Abonnés

Top 14 - Teddy Thomas (La Rochelle) : "A Dublin au coup de sifflet final, j’ai pleuré de tristesse"

  • Teddy Thomas confie qu'il n'a pas l'impression d'être champion d'Europe avec La Rochelle.
    Teddy Thomas confie qu'il n'a pas l'impression d'être champion d'Europe avec La Rochelle. Icon Sport - Icon Sport
Publié le
Partager :

Arrivé à l’été 2022 à La Rochelle, Teddy Thomas s’apprête à disputer sa deuxième saison au sein du club maritime. L’ailier international (28 sélections) espère un meilleur dénouement que lors du précédent exercice, durant lequel il a par exemple vécu les finales de Top 14 et Champions Cup depuis les tribunes.

Que retenez-vous de votre première saison à La Rochelle ?

À titre personnel, ces derniers mois ont été assez mitigés. Je n’ai pas fait les matchs que j’espérais offrir aux supporters rochelais. Mon adaptation a pris plus de temps que prévu. Il y a énormément de choses qui ont changé en un an pour moi, et pas qu’au niveau du rugby. Ce n’est absolument pas une excuse mais en tout cas, j’ai eu du mal à m’acclimater à mes débuts. Malgré une nette amélioration au printemps, je n’ai tout de même pas réussi à accrocher le train pour disputer les matchs importants en fin de saison.

Pour quelles raisons votre temps d’adaptation s’est-il rallongé ?

Mon style de vie a changé, de même pour le système d’entraînement. Ici, on pratique un rugby beaucoup plus axé sur la défense. Cela fonctionne puisque les résultats sont là mais ça a été assez compliqué. J’ai besoin d’être en confiance pour être à mon meilleur niveau. Même si le staff et mes coéquipiers ont été exceptionnels avec moi, j’ai mis du temps à assimiler ce qu’on me demandait de faire. Tout ça est désormais derrière moi. Ma première saison à La Rochelle est positive dans l’ensemble mais j’espère apporter beaucoup plus lors de l’exercice qui arrive.

Avez-vous évoqué avec des personnes du club votre déception de ne pas jouer les matchs importants ?

Bien sûr. J’étais triste d’être en tribunes pour les demies et les finales de Top 14 et de Champions Cup mais malheureusement, je me suis blessé au très mauvais moment. Je me suis déchiré les deux soléaires, un muscle entre le tendon d’Achille et le mollet. Personne n’avait entendu parler de cette blessure et c’est bien évidemment tombé sur moi. J’ai été touché aux deux jambes sur la pelouse du Vélodrome face à Toulon. Après ça, j’ai galéré pour revenir au plus vite et aider le groupe durant les phases finales. Émotionnellement, ce nouveau coup dur a été difficile à digérer, surtout quand tu vois tes coéquipiers gagner des titres sans toi. Dans mon esprit, je ne m’estime pas champion d’Europe.

Vraiment ?

À l’heure actuelle, je me dis ça. Peut-être qu’à la fin de ma carrière, je serai heureux d’avoir remporté la Champions Cup. Je n’ai pas touché le trophée et pris aucune photo avec. C’est quelque chose qui m’était impossible. Par contre, j’ai fêté le titre avec tout le monde, je n’ai pas raté ça ! (rires)

Vos coéquipiers sont-ils au courant de votre pensée ?

Je n’en ai pas parlé. Tout le monde était logiquement sur un nuage, après ce deuxième titre consécutif. Mon sentiment personnel importe peu. Je m’inflige ça tout seul. Chaque personne que je croise me signifie que je suis champion mais au fond de moi… Cela faisait très longtemps que je n’avais pas pleuré et au coup de sifflet final, je me suis mis à pleurer de tristesse. J’étais malheureux de ne pas pouvoir partager ça avec mes amis sur le terrain.

Et comment avez-vous vécu les célébrations avec les supporters ?

