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Oscars Midi Olympique - La longue saga

Par Jérôme Prévot
  • Philippe Sella, Walter Spanghero, Pierre Albaladejo et Pierre Lagisquet
    Philippe Sella, Walter Spanghero, Pierre Albaladejo et Pierre Lagisquet MIDI-OLYMPIQUE - GARCIA BERNARD
Publié le Mis à jour
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En 70 ans, les oscars sont passés de la « bonne franquette » des cafés-restaurants aux adresses les plus prestigieuses de la capitale. Récit d’une saga qui a épousé l’évolution du sport et de la presse.

Le chemin des Oscars Midi Olympique, en 70 ans est passé de la bonne franquette admirative à la soirée business Masterclass (les anglicismes en sont le prix à payer). Ils ont démarré dans les années 50 à une époque où la presse écrite était florissante, mais où le réflexe des soirées fastueuses n’allait pas de soi. Henri Gatineau, ancien rédacteur en chef de Midi Olympique se souvient : « Il y a un océan qui sépare les Oscars de mon époque de ceux d’aujourd’hui. Nous remettions le trophée au siège des clubs… qui n’avaient pas de siège. Nous nous retrouvions dans des bistrots ou des cafés. Les installations propres aux clubs sont arrivées bien plus tard. » Au milieu des banquettes en moleskine, des billards et des publicités Byrrh et Cinzano, la délégation du Midi Olympique allait à la rencontre d’un joueur, de son entourage familial et sportif. La remise de l’Oscar ne déplaçait pas les foules. « Nous avions sincèrement le désir de récompenser celui que nous estimons être le meilleur joueur de la saison. À part nous-même, l’intérêt médiatique était limité. Disons que c’était une création maison qui profitait à la maison. » Le Midol des années 50-60 se faisait plaisir en espérant au moins la reconnaissance des joueurs qui se voyaient distingués. Henri Gatineau garde trois personnalités solaires en tête de ces années héroïques : Lucien Mias, Jean-Pierre Rives et Serge Blanco.

Des remises dans des cafés

Mais qui, un jour, trouva ce concept ? « L’idée fut le fruit d’une décision collégiale, à l’époque où Jean-Jacques Pouech était rédacteur en chef et Joseph Gonzalez administrateur, chargé de la partie commerciale avec son épouse. Mais vous savez, en ce temps-là il n’y avait pas vraiment de limite entre les services. Les journalistes faisaient de la publicité, de la promotion et de la communication en permanence. » La délégation de Midi Olympique se résumait souvent à trois personnes, Raymond Sautet, Fernand Cousteaux, et Henri Gatineau, parfois accueillis sans chaleur excessive. « Pour vous donner une idée du non-faste, je me souviens d’un Oscar remis à Jean Prat dans son café à Lourdes et à la fin, il nous avait fait payer les consommations. »
Dans ces cafés-bars-brasseries des années 50-60, les chambrées étaient parfois très moyennes : « L’ossature dirigeante et les joueurs guère plus. Les élus locaux par exemple ne se déplaçaient pas. » À Toulouse, Jean-Pierre Rives recevait ses Oscars dans la brasserie : « Le Coq d’Or ».
Dans les années 70, les Oscars reçoivent le patronage d’Adidas, célèbre marque d’équipement sportifs, avec une déclinaison mensuelle, mais sans paillettes pour autant. Directeur commercial de Midi Olympique, Louis Pons se souvient : « La cérémonie avait lieu dans les vestiaires après l’entraînement du club. L’ancien international Pierre Danos remettait le trophée au joueur en compagnie de son entraîneur et de son président. Le Midi Olympique de la semaine suivante publiait une photo. C’était très modeste, pas au niveau du talent du gars récompensé. L’Oscar annuel se passait dans un restaurant avec le lauréat et sa famille, mais à mon souvenir, il n’y avait même pas les autres joueurs du club. »

Alliance avec France Info

En 1987, on demanda à Louis Pons de trouver une solution de remplacement en quatre ou cinq mois. Les Oscars vont alors changer de visage, la cérémonie annuelle va gagner en visibilité et en prestige en s’appuyant sur une stratégie globale qui courait sur toute l’année, via les oscars mensuels totalement revitalisés : « J’ai sollicité les quatre-vingts municipalités représentées en première division. Toutes m’ont donné leur adhésion pour un accueil dans leurs salles les plus prestigieuses. Et en plus, elles fournissaient la nourriture solide, fait très important. Phase 2, j’ai trouvé un nouveau partenaire, Puma, et son directeur Albert Beaudrand. Phase 3, on s’est ouvert à de nouveaux partenaires pour les boissons, Pernod, Kriter et Heineken. On a trouvé aussi des partenaires touristiques tels que la station de Font-Romeu ou le département des Hautes-Pyrénées. » Très vite, Louis Pons ressent la nécessité de trouver un soutien médiatique. En 1987, une nouvelle station vient d’apparaître : France Info, premier média d’information continue. Louis Pons réussit à accrocher Midi Olympique à ce train de la modernité. « Il y avait un reportage chaque mois avec trois questions posées par Henri Stassinet. » Les auditeurs de la Station étaient familiarisés avec le concept d’Oscars tout au long de la saison. En plus Pascal Delannoy, fondateur de France Info, adhérait à fond au projet, il fit tout pour le faciliter. La cérémonie des Oscars annuels apparut comme un vrai aboutissement ; « Nous organisions le rendez-vous à la Maison de la Radio, à l’auditorium Olivier Messiaen. Rendez-vous compte : une capacité de 2000 personnes. À la première édition, on a refusé du monde. » Plus fort encore, outre le lauréat, Midi Olympique, fort de ses bonnes relations avec Albert Ferrasse, obtint la venue de l’équipe de France. « Les joueurs avaient en plus la gentillesse de se mêler à la foule des invités, dans le hall d’accueil de la Maison de la Radio. Je me souviens d’un directeur de Radio France, Michel Boyon, qui m’a dit qu’il n’avait jamais vu une telle excitation dans sa station. »
Louis Pons ne se fait pas passer pour un faiseur d’or : « La cérémonie ne coûtait pas un rond au journal, mais n’en rapportait pas non plus. Ce n’était que du prestige et du marketing pour faire connaître le journal. J’ajoute que grâce à Jean Réveillon et Christian Quidet, nous avions aussi des images sur France Télévisions. Midi Olympique apparaissait dans des coins de France où il avait peu de notoriété. Ceci dit, certains partenaires prenaient ensuite des publicités dans les pages du journal. »
Dans les années 2000, les festivités furent métamorphosées, sous l’influence de Philippe Oustric, la promotion fit place au business à part entière. Les Oscars sont passés à sept catégories, ils ont gagné les lieux les plus prestigieux de la capitale. Et surtout le nouveau boss ouvrit la cérémonie au monde entier et donc à des vedettes anglo-saxonnes de l’hémisphère Sud. Il développa une politique de gros partenariats, et de package avec des entreprises de taille nationale et internationale. Trois cents P.-D.G. ou directeurs généraux seront présents ce vendredi soir, pour donner un ordre d’idée. Il faut débourser 60 000 euros pour une table de dix. Dan Carter a confié qu’il voyait là, « la plus grande soirée rugby business du monde ».

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