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Coupe du monde 2023/XV de France - Du placard au capitanat, Brice Dulin de retour en bleu 862 jours plus tard

Par Vincent Bissonnet
  • Brice Dulin n'a plus porté le maillot du XV de France depuis 2021.
    Brice Dulin n'a plus porté le maillot du XV de France depuis 2021. Icon Sport
  • Cela fait 862 jours que Dulin n'a plus connu le maillot bleu.
    Cela fait 862 jours que Dulin n'a plus connu le maillot bleu. Icon Sport
Publié le Mis à jour
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On n’a plus vu Brice Dulin en sélection depuis un France-Écosse de mars 2021 dont il fut un acteur malheureux. Désigné capitaine ce samedi, il entend vivre une parenthèse enchantée, qui pourrait le mener jusqu'au Mondial avec les Bleus.

Pendant des mois, deux longues années même, on a cru – et craint pour lui – que la dernière image de Brice Dulin sous le maillot bleu serait celle d’un compétiteur blessé voire meurtri. Le 26 mars 2021, au terme d’un France - Écosse entamé avec l’espoir de remporter le Tournoi, une tentative de relance de sa part, à la sirène, avait initié une séquence au long cours conclue par un essai assassin de Duhan Van der Merwe. Au cœur de quatre années abouties collectivement, ces quelques secondes d’approximation et de confusion marquent un petit point noir, comme l’avait noté Fabien Galthié, cet hiver : « Nous avons tout de même un ratio de victoires impressionnant, avec, par exemple, une seule défaite à domicile en quatre ans, contre l’Écosse, dans les arrêts de jeu d’un match qui était gagné… »

Maudit 26 mars, décidément. Pour tous et encore plus pour Brice Dulin. Élu joueur de la Coupe d’automne des Nations trois mois plus tôt, co-meilleur marqueur français de cette édition-là du Tournoi et héros de toute une nation une semaine plus tôt face au pays de Galles, l’Agenais de naissance avait assumé une erreur qui lui ressemble si peu, d’ailleurs, lui, numéro 15 rassurant par excellence : « C’est vraiment ma prise de décision qui a été mauvaise », avait-il conclu. Faute avouée, à moitié pardonnée ? Toujours est-il que son compteur international est depuis resté bloqué à 36 sélections. Interrogé à ce sujet en fin d’année dernière, le Lot-et-Garonnais disait vouloir croire en une coïncidence : « Je ne pense pas que ce soit lié. C’est le fait d’avoir joué les deux finales avec La Rochelle (ce qui l’avait privé de la tournée en Australie, N.D.L.R.) en suivant, l’arrivée de nouveaux joueurs, la politique du groupe … C’est pour ça qu’il faut toujours être à son meilleur niveau car il y a des opportunités ou non qui se présentent. »

L’âge aidant, il se voulait philosophe face à l’émergence d’une nouvelle vague et à sa mise en retrait : « Peut-être que plus jeune, j’en aurais voulu à la terre entière car je n’aurais pas eu le même recul. Je ne veux plus perdre d’énergie pour rien. Il faut juste que je sois alerte pour saisir la moindre chance. » Le compétiteur, apaisé, n’en restait pas moins en éveil : « Je sais que je peux revenir à mon meilleur niveau, que j’ai connu il n’y a pas si longtemps. […] Je sais que je suis capable de faire de bonnes choses. Après, il faut les faire souvent. Le plus souvent possible (sourire). »

"Un gros coup de fouet"

À son horizon, l’échéance de la Coupe du monde se dessinait, inévitablement. Comment ne pas y penser ? Comment ne pas y croire, dans un coin de la tête ? « Évidemment mais on est plein à avoir cet objectif, soufflait-il alors. C’est d’autant plus mon cas que ça risque d’être la dernière saison où j’aurais l’opportunité de vivre ces moments-là. Je veux tout donner. Et on verra. Je veux au moins être sûr d’avoir fait mon maximum pour exister. » Il n’y a rien de plus beau qu’une promesse tenue. Comme il en avait émis le souhait, Brice Dulin a depuis réalisé plein « de bonnes choses » et « le plus souvent possible ».

Le Maritime a même sûrement atteint un niveau de performance inédit en quatorze ans de professionnalisme avec une épatante série de prestations trois étoiles : en demi-finale puis en finale de Champions Cup, à Saint-Sébastien face à Bordeaux-Bègles et encore au Stade de France une semaine après, il a brillé par sa maîtrise du poste et son intelligence de jeu. Au-delà de son pied gauche et son aisance dans les airs, on l’a aussi vu retrouver de l’allant offensivement (2,3 défenseurs battus et 0,4 franchissement par match, sept « try assists »…). Cet état de grâce individuel, magnifié dans un collectif performant, a été récompensé par deux finales - ses neuvième et dixième en carrière, excusez du peu - et une deuxième Champions Cup.

Rémi Tales, son ancien partenaire et nouvel entraîneur au Stade rochelais, a apprécié le retour de flamme de son ami. Sans être surpris : « « Dudule » fait partie de la trempe des joueurs qui font basculer les matchs, se subliment dans les grands moments et tirent tout le monde vers le haut. Quand on voit la maturité qu’il a affichée sur l’action du ping-pong rugby face à l’UBB en demi-finale, c’est impressionnant. Sur le coup, tout le public gueule mais lui reste dans son truc et ça finit par une touche dans les vingt-deux adverses. À côté de ça, dans le duel décisif face à Louis Bielle-Biarrey, il a récupéré tous les ballons aériens. »

Ce choc générationnel trouve, ironie de l’histoire, son prolongement cet été. Le temps n’a guère d’emprise sur Brice Dulin. Ou plutôt il est parvenu à le dompter : « Il a un peu moins de pattes qu’à Castres mais sur la maîtrise du poste d’arrière, et par rapport à ce que La Rochelle attend sur l’occupation et la pression, c’est un des meilleurs au monde à son poste. » Le double champion de France et d’Europe, insatiable compétiteur, a su se réinventer, dans son style et au-delà des terrains. Son sens du « timing », tellement évident sous les chandelles, a aussi été précieux dans ses choix de club : Brice Dulin a presque toujours été au bon endroit au bon moment. Il a gagné partout où il est passé et s’est imposé dans chaque contexte.

