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Coupe du monde de rugby 2023 / XV de France - Blessure d'Antoine Dupont : du choc à l'espoir après l'opération, récit d'une fin de semaine hors du temps

Par Rugbyrama
  • Blessé contre la Namibie, Antoine Dupont a lancé son contre-la-montre pour revenir aider son équipe.
    Blessé contre la Namibie, Antoine Dupont a lancé son contre-la-montre pour revenir aider son équipe. Icon Sport
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Blessé face à la Namibie jeudi soir à Marseille, le capitaine du XV de France a subi à peine 24 heures plus tard à toulouse, des mains du professeur Lauwers, la pose d’une plaque pour réparer sa fracture maxillo-zygomatique. Parce que le spectacle devait continuer, coûte que coûte... récit d’une fin de semaine hors du temps, oscillant du pur cauchemar à la renaissance de l’espoir...

C’est une histoire qui a commencé 22 h 06 jeudi dernier, soit à la 45e minute de ce France-Namibie record, d’ores et déjà passé à la postérité sans qu’on sache encore s’il devra rester de sinistre mémoire. Parce que c’est évidemment à c’est instant précis qu’une partie de la Coupe du monde des Bleus a basculé, lorsque le crâne du capitaine des Welwitschias Johan Deysel heurta violemment le visage de son homologue tricolore Antoine Dupont. Une intervention illégale qui annula dans la foulée un essai namibien consécutif à une passe interceptée de Jalibert, et valut à son auteur un carton rouge indiscutable, qui aurait d’ailleurs largement pu se passer de l’intervention du bunker. Sauf que l’essentiel était évidemment bien ailleurs… Mais dans les attitudes du demi de mêlée du XV de France qui, en direct, ne présageaient rien de bon. Un genou à terre, Antoine Dupont avait en effet très vite réclamé l’intervention du staff médical, portant illico la main sur sa pommette droite, avant de quitter le terrain le regard noir. Rapidement rejoint par son président en club Didier Lacroix, Dupont a carrément fondu en larmes dans les vestiaires du stade Vélodrome. Parce que la douleur, intense, et la formation d’un énorme hématome ne laissaient guère place au doute. « Il nous a dit qu’il sentait carrément un creux au niveau de sa pommette, nous a confié plus tard dans la soirée un membre de son cercle proche. Évidemment que ça pue très fort… » C’est ainsi que très rapidement, dans les travées de l’enceinte phocéenne, la forte suspicion de fracture au niveau du plancher orbitaire commença à transpirer, que seuls des examens médicaux pouvaient permettre de définitivement confirmer. Alors qu’une ambulance l’attendait à la sortie du stade, Antoine Dupont a toutefois dû patienter jusqu’au coup de sifflet final du match pour partir en urgence et sous escorte vers l’hôpital privé de Provence (HPP), accompagné par le médecin du XV de France Philippe Turbin et plusieurs de ses proches, dont son frère Clément ou encore sa compagne.