Je me suis mis en retrait, je n’ai pas célébré comme l’ensemble du groupe. Mais ce n’est pas du tout contre les supporters. Honnêtement, je n’avais jamais vu ça. Autant de monde pour rendre hommage à ses héros, c’était exceptionnel. Même lorsque j’étais gamin et que j’allais voir les joueurs du Biarritz olympique fêter le Brennus à la mairie, c’était complètement différent. Il y a vraiment un engouement spécial ici.

Ces moments difficiles vous ont-ils offert une motivation supplémentaire pour les prochains mois ?

Exactement ! La saison prochaine, je veux simplement prendre part à une finale, un match hyper important pour l’histoire de La Rochelle. J’ai été très heureux de faire partie de l’aventure en 2023, mon objectif est désormais de ramener un nouveau trophée aux supporters, mais avec le sentiment d’y avoir pleinement participé.

Comment vous sentez-vous physiquement ?

Franchement, je vais très bien. Mine de rien, j’ai quand même pas mal joué la saison dernière. J’ai juste été blessé à la mauvaise période. Pour l’instant, mon corps ne me fait pas souffrir, mais j’attendrai la fin de la deuxième préparation physique, celle qui se fera pendant la Coupe du monde, pour faire un point. Mes ischio-jambiers m’ont laissé tranquille l’an dernier, c’est déjà une très bonne chose. J’espère que ça continuera.

Redoutez-vous cette coupure après les trois premières journées de championnat ?

Pas vraiment, je pense qu’on va être très bien pris en charge. Cela va simplement être long et il va falloir s’accrocher pour bien se préparer car après le Mondial nous attendent de nombreux matchs, ils vont tous s’enchaîner. Il y a aura des moments difficiles où on travaillera seulement notre physique et c’est pas ce que je préfère, mais je le ferai car cela fait partie de notre métier et c’est important pour la suite.

Dans votre cas, le plus dur est-il de retrouver confiance en son corps ?

On ne pense pas aux blessures quand on entre sur le terrain. Le staff rochelais sait que j’ai des faiblesses physiques donc je suis parfois écarté de l’entraînement pour me préserver, d’une certaine manière. Ensuite, quand on joue cinq voire six matchs consécutifs, ils se mettent d’accord pour savoir à quel moment je vais être mis au repos pour ne pas trop enchaîner.

Est-ce qu’après avoir remporté deux Champions Cup et s’être incliné de manière très cruelle en finale de Top 14, le Bouclier de Brennus est LA priorité en 2024 ?

Je ne pense pas qu’il faille prioriser le championnat au détriment de la coupe d’Europe. On a tout de même la chance d’avoir un effectif qui nous permet de jouer les deux tableaux à 100 %. Quand tu gagnes la Champions Cup deux fois d’affilée, c’est impossible d’être rassasié. On veut tout rafler, c’est normal. Ensuite, il va vraiment falloir soulever ce Brennus une bonne fois pour toutes. Mais avec les moyens qui sont mis, on peut aisément y croire.

L’arrivée de Jack Nowell a amené encore un peu plus de concurrence au poste d’ailier…

Je ne vois pas vraiment ça comme un point négatif. En Top 14, il y a de la concurrence partout, il ne faut pas rêver. Et heureusement, j’ai envie de dire. Cela nous pousse à tout donner. J’ai passé quelques saisons dans les rangs du Racing 92 où il y avait quatre joueurs à chaque poste donc je suis habitué. La saison dernière, on s’est tous tirés vers le haut et il n’y a jamais eu de problème. Il n’y a aucune raison que ça change. Jack, je le connais très bien. On est de la même génération et on s’est souvent affrontés en sélection.

Peut-on considérer que vous avez le même jeu ?

Je dirais qu’il est plus complet. Il peut jouer troisième ligne, pas moi… (rires) C’est un joueur qui a été capitaine à Exeter, qui a aussi joué deux Coupes du monde. Il a plus d’expérience que moi mais je suis heureux d’apprendre à ses côtés et on attend énormément de lui. C’est ce genre de recrues qui nous permettent de jouer sur les deux tableaux.

