Coupe du monde de rugby 2023 / XV de France - L’éternel retour du Grand Charles Ollivon

Les images en ont amusé certains, agacés d’autres. Reste qu’au-delà d’un humour discutable, la conférence de presse délivrée par Fabien Galthié et Charles Ollivon à l’issue du France-Namibie de jeudi dernier a eu au moins un mérite : celui d’afficher une vraie complicité entre le sélectionneur et celui qui fut son capitaine en début de mandat. Hasard ? Pas vraiment. Parce que le Toulonnais n’aurait peut-être pas perdu son sceptre sans cette rupture des ligaments croisés au moins de juin 2021 qui lui fit manquer la tournée en Australie, la tournée de novembre suivante et le Grand Chelem 2022. Et surtout parce que Fabien Galthié nourrit une franche estime pour celui qui symbolisait à ses yeux, au début de son mandat, la volonté farouche de revenir des abysses, à l’image du destin que le sélectionneur rêvait pour son équipe de France. Donné perdu pour le rugby à seulement 25 ans après une rechute d’une fracture de l’omoplate en 2018 (blessure qui n’est ordinairement l’apanage que des graves accidentés de la route), Ollivon ne s’est en effet jamais résolu au pire. "Des chirurgiens très reconnus m’ont dit que c’était terminé, expliquait Ollivon dans nos colonnes à l’époque. Et j’ai fini par trouver un chirurgien à Muret, près de Toulouse, qui s’appelle Yves Bellumore…"

Un record d’essais tout sauf anecdotique

Un praticien devenu un proche qui nous avait fait, en 2020, l’honneur de se confier au sujet de sa rencontre avec Charles Ollivon. "Ce qui m’a frappé avec Charles, ça a été sa manière de jouer franc jeu avec moi, à poser les bonnes questions, se souvenait Bellumore. Au-delà de sa pathologie qui était rarissime, c’est l’homme qui m’a intéressé." Un personnage rude, nietzschéen, et déterminé à tout tenter pour revenir, inspirant au passage de nombreux partenaires ces derniers mois comme Anthony Jelonch, Cyril Baille, Julien Marchand, Paul Willemse et pourquoi pas Antoine Dupont. "Pour incarner cet état d’esprit, Fabien Galthié ne pouvait trouver mieux, soufflait le docteur Bellumore. Charles, c’est quelqu’un à qui on a expliqué que tout était fini, mais qui a décidé que non, et s’est battu pour aller au bout de son intime conviction. Il s’est pris des claques dans la gueule mais il n’a jamais lâché. Avec lui, on touche à une personnalité très particulière : à quelques générations d’intervalle, il me rappelle un peu Daniel Herrero. Parce qu’il joue comme lui à Toulon, mais surtout parce qu’il a cette capacité rare d’aller là où ça fait mal et surtout, de toujours revenir." Ainsi parlait Zarathoustra : "Comment, était-ce là la vie ? Allons ! Recommençons encore une fois." À ce titre, la légère alerte à un mollet connue ce lundi peut d’ores et déjà être considérée comme une peccadille, et l’ultime preuve qu’il en faudra bien plus pour abattre un Charles Ollivon au sommet de son art, lui qui vient tout juste de chiper à Olivier Magne le record d’essais marqués par un avant sous le maillot bleu (15). Signe qu’au-delà de son leadership, c’est surtout de par ses incroyables qualités de joueur qu’Ollivon s’avère aujourd’hui indispensable au XV de France, dont le sens du jeu, les qualités athlétiques et le toucher de balle rare (hérité de son passé de pelotari à main nue) font plus que jamais de lui le parfait maillon entre les avants et les trois-quarts.