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XV de France - Portrait de Damian Penaud, la douce folie d’un marqueur en série

Par Clément Labonne
  • Avec 27 essais à son actif en équipe de France, Damian Penaud est à seulement onze essais du record français. à seulement 26 ans, l’idée de le voir détrôner, un jour, le grand Serge Blanco est désormais plus qu’une hypothèse...
    Avec 27 essais à son actif en équipe de France, Damian Penaud est à seulement onze essais du record français. à seulement 26 ans, l’idée de le voir détrôner, un jour, le grand Serge Blanco est désormais plus qu’une hypothèse... Photo Midi Olympique – Patrick Derewiany
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Avec vingt-sept essais en sélection, Damian Penaud se rapproche du record de Serge Blanco. Retour sur l’évolution d’un centre nonchalant à un ailier redoutable.

Un félin, une espèce rare, un fou du rugby. En marquant son 27e essai en 43 sélections, face à l’Écosse, Damian Penaud a une nouvelle fois rappelé au rugby français que sa seule limite serait le record de Serge Blanco, et ses trente-huit réalisations. À la manière d’un attaquant de football affamé de buts et d’occasions de marquer, Damian Penaud est aujourd’hui le chasseur d’essais numéro 1 du XV de France. Et sans aucune contestation possible. Depuis l’arrivée de Fabien Galthié au poste de sélectionneur des Bleus, le néo-Bordelais affole les compteurs. Avec vingt-deux essais en vingt-cinq rencontres, l’ailier français a un ratio de 0,88 essai par match. Personne ne fait mieux sur la scène internationale en autant de rencontres.

Son profil physique unique, ses coéquipiers étoilés et sa faim immodérée d’espaces expliquent l’inexplicable, selon Vincent Clerc. "Damian Penaud fait partie de la race des ailiers athlétiques et puissants comme pouvait l’être Aurélien Rougerie. À l’instar de "Roro", il est par sa taille peut-être moins explosif que certains ailiers plus petits, mais il a cette faculté à casser les plaquages par sa puissance. C’est une sorte de sprinter finalement. Dès qu’il est en difficulté, il a cette singularité de constamment rechercher le centre du terrain pour reprendre de la vitesse et faire des courses arrondies. Pour la plupart des joueurs, c’est une prise de risque énorme mais lui, il arrive régulièrement à éviter des plaquages face à des avants. Il ne faut pas non plus oublier qu’il a un très bon jeu au pied pour lui-même. Il a cette faculté à être très bon dans les couloirs. Quand on est ailier, on est très dépendant des autres. Damian est un très bon finisseur mais il est à côté des joueurs exceptionnels et un système offensif parfaitement huilé. Les combinaisons en première main sont très bien rodées, les jeux au pied de Ntamack ou Jalibert sont également précis… Un ailier est dépendant du rendement offensif de son équipe et en équipe de France, il sait bonifier ces très bons ballons distillés par ses coéquipiers." Indétrônable sur l’aile française, Damian Penaud a surtout profité d’une rude formation par ses anciens coéquipiers clermontois.

Aurélien, le grand frère

Lorsque Penaud fait ses débuts en professionnel, le fils d’Alain n’est encore qu’un feu follet. Face à Agen, le 16 avril 2016, le Briviste de naissance débute sa carrière dans l’anonymat le plus complet. Aux côtés d’Aurélien Rougerie, Wesley Fofana ou Jonathan Davies, Damian Penaud déboule dans un vestiaire étoilé. Il est encore loin d’être l’insatiable finisseur d’aujourd’hui. Pour son bien, "Roro" est d’ailleurs très dur avec le jeune prodige corrézien. Par son attitude dilettante, Penaud fait enrager le légendaire capitaine clermontois qui voit pourtant ce grand profil arriver à toute vitesse, pour s’installer dans la ligne d’attaque auvergnate.

