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Exclusif. Anthony Jelonch : "Tous les signaux sont au vert"

Par Jérémy Fadat
  • Anthony Jelonch est confiant quant à une potentielle reprise avant, ou pendant la Coupe du monde.
    Anthony Jelonch est confiant quant à une potentielle reprise avant, ou pendant la Coupe du monde. Icon Sport
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Opéré le 6 mars de sa rupture du ligament croisé antérieur du genou gauche, le flanker poursuit sa course contre-la-montre pour revenir à temps et disputer la Coupe du monde. Jusque-là, les voyants sont au vert...

Mercredi midi, après avoir vu le chirurgien plus tôt ("ça s’est bien passé", dit-il), Anthony Jelonch a accepté de se confier sur ses sensations actuelles, lui qui est en avance sur les temps de passage initialement fixés. Depuis que son genou a lâché le 26 février dernier au Stade de France, sur un plaquage grâce auquel il a sauvé les siens d’un essai face à l’écosse, l’intéressé travaille avec l’ambition d’être prêt pour la Coupe du monde. Après avoir vécu de l’intérieur la fin de saison toulousaine, le Gersois partira lundi – quand les Bleus se réuniront à Monaco – pour quatre semaines de rééducation au Cers de Capbreton qui vont s’avérer décisives. Comme à son habitude, il fait preuve d’un détachement détonnant…

Comment avez-vous vécu les phases finales du Stade toulousain ?

J’étais avec le groupe, impliqué dans les semaines de match. J’essayais de donner ce que je pouvais mais les mecs étaient prêts, avaient tous envie de la même chose. Cela s’est bien passé, j’en suis heureux.

Quel était votre rôle ?

Il était humain, c’était de leur offrir de la bonne humeur (sourire). Je n’avais pas le temps de faire davantage puisque j’étais à fond dans ma rééducation aussi, chaque jour.

Avez-vous retrouvé vos sensations de joueur ?

Un peu. Mais les "hors groupe" n’étaient pas là tout au long de la préparation. Les mecs retenus partaient trois jours avant les matchs et on n’arrivait que le jour même. On les voyait pendant une heure ou une heure et demie, et on tentait de leur transmettre un peu de force pour sortir un grand match. ça a fonctionné en demie et en finale ! C’était sympa quand même. Je me dis que je ne joue plus au rugby que depuis trois mois et demi… ça passe vite, j’ai l’impression de ne pas avoir arrêté du tout. Même si ce ce fut un peu dur de vivre ces phases finales hors du terrain, je pense avoir trouvé ma place.

Vous sentez-vous champion à part entière ?

Oui, parce que j’étais là une bonne partie de la saison. Je n’ai raté que la fin. C’était compliqué de manquer la finale mais, pour moi, c’est le succès de tout un groupe.

Quel est le moment fort retenez-vous ?

Si un moment m’a marqué, c’est l’essai de Romain (Ntamack) en finale, à la 78e minute. C’est au-dessus de tout.

Y croyiez-vous encore à cet instant ?

Franchement, non. Plus grand-monde n’y croyait, ou juste les quinze joueurs sur le terrain. Ils ont bien fait car ils sont allés chercher un truc énorme, une émotion unique et un moment de joie partagé par tellement de personnes.

Avez-vous pu profiter de la fête ensuite ?

J’ai célébré le samedi soir, puis j’ai arrêté ensuite. Pendant que les autres continuaient la fête, je suis reparti au boulot le lundi. ça ne me dérangeait pas, j’ai des objectifs en tête, en vue de la Coupe du monde comme chacun sait. Je veux revenir et ce n’est pas en me mettant trois ou quatre jours de bringue que je peux le faire.

Alors, où en êtes-vous aujourd’hui ?

J’en suis à trois mois et demi de rééducation, tout le monde est content jusque-là. J’ai bien récupéré sur le genou et sur l’ischio, j’ai repris la course. Je vais partir la semaine prochaine au Cers de Capbreton pour tout juillet et on en saura davantage à la fin du mois.

Etes-vous dans les temps de passage fixés ?

Oui, tous les signaux sont au vert. C’est bien, mais je n’en dirai pas plus. Certes, je suis en avance là mais je ne le serai peut-être pas dans un mois. Disons que je suis, pour l’instant, dans les objectifs que je m’étais fixés.

