du monde s’est arrêtée à la seconde où l’Irlande et la France ont quitté la compétition. Il paraît que le récent week-end de demi-finales n’a pas franchement donné tort à cette odieuse vacherie. Il semble même que plusieurs Tricolores et une poignée de Diables Verts aient carrément choisi de boycotter les derniers rounds de ce Mondial parce que "voilà quoi, le cœur n’y est plus". Mais alors, qu’est donc le rugby pour ces hommes-là ? Une passion, une maîtresse ou un simple gagne-pain, pour qu’ils puissent s’en passer sans en souffrir ou qu’ils soient capables de mener leur vie sans prêter nulle attention au plus grand match de l’année ? Parce que c’est bien de ça dont il s’agit, n’est-ce pas ? De l’apothéose de quatre saisons d’enfer et de huit semaines de compétition. Du choc entre les deux meilleures équipes de ce tournoi. D’une guerre des mondes que l’on ne saurait mépriser d’un haussement d’épaules.

Car au bout de ce que l’on considère comme le sublime affrontement entre deux équipes capables de dérouler un rugby total, homérique, comme de le réduire à sa plus simple expression, il y aura ainsi un quatrième titre de champion du monde pour l’une ou l’autre d’entre elles quand on désespère, dans tout l’hémisphère Nord, de n’en avoir jamais accroché qu’un seul en près de quarante ans. Il y aura l’incarnation d’une vérité, aussi, celle qui voudrait que l’on joue toujours mieux au rugby de l’autre côté du monde, ou alors qu’on y sait mieux qu’ici se préparer à la seule compétition qui vaille vraiment la peine, aux yeux du grand public…

Leurs prénoms sont des déclarations de guerre…

Une finale de Coupe du monde ne compte donc par essence ni favori ni outsider et de facto, tout ce qu’il s’est produit avant ce 28 octobre n’a plus le moindre sens, aujourd’hui. Par "tout ce qu’il s’est produit", on entend l’étourdissante victoire des All Blacks survenue à l’Eden Park dans le Rugby Championship (35-20) ou l’épatant succès des Springboks (35-7) accompli un mois plus tard, à Twickenham. On entend aussi que dans les faits, la Nouvelle-Zélande compte au fil de ces deux siècles de rugby 33 victoires sur l’Afrique du Sud, soit 7 de plus que son rival historique. La belle affaire… À Pretoria comme à Johannesburg, on est en effet loin de succomber au charme néo-zélandais et au pire, on traitera demain d’égal à égal avec, en tête, le chant martial que se plaît à fredonner en langue Xhosa Siya Kolisi dans le tunnel des vestiaires : "Ce sont les Springboks ! Ceux qui les connaissent ne les ont jamais vus comme ça !" Les Springboks, bonne mère… Peut-on d’ailleurs imaginer pseudonyme plus cynique ? Et depuis quand Faf, Ox, Cobus ou RG, dont les seuls patronymes sont des déclarations de guerre, ressemblent-ils à cet animal gracile ne mangeant que de l’herbe et qui meurt d’une seule flèche ? Springboks, nom de nom ! Et pourquoi pas "bébés phoques", "poules naines" ou "pandas roux", tant qu’on y est ?