Nuit d’angoisse à Aix-en-Provence


Commença alors la longue attente… Particulièrement bien entouré (notamment par son président Didier Lacroix), le joueur a pu se soumettre aux imageries nécessaires pour définir la gravité de la blessure. Aux alentours de 23 h 30, Fabien Galthié annonçait en conférence de presse «une suspicion de fissure ou de fracture sur le maxillaire», confirmant au grand public les prévisions qui circulaient. Peu après minuit, alors que ses partenaires se présentaient en zone mixte du côté du stade Vélodrome où ils faisaient part de leur sentiment mitigé sur la soirée, Dupont attendait ses résultats, sans appel: fracture maxillo-zygomatique. Un immense coup dur pour lui et pour les Bleus qui, après avoir perdu Romain Ntamack cet été, devaient se résoudre à l’idée d’avancer sans leur autre homme fort de la charnière, capitaine de l’équipe et meilleur joueur de la planète. La question qui se posait alors consistant tout simplement à savoir pour combien de temps. Une question pour laquelle le sélectionneur Fabien Galthié, venu à son chevet dans la nuit, commençait à ce moment à envisager le pire…
Dans cette optique? La première préconisation des professionnels de santé consista d’abord à attendre l’évolution de l’hématome, et surtout de lui permettre de se résorber. C’est pourquoi Antoine Dupont passa sa première nuit post-blessure au HPP d’Aix-en-Provence, où les premiers soins lui ont été administrés dans ce sens. Une décision arrêtée aux environs d’une heure du matin, ainsi qu’en témoigna le départ des deux motos ayant escorté le demi de mêlée jusqu’à l’hôpital. Peu après, aux alentours d’1 h 15, le bus du XV de France déposait les joueurs à l’hôtel Renaissance, leur lieu de résidence aixois, accueillis par une cinquantaine de supporters vers lesquels, pour la première fois depuis le début de la compétition, les Bleus ne se sont pas présentés. Parce que l’émoi était réel, à l’image de nombreux joueurs toulousains aperçus en train de faire les cent pas dans le hall de leur hôtel en espérant recevoir des nouvelles plus réjouissantes, où d’un Didier Lacroix qui dut négocier près d’un quart d’heure pour récupérer une chambre, afin de rester au plus près de ses hommes. Au même instant, les proches d’Antoine Dupont ont à leur tour quitté le centre hospitalier, à l’exception de sa compagne restée à ses côtés. C’est ainsi que, malgré la poignée d’heures restantes avant le lever du soleil, la nuit du 21 fut longue, du côté d’Aix-en-Provence…

Entrée dans la boucle du staff médical toulousain


Pourtant, dès le vendredi matin, quelques nuages de fumée blanche apparurent. Parce qu’Antoine Dupont avait tenu à quitter le plus tôt possible l’hôpital pour être présent au petit déjeuner de ses coéquipiers. Parce que la douleur était moins vive à la grâce des antidouleur administrés mais surtout parce que, si un gros coquard lui cerclait désormais l’œil droit, Antoine Dupont ne souffrait d’aucun trouble de la vision. Parce qu’il parvenait à ouvrir la bouche en grand, avalant même un shaker de protéines et un yaourt, rassurant ceux qui craignaient le voir perdre rapidement de la masse musculaire. De quoi conforter le staff des Bleus dans son choix de se donner le week-end pour prendre une décision quant au maintien d’Antoine Dupont au sein du groupe, tandis que l’encadrement médical du XV de France décidait de recourir à l’avis complémentaire d’un spécialiste. Mais lequel? Si le sélectionneur Fabien Galthié préconisait de consulter un spécialiste parisien, Antoine Dupont préféra se fier à son instinct et au staff médical du Stade toulousain, rapidement mis dans la boucle par le biais d’une visioconférence entre Philippe Turblin et Philippe Izard, docteur du Stade. Ainsi guidé, le choix de Dupont se porta sur le professeur Frédéric Lauwers, chirurgien spécialiste en traumatologie maxillo-faciale du CHU de Toulouse (connu pour avoir déjà opéré Romain Ntamack après la double fracture du maxillaire qu’il avait subie le 28 décembre 2020, après une collision avec le Bordelais UJ Seuteni), lequel fut directement contacté par Didier Lacroix. Et si cela peut paraître inconcevable aux yeux du commun des mortels (et inimaginable, pour tout dire, dans le cadre d’une Coupe du monde de foot…), c’est bien sans accompagnement d’un membre du staff tricolore, conduit par sa seule compagne, qu’Antoine Dupont effectua dans la journée de vendredi le trajet d’Aix-en-Provence à Toulouse. Voyage beaucoup plus «galère» que prévu, d’ailleurs…