Icône du club jaune et bleu (2009-2022), Morgan Parra a également tout vu de l’éclosion du phénomène. Comment il a grandi, mûri. Comment il s’est épaissi, aussi. "C’est quelqu’un que j’ai vu énormément évoluer. Quand il était jeune, il se foutait absolument de tout. Petit à petit, il a été encadré par Aurélien Rougerie notamment, et les autres cadres de l’ASM. On a essayé de l’aiguiller dans la bonne direction. C’est un joueur exceptionnel d’un point de vue athlétique. Il pue le rugby, il est l’un des meilleurs ailiers du monde. J’adore la folie qu’il a sur le terrain et en dehors. Les gens ne le perçoivent peut-être pas, mais Damian est quelqu’un de très attachant, avec qui on prend plaisir à discuter." Conscient des efforts colossaux à fournir pour s’imposer dans une équipe clermontoise dorée, Damian Penaud gagne en explosivité et sait trouver les bons espaces.

Fabien Pelous, manager des Bleuets entre 2012 et 2015, se souvient d’un garçon aussi nonchalant que talentueux. "Il était dans la veine de ce qu’il fait aujourd’hui. Il était assez imprévisible par rapport à ses adversaires… et à ses coéquipiers (rires). Damian n’était pas dans le cadre, dans le sens où il trouvait des solutions que même l’équipe n’avait pas imaginées. Humainement, il n’était pas tout à fait mature dans ses façons d’aborder les matchs mais c’est normal à 20 ans. Ses qualités individuelles et créatives ont finalement fait la différence. Il était vraiment déstabilisant." Le 18 février 2017, telle une passation de pouvoir, le gamin perce la défense de Bayonne et file à l’essai presque sans difficulté. Mais la nouvelle attraction jaune et bleue préfère attendre et donner le ballon de l’essai à Aurélien Rougerie. Une année 2017 synonyme de passation de pouvoir et conclue sur un bouclier de Brennus où sa présence fut capitale, dans le sacre auvergnat.

La chasse à Blanco

Mais en 2018, Franck Azéma choisit d’aligner son cheval de course à l’aile. Moins exposé en défense, Damian Penaud s’épanouit avec le numéro 14 dans le dos et des courses en travers aussi effrayantes que magiques. Son compteur d’essais commence alors à trembler. En trente et une rencontres, le Clermontois s’offre seize réalisations juste avant le Mondial. À la manière de Rougerie, Penaud étonne par ses menaces incessantes en attaque. Mais le Corrézien ne semble pas obsédé par une quête insatiable d’essais.

Malgré des ratios effrayants pour les autres nations, Damian est un épicurien du rugby plus qu’un névrosé de la ligne d’en-but. "Je ne crois pas qu’il soit obsédé par la ligne d’essai. Il aime bien sûr marquer, c’est évident pour un ailier mais ce n’est pas une fin en soi. Il n’hésite pas à faire la passe quand il faut, il est altruiste et c’est une bonne chose. Il est juste dans ses gestes et c’est ce qui fait aussi sa réussite", note Vincent Clerc, vite rejoint par son ancien coéquipier, Fabien Pelous. "Son pouvoir créatif m’avait fortement intéressé. Il était en formation avec nous et on le voyait devenir ailier dans une carrière future. Donc, de notre point de vue, chez les Bleuets, c’était intéressant de le faire jouer centre. On pouvait l’associer à un gabarit plus lourd et créer une paire complémentaire. Il ne réfléchit pas pareil que les autres sur le terrain. Marquer n’est pas une obsession vitale chez lui. Là où les autres ne voient que des défenses fermées, il arrive à trouver des failles."

Pourtant, le félin français cavale à toutes enjambées vers le record d’essais de Serge Blanco en équipe de France. Avec trente-huit réalisations, l’ancien arrière du Biarritz olympique sent le souffle du Corrézien dans son coup. À 26 ans, Penaud devra passer onze fois la ligne pour égaler le Pelé du rugby. Douze pour le doubler. Habitué des doublés en Bleu, le fils d’Alain Penaud pourrait profiter du Mondial pour se rapprocher d’une place sur le toit de l’histoire du rugby français.

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Les commentaires (2)
Captain-Rugby Il y a 6 mois Le 18/10/2023 à 14:56

Tellement bon qu'il s'échappe aux plaquages ...

CasimirLeYeti Il y a 7 mois Le 04/09/2023 à 18:23

Un de nos facteurs-X avec Antoine et je l'espère Mathieu !