Vous avez souvent été critiqué pour votre défense durant votre carrière, comment réagissez-vous désormais avec un peu plus d’expérience ?

Quoi que je fasse, je serai toujours critiqué. On ne peut pas faire l’unanimité. Les personnes qui ne m’apprécient pas ne m’apprécieront jamais. Je remercie celles qui aiment me voir jouer car je pense qu’il n’y en a pas beaucoup. Je sais que si je fais trois bonnes actions et une mauvaise, on retiendra la ratée. Si je ne traverse pas le terrain tout seul, on dira que j’ai fait un mauvais match. C’est comme ça. On me demande plus qu’aux autres, je l’ai certainement cherché aussi.

Travaillez-vous plus le secteur défensif à La Rochelle que par le passé ?

Oui, et c’est une des raisons pour lesquelles ma première saison ici a été compliquée. Ce n’est un secret pour personne, la défense est très importante pour Ronan O’Gara, peut-être plus que pour les autres entraîneurs. Alors, j’ai travaillé dans mon coin. Je me suis énormément focalisé sur ça et je pense que ça m’a aussi fait défaut lors du dernier exercice. J’en ai oublié mes qualités offensives. Je ne pensais qu’à réussir mon plaquage. J’estime être un joueur de feeling, j’ai besoin de confiance pour faire des différences ballon en main.

Vous n’avez pas été convoqué par le staff du XV de France pour préparer la Coupe du monde. Y a-t-il eu un moment avant l’annonce de la liste où vous avez compris que vous ne feriez pas partie de l’aventure ?

Je savais que ça allait être compliqué pour faire partie du groupe, il ne faut pas se mentir. Je sais que je n’ai pas donné une très bonne image de moi-même en Australie, lors de la tournée d’été 2021. Ce fut une période compliquée à vivre, je n’avais pas forcément envie de partir loin de chez moi. Pour expliquer simplement : je commençais à me lasser de partir pendant plusieurs semaines à des milliers de kilomètres de mes proches. Quand j’ai vu que je n’étais pas appelé lors de la tournée de novembre ni durant le dernier Tournoi des 6 Nations, j’ai compris. Il faut se faire une raison. De jeunes joueurs ont explosé et méritent plus leur place que moi en équipe de France.

Était-ce votre dernière chance de jouer un Mondial ?

Je pense, oui. J’aurais aimé avoir une Coupe du monde à mon actif durant ma carrière mais c’est ainsi. Je ne peux m’en prendre qu’à moi-même. Les cartes étaient entre mes mains il y a quelques saisons et je n’ai pas forcément travaillé assez pour préserver ma place.

Avez-vous fait un trait sur la sélection ?

Je ne suis pas du style à annoncer ma retraite internationale. Tant que je serai en activité, je répondrai présent si on m’appelle, et avec le sourire. C’est toujours un honneur de représenter son pays. Mais je dirais que ma vie a pris un autre tournant. Je ne vais pas en rajeunissant, je viens de devenir père de famille… Tout s’axe différemment. On peut dire que l’équipe de France est un peu moins ma priorité que par le passé.

Vous êtes hors-jeu !

Cet article est réservé aux abonnés.

Profitez de notre offre pour lire la suite.

Abonnement SANS ENGAGEMENT à partir de

0,99€ le premier mois

Je m'abonne
Voir les commentaires
Réagir
Vous avez droit à 3 commentaires par jour. Pour contribuer en illimité, abonnez vous. S'abonner

Souhaitez-vous recevoir une notification lors de la réponse d’un(e) internaute à votre commentaire ?

Les commentaires (1)
Tikopat Il y a 8 mois Le 24/08/2023 à 15:29

Teddy Thomas a été, est et restera à mes yeux une pépite de notre rugby qui n'a malheureusement pas pu, su,ou voulu éclore. Je respecte comme beaucoup d'autres ses choix de vie et lui dit toute mon admiration. Chapeau bas Mr Thomas !