Ces fameux objectifs doivent vous aider à avancer…

Avoir la Coupe du monde en tête aide à se lever tous les matins, c’est évident. Mais, même s’il n’y avait pas eu cet événement, je me serais fixé d’autres objectifs et j’aurais aimé revenir vite pour aider mon club. Mon ambition, c’est de retrouver les terrains. Voilà pourquoi, chaque matin, j’ai envie d’aller bosser, me soigner, me rééduquer.

Vous êtes parti début mai travailler durant cinq semaines auprès du kiné du XVde France Bruno Boussagol, basé à Montpellier. Pourquoi ?

On a bossé en pleine nature, en montagne, dans l’eau à la mer… On a fait du travail spécifique qui m’a beaucoup aidé et m’a fait bouger du Stade toulousain, changer de cadre. J’ai une très bonne relation avec Bruno, il m’a permis d’avancer sur cette période.

Était-ce une manière aussi de garder un lien direct avec le XV de France ?

Oui, mais ce n’est vraiment pas la seule raison. Cela vient surtout du bon rapport que j’ai avec lui à la base. Bien sûr, c’est grâce au XV de France. Je m’entendais bien avec lui, j’allais souvent le voir et, dès qu’il m’a proposé de me prendre avec lui cinq semaines, j’ai accepté. J’en ai donc parlé au club pour avoir cette option, pour changer d’air avec une personne de confiance.

Dès les jours suivant votre blessure, votre manager Ugo Mola avait d’ailleurs assuré que le Stade toulousain ferait tout pour que vous soyez au Mondial…

Oui, parce que le club pense d’abord au bien-être du joueur. Je crois que c’est assez normal, dans le sens où Ugo et les dirigeants savent que c’est important pour moi. Cela prouve qu’il y encore de l’humain dans notre milieu. Je remercie le club car toutes les parties concernées bossent bien ensemble.

Le staff sportif du XV de France, Fabien Galthié, a aussi indiqué être en contact constant avec vous. En quoi est-ce important ?

C’est bénéfique d’avoir ce suivi, cela me motive encore plus à accélérer ma rééducation. Mais, attention, je ne peux pas non plus aller plus vite que la musique. Il y a des temps de repos à respecter.

Avez-vous connu des moments de doute ?

Oui, quand je suis fatigué… ça arrive mais la baisse n’est pas mentale. C’est juste qu’il n’est plus possible de bosser parce que je n’en peux plus. Mais, je ralentis deux ou trois jours, je me repose un peu, et je repars.

Tout le monde souligne votre mental hors norme…

Je ne sais pas, je suis comme ça certainement. Moi, j’y crois, tout le temps, et je me donnerai à fond pour continuer à y croire. Mais, de manière générale, je suis convaincu qu’on n’arrive pas au haut niveau sans un gros mental.

Dès le lendemain de votre grave blessure, vous nous aviez parlé de votre expérience à Castres en 2018, quand vous êtes revenu après une longue absence pour être titulaire en demi-finale et en finale…

Parce que je me dis qu’il ne faut jamais cesser d’y croire. Cela en est la preuve. Je n’avais pas joué au rugby depuis presque quatre mois et j’étais titulaire en demi-finale du Top 14. Puis en finale, avec le titre de champion à la clé. En 2017-2018, j’avais dû faire moins de matchs que cette saison avec le Stade toulousain, mais j’étais là pour les deux plus importants.

Cela vous donne-t-il des idées pour la Coupe du monde ?

Évidemment. J’y croirai jusqu’au bout. Même si je ne suis pas dans la liste des trente-trois au départ, tant que la Coupe du monde n’est pas finie, je bosserai à fond. Je ne souhaite pas qu’il y ait un problème avec un joueur mais, si c’est le cas et s’il faut aider l’équipe, je serai présent.

Mais votre objectif reste-t-il d’être prêt mi-août ?

Oui, mais je ne vais pas me mettre la tête au fond du seau si je n’y arrive pas. Comment ira mon genou ? Comment est-ce que j’acceptterai les charges de travail ? Si tous les voyants sont encore au vert, feu. Sinon, je travaillerai encore plus en club et j’attendrai. Le Mondial dure deux mois, c’est long.