À Deflandre peut-être encore plus qu’ailleurs. « La chance qu’il a, il se l’est procurée, affirmait l’ancien 10 international, en juin. Au Racing, sur la fin, il avait eu une période de moins bien. Le départ à La Rochelle avait été une décision forte. Physiquement et mentalement, ça lui a mis un gros coup de fouet. Et vice-versa. C’était un club en phase ascendante qui n’avait jamais gagné de titre. Il lui a amené sa sérénité et sa rage de gagner. » Et « Talo » de se projeter alors sur ce que toute la France du rugby pressentait : le retour imminent de Brice Dulin en Bleu. « Ramos est très bon mais Brice affiche aussi un niveau international depuis un bon moment aussi », concluait-il.

Capitaine samedi d’une équipe rajeunie

Le 21 juin, l’annonce de son nom parmi les 42 premiers élus amenés à préparer la Coupe du monde dans l’Hexagone a résonné comme une évidence. Le contraire aurait en tout cas été des plus étonnants. Un mois et demi après cette nouvelle convocation, Brice Dulin s’apprête à donner le coup d’envoi du troisième chapitre de sa carrière internationale : le premier l’avait lancé de la meilleure des manières - avec cinq victoires sur ses cinq premières sélections en 2012 - avant de décliner jusqu’en 2017 ; le deuxième, de l’automne 2020 à l’hiver 2021, avait été intense, prometteur et tellement frustrant avec la fin que l’on connaît. « Ça a été beaucoup de galères et de tristesse, avait-il reconnu en fin d’année dernière au sujet de sa décennie tricolore. J’espère au moins que les mauvais moments passés ont servi à la remise en question du fonctionnement de la sélection. La nouvelle génération est hyperperformante et amène beaucoup de bonheur. Il y en a d’autres qui étaient avec moi à l’époque et qui ont la chance de vivre de bons moments désormais. »

À Edimbourg, ce samedi, Brice Dulin - qui a même été désigné capitaine - va tenter de s’inscrire dans cette dynamique et de prouver ce qu’il peut apporter. Si l’arrière affiche le même ratio efficacité-sérénité à Murrayfield que sur ses grands rendez-vous avec La Rochelle, il donnerait encore plus de consistance à sa candidature pour une place dans le groupe des 33. Au-delà de Thomas Ramos, auteur d’une saison de très haut vol, les jeux restent ouverts pour compléter le fond du terrain. Non polyvalent, plus capé depuis deux ans, l’international n°1040 part de loin mais s’avance avec de l’élan et de l’allant vers ce défi majuscule : « Je me sens extrêmement bien : j’enchaîne les matchs, j’ai de l’énergie et sur le terrain, tout se passe à merveille, nous confiait-il, fin juin. L’âge n’est qu’un chiffre. Ce qui importe, c’est le ressenti et il est hyper bon pour l’instant. J’enchaîne, je prends du plaisir et ça se ressent dans mon jeu, je crois. Je suis libéré. » Huit ans après avoir vécu le jour le plus noir de l’histoire du rugby national, à Cardiff, face aux Blacks, dans un rôle contre-nature d’ailier, le Rochelais espère être un acteur de la plus belle des conquêtes. Le troisième - et dernier - chapitre de son aventure en Bleu pourrait être le plus court mais aussi le plus beau.

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Les commentaires (5)
CasimirLeYeti Il y a 8 mois Le 04/08/2023 à 02:25

Dulin est un excellent arrière, très bon au pied, sur les ballons hauts, solide en défense et avec une excellente relance qui hélas ne donne généralement rien, car à la place de servir un partenaire à hauteur, il choisit systématiquement le un contre un, action finissant par du jeu au sol. Donc, c'est un arrière offensif, mais pas un arrière collectif. Un souvenir de ses anciens sports ?

raphoulefuturrugbyman Il y a 8 mois Le 03/08/2023 à 12:34

Dulin c'est le meilleur arrière .allez dulin

Lechim Il y a 8 mois Le 03/08/2023 à 12:54

Le meilleur après Ramos, Jaminet, Ferté, etc, etc....

LeaneRugby Il y a 8 mois Le 03/08/2023 à 13:34

@lechim peut être Ramos mais pas les autres ! Jamais dans l'abus !

cantewitko Il y a 8 mois Le 03/08/2023 à 18:23

Un peu étrange de les comparer car ils ne jouent pas de la même façon et ont chacun des atouts forts... sauf Ferté, tellement bon mais tellement inexpérimenté aussi
N'oubliez pas Jaminet et ses coups de pied qui peuvent changer les choses face à des équipes lourdes (Sud AF)
Moi je retiens plutôt que Galthié a le choix et selon sa stratégie il choisira... Ce qui ne réduira pas la qualité de celui qui ne sera pas dans les 33 !
Et si Brice rentre à La Rochelle son, club sera content. Idem pour Melvyn et le ST !!!