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Coupe du monde de rugby 2023 / XV de France - Zéro tracas après la victoire face aux Fidji mais du "blabla" avant la liste des 33

Par Vincent Bissonnet
  • Zéro tracas mais du "blabla".
    Zéro tracas mais du "blabla".
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à Nantes, le XV de France s’est offert un deuxième succès et s’est évité de nouveaux pépins. Une jolie manière de clore l’aventure à 42 avant la fameuse annonce que tout le monde attend.

Si la flèche du temps est censée l’amener à une progression constante, le XV de France ne pouvait espérer rivaliser, samedi, avec la maîtrise totale des événements affichée lors de sa précédente rencontre face aux Fidji. Remémorez-vous cette large victoire bonifiée, avec zéro point encaissé, sans l’ombre d’un pépin musculaire ou d’une torsion… Vous n’en avez aucun souvenir ? Vous êtes tout excusés. En novembre 2020, à quelques jours d’un affrontement programmé à Vannes, les Fidjiens avaient dû déclarer forfait, Covid oblige. Et les Bleus avaient été "logiquement" déclarés vainqueurs sur tapis vert, 28 à 0.

Samedi, les plus pessimistes et hypocondriaques supporters tricolores auraient sans aucun doute signé des deux mains pour un tel scénario : zéro tracas, un peu de blabla et place aux "33". Une semaine après avoir dit bon rétablissement à Romain Ntamack et à bientôt à Cyril Baille, la France du rugby s’était tournée fébrilement vers l’Ouest, avec ce fichu mauvais pressentiment à l’esprit : Grégory Alldritt et sa bande avaient peut-être plus à perdre qu’à gagner en croisant la route des gaillards du Pacifique. Le forfait de Josua Tuisova, le matin même du match, avait été un premier signe rassurant et un soulagement pour le service traumatologie du CHU de Nantes même si, dans l’après-midi, la contagion de blessures avait continué de se répandre par-delà les mers, jusqu’à frapper l’insubmersible XV du Trèfle et son talonneur Dan Sheehan. Nul n’est à l’abri, qu’on se le dise. Y compris sa majesté Owen Farrell, soudainement destitué de son totem d’immunité. Tout compte fait, et de manière presque surprenante, La Beaujoire ne s’est pas avérée être un gazon maudit. Et il aurait été bien dommage, à la réflexion, d’en passer par du tapis vert. Cette confrontation face aux Fidji a apporté son petit lot d’enseignements et d’ondes positives sur la route du Mondial. Les adeptes d’ufologie ont été tout heureux de retrouver leur Ovni Melvyn Jaminet, auteur d’une prestation au presque parfait au pied, de celles qui l’avaient placé sur orbite il y a deux ans, avec des coups de "tatane" mémorables ; les supporters toulousains ont aussi dû apprécier à leur juste valeur le retour de flamme d’un incandescent Peato Mauvaka et le retour – tout court – du si précieux François Cros ; les inquiets des lignes arrière ont sûrement été rassérénés par l’impact retrouvé de Jonathan Danty et par les accélérations d’un Louis Bielle-Biarrey "épatant et qui n’en finit plus de nous épater", comme le présente si bien Maxime Lucu.

Une part de mystère voulue ?

Et collectivement, dans tout ça ? Car si les prestations individuelles ont capté l’attention au long de ce mois d’août, le mois de septembre viendra nous rappeler que le rugby reste éminemment, évidemment un sport d’équipe. On n’en sait pas beaucoup plus, à dire vrai. Parmi les certitudes du jour, les Bleus ont tenu le bras de fer physique. Ils en avaient d’ailleurs fait une question d’honneur : "On nous avait martelé que l’on allait subir, comme il y a cinq ans, quand l’équipe avait perdu au Stade de France, grogne le demi de mêlée. Nous avions à cœur de rivaliser. Il fallait montrer que l’on est en France et que l’on prépare la Coupe du monde." Mission accomplie en l’occurrence. Dans la transformation, une poignée de séquences et d’étincelles auront suffi pour déborder la défense fidjienne, ni plus ni moins. Le jeu de ligne tricolore garde encore une bonne part de mystère. Est-ce voulu ? Est-ce dû aux rotations d’effectif ? Seul l’avenir nous le dira : "Certains détails ont été ajoutés dans notre jeu de possession de façon très efficace", relève, sans en dire plus, un Fabien Galthié résolument positif. Et le supremo de percevoir ainsi une "montée en puissance" et de présenter les limites du moment comme autant de "points d’amélioration". L’été ne sert à rien d’autre qu’à ça, après tout. À avancer. À se construire. À tenter. À expérimenter, aussi. Samedi, on a même vu Peato Mauvaka glisser en troisième ligne sur la fin : "C’était prémédité, en sourit le sélectionneur. Avec ces matchs de préparation, on arrive parfois à faire ce que l’on avait prévu, parfois on est coincé." De la galère de Saint-Étienne à la croisière de Nantes, il est passé d’un extrême à un autre, en l’espace de sept jours. On oubliera bien vite ce troisième galop estival sans que ça ne tourmente personne. Les rencontres de préparation marquent rarement les esprits pour de bonnes raisons, si vous voyez où l’on veut en revenir…