Vous connaissez le groupe par cœur. Est-ce rassurant si vous devez prendre le train en marche ?

Oui, ça l’est. Je connais tout le monde, je suis extrêmement bien intégré dans le groupe France. J’en suis conscient mais il faut que mon genou aille bien.

On vous sent guidé par un certain optimisme…

Je le suis, je l’ai toujours été et je le serai jusqu’au bout. Mais nous n’en sommes qu’à trois mois et demi et, quoi que je dise, c’est mon genou qui décidera. Je savais, depuis le départ, que je ne pourrais intégrer le groupe qu’en cours de route, que je ne serai pas pris au début. C’est tout à fait normal. On ne retient pas un infirme pour une préparation de Coupe du monde. C’est à moi de bosser dur de mon côté et on me laissera peut-être une chance de me montrer. On verra si je suis en forme mi-août.

Fabien Galthié a insisté sur le fait que le groupe est ouvert jusqu’à la fin…

Oui, mais dans mon cas, c’est mon genou le problème (sourire). Je suis désolé de le répéter mais c’est la vérité. Je pense au XV de France tous les jours mais je ne dois pas en faire une fixette. Oui, c’est mon objectif, ma ligne de mire. Mais, si ça ne veut pas, c’est comme ça. Ce que je sais, c’est que j’aurai tout donné pour y être. Il y a aussi une part de destin là-dedans.

Si votre genou est prêt à temps, avez-vous une crainte sur un éventuel manque de rythme ?

Non, je vais reprendre du rythme et je serai frais mentalement ou physiquement. Je n’aurai peut-être pas 80 minutes dans les jambes au début. Enfin, je ne sais même pas, je n’ai jamais connu de blessure aussi longue.

Aurez-vous un pincement au cœur lundi, au moment du premier rassemblement des Bleus à Monaco ?

Non, pas du tout. Moi, il faut que je bosse, je suis concentré sur mon genou. Sincèrement, je ne suis pas malheureux de ne pas y être. C’est ainsi, je l’ai accepté. Me morfondre ne m’aiderait pas à me soigner et à me remettre sur pied. J’aurai quelques mecs au téléphone et ça va être génial pour eux. Je sais qu’ils vont passer des grands moments, qu’ils vont faire des trucs magnifiques.

Vous avez été titulaire lors des tous les matchs du grand chelem 2022, lors des victoires face aux All Blacks ou aux Springboks, vous étiez capitaine en Australie en 2021. Ce statut vous offre-t-il des garanties ?

Absolument pas. On parle de l’équipe de France et, le maillot, il faut aller le gagner. Si j’ai été autant de fois titulaire, c’est que les entraîneurs ont confiance en moi. Quand je reviendrai de blessure, je ferai tout pour regagner une place dans le groupe, puis peut-être une place de remplaçant, puis de titulaire. Je ne brûle pas les étapes mais ça se passe aussi dans la tête. J’irai le chercher au mental.

Plusieurs personnes nous ont confié que votre blessure, en plaquant Duhan van der Merwe pour le priver d’un essai en bout de ligne, était révélatrice de votre état d’esprit…

Si c’était à refaire, je referai exactement la même chose. Mais je croiserais les doigts pour ne pas que ça pète cette fois (sourire). Quand la ligne est aussi proche, tu ne te poses pas de question et tu agis pour l’équipe. Je vais faire en sorte que cette blessure me rende plus fort. Certains sont passés par là et m’ont confié que ce serait le cas.

Rêvez-vous de chanter la Marseillaise en septembre ou octobre prochain ?

Bien sûr. Si je parviens à revenir dans le groupe avant cette Coupe du monde, je peux vous assurer que la première Marseillaise va me foutre les frissons. Ce sera exceptionnel, mais je pense d’abord à être prêt à temps.

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Les commentaires (2)
CasimirLeYeti Il y a 10 mois Le 28/06/2023 à 20:43

Il va le faire, incroyable, mais il va y arriver, le bougre !

Philippe64 Il y a 10 mois Le 28/06/2023 à 19:45

très ravi pour lui de sa bonne rééducation