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Coupe du monde de rugby 2023 - La Nouvelle-Zélande impitoyable face à l'Argentine retrouve la finale du Mondial, huit ans après

Par Nicolas AUGOT
  • Les All Blacks ont été étincelants face à l'Argentine.
    Les All Blacks ont été étincelants face à l'Argentine. Patrick Derewiany
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Les All Blacks ont gagné sans forcer leur billet pour la cinquième finale de coupe du monde de leur histoire, en dix éditions. Ils ont encore réalisé une démonstration face à des argentins très rapidement dépassés.

Toute l’Argentine levait les yeux vers le ciel en ce vendredi soir, espérant trouver dans ce gris bien accroché et cette pluie fine intermittente une alliée de poids. Il fallait tout aux Pumas, qui n’ont jamais disputé une finale de Coupe du monde, pour tenter d’embrouiller des Néo-Zélandais en quête d’une cinquième finale et d’un quatrième titre mondial. Les Argentins, passion chevillée au corps, voulaient y croire, refusant de penser que les All Blacks venaient au Stade de France pour donner l’extrême-onction que beaucoup annoncée rapide.

Les Pumas se sont lancés dans la bataille avec fierté, avec l’adrénaline de l’hymne venant encore taper dans les veines, portant le ballon sur quatorze temps de jeu et s’approchant de l’en-but de la Nouvelle-Zélande dès les premières minutes. C’était un leurre de dix minutes. Les Italiens étaient déjà tombés dans ce piège à Lyon lors de la phase de poule, avant d’être piétinés et ridiculisés. Ce vendredi, en demi-finale, les All Blacks ont répété ce scénario, celui qui ne laisse aucune chance à leurs adversaires, légèrement grisés par cette sensation d’avoir tenu le ballon face aux meilleurs joueurs du monde. Dix minutes avant que les Blacks ne sifflent la fin de la récréation et tant pis pour les jeunes supporters des Pumas qui avaient eu la permission de quitter l’école plus tôt pour regarder cette demi-finale qu’ils espéraient historique. Ils allaient assister à une boucherie, sans aucun passage censuré ni image floutée. Il faut espérer que certains se soient cachés les yeux pour éviter quelques cauchemars et de se réveiller en sueur en pensant à Will Jordan inscrivant trois essais sans forcer, seul sur son lopin de terre, ce couloir des cinq mètres dont il ne sort quasiment jamais mais où il voyage en solitaire, ne croisant aucun argentin ce vendredi au Stade de France et portant son total d’essai à huit dans cette compétition.

Un pack surpuissant

Les courses diaboliques de Mark Tele’a, félin inarrêtable, la puissance de Jordie Barrett, les feintes de passe incessantes de Richie Mo’unga et d’Aaron Smith pour transformer les guerriers argentins en danseuses ridicules seront la source de nombreux réveils nocturnes pendant de longues années, certains se demandant comment il a été possible d’assister à un tel carnage en demi-finale de Coupe du monde avec sept essais à la clé. La réponse vient de la supériorité des avants néo-zélandais, tellement faciles, que Shannon Frizell franchissait la ligne d’essai en marchant. Et que dire de l’inusable Sam Whitelock, de la virtuosité d’Ardie Savea, de l’abattage de Sam Cane, des grands coups d’épaule de Scott Barrett, de cette première ligne si compacte sur les phases statiques et si agile pour offrir des relais incisifs dans le jeu courant. Ce paquet d’avants, qui avait pourtant montré quelques faiblesses lors du dernier match de préparation face à l’Afrique du Sud puis face à la France, est redevenue une arme de destruction massive face à l’Irlande et face à l’Argentine.

"On a pris l’habitude d’ignorer les critiques et de nous concentrer sur notre groupe, a simplement expliqué le capitaine Sam Cane. On ne pense qu’à ce qu’on fait, on fait confiance au staff et on croit en notre plan de jeu. Tous les joueurs sont en forme, on a récupéré nos blessés, donc je suis content." Une supériorité écœurante pour le pilier argentin Francisco Gómez Kodela, reconnaissant que les Argentins s’étaient trouvés sans solution, ne pouvant se hisser à un niveau d’intensité qui aurait pu contrarier les All Blacks : "En mêlée, ils étaient clairement au-dessus mais aussi dans le jeu au sol. Il était impossible de leur gratter le moindre ballon et ils sont parvenus à nous mettre une énorme pression sur nos rucks."

Quarante minutes d’entraînement

Dès la pause, il était déjà acquis que la Nouvelle-Zélande disputerait sa cinquième finale de Coupe du monde, en dix éditions, une semaine plus tard au Stade de France, elle qui avait été meurtrie par sa défaite face à l’Angleterre en demi-finale quatre ans plus tôt au Japon (7-19). Les quarante dernières minutes n’étaient plus qu’un entraînement, une répétition à intensité modéré, entre un quart de finale déjà entré dans la légende et une dernière confrontation qui s’annonce féroce face à l’Afrique du Sud pour une revanche tant attendue de la finale 1995, la seule perdue par des All Blacks amoindris, victimes d’un étrange virus la veille du match. Le sélectionneur Ian Foster décidait même de finir la rencontre en infériorité numérique, ordonnant à Scott Barrett de ne pas revenir en jeu à la fin de sa suspension temporaire. Les Italiens, devenus aussi de simples pantins à Lyon, avaient aussi eu droit à une telle humiliation avec la sortie Brodie Retallick, rappelé sur le banc bien avant le coup de sifflet sans pour autant être remplacé. Les Italiens en avaient profité pour inscrire un essai. Les Argentins n’ont même pas caressé cet espoir de sauver l’honneur. Les cœurs saignaient depuis bien trop longtemps et leur courage s’était englué dans cette marée noire.

Cette demi-finale était devenue trop facile pour les All Blacks, même si Ian Foster et ses joueurs ont usé de diplomatie pour se féliciter de leur qualification sans retourner le couteau dans la plaie argentine, à l’image d’Ardie Savea : "Je ne dirais pas que c’était facile. Les Argentins nous ont pas mal mis sous pression en début de match. Je suis fier de l’équipe, de notre calme et de notre patience. On voulait vraiment rivaliser devant et on a été forts en conquête. Tout n’est pas parfait. On doit encore progresser dans pas mal de domaines. On a confiance en cette équipe, peu importe ce qu’on dit de nous. On sait de quoi on est capable. Je suis heureux de notre niveau actuellement. On a été pas mal sous pression dernièrement mais on a cru en nous et en notre jeu. C’est ce qui nous a permis d’en arriver là. On n’a rien à prouver à personne." Et pourtant, cette équipe semble animée par ce sentiment de revanche. Présentée comme la plus mauvaise de l’histoire en Nouvelle-Zélande et rétrogradée aux yeux des bookmakers à un rang de potentiel outsider avant le début de la compétition, elle est aujourd’hui plus forte que jamais, sûre de son plan, entre férocité et plaisir. "C’est un rêve d’être encore là, d’attendre la finale et d’avoir une chance de gagner la compétition, se réjouissait Aaron Smith, Face à la France, nous n’avions pas été assez bons. Mais on savait que la Coupe du monde ne se jouait pas là. Ce n’était que le premier match et l’important, c’était la qualification pour les quarts de finale. On l’a vu par le passé, certains vainqueurs ont perdu en phase de poule. Il fallait juste se qualifier. Ce soir, je suis heureux." Les All Blacks sont définitivement les rois du leurre.

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