C’est qu’avant que les All Blacks ne redeviennent méchamment compacts et malveillants dans le combat, avant que les Tout Noir ne ressortent enfin du formol ce monstrueux pilier droit qu’est Tyrel Lomax (1,92 m et 127 kg) ou de son caisson de cryogénisation l’ogre de contes que demeure Sam Whitelock, on s’était persuadé que les Gargantua de sang Boer ne feraient qu’une bouchée de tous ceux croisant tôt ou tard leur chemin, sous le ciel de France. Samedi soir, il n’en sera évidemment rien et à ce sujet, on fait de ce que disait Ronan O’Gara l’autre soir, à la télé irlandaise, un postulat non négociable : "Les grands matchs sont remportés par les numéros allant du 1 au 10". Entendez par là que si la Nouvelle-Zélande a récemment relancé depuis l’en-but et chanté la Madelon contre ces Pumas à bout de souffle et à court de talent, la finale de la Coupe du monde se décidera évidemment dans ce délinéament de dix mètres où sourdra la querelle, perlera le sang et fumeront les naseaux. Comme bien souvent dans les grands matchs, le jeu se repliera sans nul doute sur les vieux fondements de nos pères, ceux du mauling, du rucking, du tackling ou du kicking comme s’ils étaient le comble de la modernité, la fierté du professionnalisme. Et franchement, on serait même quelques-uns à trouver ça réconfortant tant ce serait la preuve que le jeu est encore ce que les joueurs veulent bien qu’il soit, d’abord un combat collectif, non une chorégraphie à l’usage de la société du spectacle et de marchands de soupe faisant mine d’oublier qu’il a toujours existé mille et une façons de remporter un match de rugby…

On se fout donc bien de savoir si cette dixième finale de Coupe du monde se jouera sur un cad’deb’de Kurt-Lee Arendse, un saut périlleux de Will Jordan, un maul sud-africain de trente mètres, un caramel de Scott Barrett ou un coup de rein d’Ox Nché en mêlée fermée. On attend plus volontiers d’elle qu’elle soit acharnée, indécise, intense et au bout du bout conclue par l’intervention d’un deus ex machina vêtu de vert ou de noir, peu m’en chaut. Car les gesticulations d’avant-match opérées par les uns et les autres, ces précautions oratoires lancées ici par Handré Pollard ("Les All Blacks sont explosifs et punissent leurs adversaires") ou là par le sélectionneur kiwi Ian Foster ("Les Springboks savent se battre"), ont juste l’importance qu’on veut bien leur donner…

Et d’évidence, c’est un autre pan de notre histoire qui s’écrira samedi soir. C’est même ce fier morceau de rugby qui sonnera le glas d’une compétition qui, putain sublime, persiste à rejeter nos avances, prodigieux tournoi que beaucoup d’entre nous ne reverront probablement plus jamais se produire, en ce doux pays. Qu’en conclure, peuchère ? Que cette fois-ci, peut-être, All Blacks et Springboks seront enfin sur un pied d’égalité. Et contrairement à cet an de grâce 1995 où les Tout Noir de Jonah Lomu, empoisonnés par une serveuse d’hôtel que la légende baptisa d’autorité Suzie, rendaient encore tripes et boyaux à une heure du coup d’envoi, la Nouvelle-Zélande et l’Afrique du Sud démarreront samedi soir le sprint final épaule contre épaule. Aussi, que la fête soit belle, big boys… Vous nous devez bien ça, après tout…

Vous êtes hors-jeu !

Cet article est réservé aux abonnés.

Profitez de notre offre pour lire la suite.

Abonnement SANS ENGAGEMENT à partir de

0,99€ le premier mois

Je m'abonne
Voir les commentaires
Réagir
Vous avez droit à 3 commentaires par jour. Pour contribuer en illimité, abonnez vous. S'abonner

Souhaitez-vous recevoir une notification lors de la réponse d’un(e) internaute à votre commentaire ?

Les commentaires (1)
Lauragais Il y a 6 mois Le 26/10/2023 à 18:24

Vous dites n'importe quoi : les 2 plus grands matchs de l'année sont et resteront la finale du Top 14 et de la Champions Cup car ils n'ont rien à voir avec ce tournoi mondial truqué !
World Rugby voulait ces deux pays en finale ("2 équipes pour un 4° titre") et Bok a très bien appliqué les consignes de ses maîtres.

Que vous baissiez votre culotte pour vous faire mettre cela vous regarde, mais cela n'est et ne sera jamais le cas d'une (grande ?) partie d'entre nous .