Le détour par La Beaujoire va, quoi qu’il en soit, laisser une trace dans la mémoire de ce groupe. En Loire-Atlantique, la colonie a vécu ses derniers véritables instants à 42. Avant l’inévitable déchirement de l’annonce, ce lundi, et la perspective de la séparation, tôt ou tard, selon l’article 18 alinéa 24 de la dernière convention FFR-LNR. Les illusions ensoleillées de l’été vont subitement faire face à la froide réalité de la rentrée. Ça va trancher, les chéris : "C’est le point de passage que l’on redoutait, souffle Maxime Lucu. On le savait. Ce sera un moment difficile. Il y en a neuf d’entre nous qui vont avoir un peu de déception. Ça fait partie de la chose, ça ne va pas être très joyeux pendant deux jours. Mais il faut en passer par là."

Un "non-événement" en direct sur TF1

Au sortir de La Beaujoire, l’heure des "il faut qu’on parle" avait sonné. Qu’ils soient dits la bouche en cul-de-poule et/ou accompagnés d’un long câlin réconfortant, les mots de la fin n’en restent pas moins douloureux à entendre. Dès samedi soir, Fabien Galthié, le bourreau des cœurs attitré, commençait à passer du baume là où ça allait faire mal : "Cette liste, vous en faites un événement mais il pourrait y en avoir certains qui ne seront pas là au début, qui ne seront pas dans les 33 et qui seront les héros de cette compétition." Au risque de vous contredire cher Fabien, vous ne prendriez pas l’avion ce lundi matin depuis Biarritz pour vous rendre sur le plateau du JT de 13 heures de TF1 si ladite annonce était un non-événement. Mais qu’importe la forme, revenons-en au fond : "Notre objectif était de faire progresser un groupe de 42 voire 44 joueurs et je crois que tous auront passé un cap à tous les niveaux, physique, rugbystique et dans la gestion émotionnelle", estimait le boss. Sur ce point, en revanche, on a tendance à le rejoindre. Le premier volet de l’aventure censée mener le XV de France sur le toit du monde a vu la troupe s’enrichir au prix d’une émulation sûrement sans précédent : Louis Bielle-Biarrey est entré sur la scène internationale par la grande porte, Emilien Gailleton a poussé ses homologues à se sublimer au centre, Paul Boudehent a fait vaciller la hiérarchie en troisième ligne, Pierre Bourgarit a montré que la France avait trois numéros 1 potentiels au numéro 2 ; restés dans l’ombre jusqu’alors, Dylan Cretin et Florian Verhaeghe ont sorti leurs atouts, à Nantes… Tous n’en seront pas, évidemment. Dont certains qui auraient allègrement mérité de poursuivre l’épopée.

"Tous les gars qui seront pris penseront beaucoup à eux", commençait à compatir Maxime Lucu, samedi soir. Loin des yeux mais pas du cœur : les promesses de l’été sont si belles à l’oreille. Mais voilà que l’automne pointe déjà et il n’est pas du genre à laisser de place aux sentiments. Quoi qu’il en soit, il y aura un avant et un après 21 août. Espérons, pour ceux qui restent, que le meilleur est à venir. Aux autres, on ne peut que souhaiter bon vent. Et peut-être à bientôt, qui sait ?

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