L'édito du vendredi 28 juillet : Gazzotti, c’est déjà demain

Par Léo Faure
  • Marko Gazzotti lors du championnant du monde u20
    Marko Gazzotti lors du championnant du monde u20 - Steve Haag / Icon Sport
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La nouvelle génération U20 à peine titrée, troisième du nom et de rang, qu’on est déjà demain. Il reste de l’écume au fond des bières, du soleil sur les promesses de vacances et, sans attendre, la vérité crue du rugby pro nous rattrape. Elle les rattrape eux, surtout, ces jeunes joueurs déjà bien au fait des pratiques du monde des "grands".

C’est de Marko Gazzotti que l’on parle ici. Pas n’importe lequel de ces Bleuets d’or. Parmi les plus en vue de la partition hégémonique jouée en Afrique du Sud, il s’éclaire désormais de deux projecteurs : celui des surclassés (il sera encore, l’an prochain, un international junior) et celui des lauriers. Élu meilleur joueur de la compétition, à 18 ans, et après une demi-finale insolente de facilité face à l’Angleterre. Il n’a rien volé, tout le mérite lui revient.

Mais Gazzotti a donc signifié cette semaine à ses dirigeants grenoblois qu’il ne faudrait plus compter sur lui, l’an prochain. Déjà happé par les filets du Top 14. Ce qui nous inspire, à ce stade, deux réflexions.

La première est sportive. Est-ce trop tôt ? Ou, dit autrement, Gazzotti aurait-il tiré plus de profit à jouer 25 matchs en Pro D2, plutôt que 12 en Top 14 ? À ce sujet, les promesses de l’ancien président Boudjellal, jurant qu’on progresse en s’entraînant avec des stars, n’ont jamais trouvé de preuve dans les faits. En revanche, on sait qu’on progresse en jouant, et beaucoup si possible. Ça, c’est du vérifié dans les faits.

Voilà pour le chemin qui attend désormais Marko Gazzotti : si sa promesse est évidente, immense, sa concrétisation n’aura rien d’une sinécure. Si jeune, une année de plus dans l’incubateur du Pro D2 aurait certainement donné au jeune homme le temps d’apprendre son métier d’homme. Mais tout va vite.

La seconde réflexion est plus économique. Que Gazzotti signe à l’UBB n’est pas une surprise. Ce n’est donc qu’une confirmation qui est venue, cette semaine. En même temps qu’une autre : le temps du rugby où un contrat se respectait jusqu’à son terme est désormais révolu.

C’est la faute de personne et tout le monde. Les joueurs, pressés par l’urgence d’une carrière riche mais courte, ne veulent plus perdre de temps pour saisir l’opportunité qui ne se représentera peut-être pas l’année suivante. Ils émettent des envies de départ, sans attendre la date échéance apposée dès l’entame de leur contrat. C’est une petite entreprise qu’ils gèrent, celle de leur carrière et de leur vie. Cela ne fait jamais bon ménage avec les sentiments.

Les clubs ne sont pas en reste. Quand ils sont en manque de liquidités pour clôturer leur exercice, ils savent très bien se passer d’états d’âme pour placer un ou deux de leurs joyaux sur le marché. Ça ne se dit jamais franchement, mais on fait savoir par entremetteurs que s’il y a une offre, on l’écoutera. Question d’équilibre économique. C’était une autre vérité qu’assénait en son temps le président Boudjellal.

Souvent en avance sur le temps des affaires, l’ancienne grande gueule du RCT avait cette fois raison. Et cent fois raison. Il promettait que, pour tenir leurs équilibres économiques précaires, pour créer et faire circuler de la valeur, les clubs professionnels en viendraient tôt ou tard à ces achats-ventes de contrats avant leur terme. Nous y voilà, dans une pratique désormais pleinement démocratisée. Parce qu’une année restante au contrat se paye et au prix fort, elle justifie les efforts mis sur la formation. Pas question, donc d’attendre la fin du contrat et de seules indemnités de formation qui ne font pas la maille dans le bilan comptable. La somme qui ruisselle de ces ventes fait alors tourner la boutique, pour des investissements futurs. En ce sens, Grenoble, dont on n’ignore plus les difficultés financières, pleure Gazzotti autant qu’il le remercie.

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Les commentaires (2)
Alpin38 Il y a 8 mois Le 28/07/2023 à 21:31

"Grenoble remercie Gazzotti". C'est une blague ? Hueber a clairement dit qu'il comptait sur Gazzotti. Et le départ de Gazzotti au dernier moment, après la période de recrutement, laisse le club démuni et en manque de 8. Et il faut que Gazzotti soit remercié ?

Lechim Il y a 8 mois Le 28/07/2023 à 10:16

Dura lex sed lex! (la loi du monde pro....)