Arrivée à Purpan vendredi soir, opération vers minuit


Originellement attendu aux environs de 18 heures, Antoine Dupont est finalement arrivé légèrement en retard au CHU de Purpan pour un premier rendez-vous avec le professeur Nicolas Sans, pour passer un scanner 3D et une IRM. De nouvelles images indispensables pour le rendez-vous qui suivit avec le professeur Lauwers, aux alentours de 21 h 30. C’est ici que tout s’accéléra, à une allure qui surprit même certains médecins expérimenté. Immédiatement après la décision par Dupont et son chirurgien d’une opération immédiate et de la pose d’une plaque (l’autre option était celle d’un crochet), celle-ci se déroula sous anesthésie générale peu avant minuit, avec une sortie du bloc aux environs de 2 heures du matin. Un acte chirurgical qui s’est effectué sans encombres, à en croire le mail communiqué 7 heures plus tard par la FFR. «À la suite de sa blessure contractée lors du match France-Namibie, Antoine Dupont a été opéré le 22 septembre au CHU Purpan de Toulouse, disait sobrement le communiqué fédéral. D’ici quelques jours, il va ainsi pouvoir revenir au sein de l’équipe de France dans un processus de reprise sportive progressive et sous contrôle médical.»

Dupont, un cas sensible depuis la Coupe du monde 2019


Ainsi, le Mondial de Dupont «n’est pas terminé», comme l’espérait vendredi matin l’entraîneur de l’attaque Laurent Labit lors de son débriefing d’après-match. Car si Dupont demeure évidemment forfait pour l’ultime match de poule contre l’Italie le 6 octobre à Lyon, le quart de finale du 15 octobre semble bel et bien dans ses cordes… Inédit? Même pas. En 2018, le centre des Saracens Brad Barritt avait ainsi disputé un quart de finale de Champions Cup une semaine après s’être fait poser une plaque en titane pour une blessure similaire. «Tous les fans de rugby du monde entier ont hâte de voir le maestro Antoine Dupont de retour à la Coupe du monde, écrivait ce dernier sur X (ex-Twitter) vendredi. N’ayez crainte dans le monde du rugby: quand on veut, on peut!» Certes. Sauf que, sans vouloir jouer les pisse-froid, il ne s’agira pas non plus de faire tout et n’importe quoi, tant « le cas Dupont » demeure sensible. Parce qu’il est l’emblème de cette Coupe du monde, que la sécurité des joueurs est devenu un enjeu majeur, et surtout parce qu’Antoine Dupont a déjà disputé en 2019 un quart de finale malgré une vertèbre fracturée, que les radios passées au Japon n’avaient pas décelées, et lui avaient valu deux mois d’arrêt à son retour en France… Un épisode qui avait à l’époque considérablement refroidi les relations entre le staff du XV de France et du Stade toulousain, qu’il s’agit plus que jamais de préserver… «L’équipe de France doit se préparer à jouer sans Antoine pendant un certain temps, prévenait le président toulousain Didier Lacroix dans l’émission ViàMidol la quotidienne, légitimement inquiet de l’état de santé de son joyau. Nous, les dirigeants, devons prendre du recul pour prendre les bonnes décisions avec le plus de sérénité possible.» Alors, prudence… Même si celle-ci n’empêche pas d’entretenir l’espoir. La meilleure des nouvelles fut ainsi apportée par Antoine Dupont lui-même sur ses réseaux sociaux, une douzaine d’heures à peine après son opération. «Touché mais pas coulé. The Show must go on *. Hâte de retrouver le groupe.» Trois phrases qui ne laissent pas vraiment de doute quant aux intentions du capitaine des Bleus, plus déterminé que jamais à mener le rugby français à son premier sacre mondial. Barjot? Sans doute un brin. Reste que le jeu en vaut probablement la chandelle, pour Dupont autant que son pour équipe. Car si la mission ne serait pas impossible sans lui, elle le semblerait beaucoup moins avec…

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Les commentaires (1)
CasimirLeYeti Il y a 7 mois Le 26/09/2023 à 16:52

La double fracture du maxillaire qu'avait subie, Romain Ntamack le 28 décembre 2020, ce n'était pas après une collision avec le Bordelais UJ Seuteni, mais avec Pablo UBERTI, ancien camarade en France moins de 21 !
J'espère que l'intérêt supérieur ne passera pas avant l'intérêt du joueur,
je souhaite que la raison d'état ne passe pas avant la raison..