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Mercato, mode d’emploi

Par Yanis GUILLOU
  • Pro D2 - David Gérard, de par son poste de manager, est la pierre angulaire du recrutement montalbanais.
    Pro D2 - David Gérard, de par son poste de manager, est la pierre angulaire du recrutement montalbanais. - AURELIEN DELANDHUY MIDI OLYMPIQUE
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Le marché des transferts est une période très faste, qui crée beaucoup d’animation au sein d’un club. Pendant plusieurs mois, des managers s’efforcent de trouver la perle rare pour permettre à leur équipe d’évoluer. Mais au fait, comment se déroule un mercato dans le rugby ?

Ah, ce bon vieux mercato. Cette période dans laquelle se mêlent stress, excitation, espoir et parfois déceptions ou intense sentiment de réussite. Ce petit univers un peu à part, loin des terrains, qui fait aussi pleinement partie du rugby de haut niveau. Dans un monde professionnel où l’on parle de plus en plus de rachats de contrat ou de salaires alléchants, certains parviennent à tirer leur épingle du jeu en se construisant une belle petite bande, quand d’autres peinent un peu plus à trouver chaussures à leur pied. En Pro D2 cette saison, Montauban fait plutôt partie de la première catégorie. L’USM a cet été enregistré l’arrivée de nombreux beaux noms pour tenter d’assouvir son envie irrépressible de top 6. "Je suis content de notre mercato et des mecs qui nous ont rejoint, mais ce sont les résultats qui nous donneront raison ou pas", affirmait David Gérard, l’instigateur du mercato tarn-et-garonnais. Mais au fait, comment ça se construit une période de transferts ? Il y a naturellement plusieurs étapes et la première d’entre-elles n’est pas dans le sens des arrivées. "La complexité c’est que tu veux anticiper mais tu ne peux pas, posait Gérard. Tu as des joueurs en fin de contrat et tu dois les respecter car la décision de les conserver, ou pas, est en suspens. Une fois qu’elle est prise, tu dois le plus rapidement possible te mettre à la recherche du profil voulu. Et il faut que ce dernier te permette de monter d’un cran." En clair, il n’y a pas de recherches actives tant que la situation des joueurs en fin de contrat n’est pas fixée. "Ce ne sont pas seulement des joueurs mais des familles, il faut gérer l’humain." Ménager les egos, une chose très importante puisqu’il est forcément plus difficile pour un joueur de se donner à 100 % sur le terrain lorsqu’il sait qu’il ne sera pas conservé par le club à l’issue de la saison. Surtout que la période de mercato débute bien souvent au milieu de la saison, vers le mois de janvier, et que de nombreux matchs restent à jouer afin de réaliser les objectifs du club. "Je connais des équipes qui se sont tué la saison dans cette période-là, témoignait Gérard. Car il y a une mauvaise gestion du mercato et de l’humain. Il faut être clair même si les choses sont désagréables, il faut les entendre."

L’inévitable négociation

Une fois les décisions prises concernant les joueurs en fin de contrat, les entraîneurs ou managers peuvent ensuite se lancer dans une recherche de joueurs. Une chasse à l’homme qui est dictée par les besoins de l’équipe, forcément, et qui est régulée par plusieurs facteurs. "Il faut prendre en compte l’âge, la possible évolution, le salaire et après tu as le côté humain qui est important, rappelait le manager montalbanais. Moi, mon recrutement n’est pas seulement sportif, il est humain." Après de nombreux coups de téléphone et quelques temps de réflexion, les premiers noms commencent à émerger et il devient l’heure d’une autre partie prenante du marché des transferts : la négociation. Un échange qui se fait d’abord avec le joueur, pour vérifier s’il correspond bien au profil recherché et cerner des ambitions communes avec le club. Ensuite, les négociations s’intensifient avec les fameux agents, avec qui travaillent la quasi-totalité des joueurs professionnels aujourd’hui. David Gérard décrivait : "Il y a un temps pour tout. Il y a le temps pour parler rugby et un temps pour parler négociation de contrat. Agent et joueur chacun doit garder sa place. Ensuite, il n’y a jamais rien de facile dans une négociation. C’est comme ça : le mercato c’est fait de réussites et d’échecs. Et parfois, même si le joueur signe, il y a des échecs." En plus, les clubs sont confrontés à un autre facteur lors des négociations : l’impact des médias.

Un investissement quotidien

Les journalistes, gourmands de ce genre d’informations, peuvent parfois être au courant des négociations et le révéler aux yeux de tous. Ce qui ne fait pas les affaires des clubs, qui souhaitent agir le plus discrètement possible tant que rien n’est signé. "C’est embêtant quand tu négocies avec un joueur et que ça sort dans la presse, reconnaissait Gérard. Parce que du coup, il y a des clubs qui sont mis au courant que ce mec en question est potentiellement intéressé de venir et ils peuvent se mettre en ordre de bataille pour entrer dans la course." Forcément, cela fait monter les enchères ! En tant que manager de Montauban, David Gérard est la pierre angulaire du mercato tarn-et-garonnais. "Je gère tout de A à Z", glisse celui qui s’apprête à entamer sa deuxième saison à Sapiac, même s’il échange évidemment beaucoup avec son staff lors de cette période. De par son poste, il est celui qui doit diriger le mercato et donner une ligne directrice à l’équipe. "Il ne faut pas que je m’éloigne trop du terrain et de la partie sportive car c’est mon métier. Mais quand tu es en charge de la partie sportive, tu es aussi en charge du recrutement." Un travail qui demande énormément d’énergie, et un investissement quotidien. À ce rythme effréné, il faut ajouter le stress, le doute et la pression. "Ça fait partie de ma façon d’être. Si tu n’as pas peur d’échouer, tu n’évolues plus. Tu as plus ou moins besoin de temps pour prendre les décisions et si ça ne fonctionne pas, c’est toi qui sautes", résume Gérard.

Pour faire des gros coups comme l’a fait Montauban cette année, il faut aussi parfois traverser des pays pour être au plus proche du joueur et lui présenter le projet. À l’USM, cela a été le cas pour Semesa Rokoduguni. L’ailier international Anglais évoluait dans son club de toujours, Bath et c’est le président montalbanais Jean-Claude Maillard qui est allé en personne en Angleterre, afin de convaincre le colosse de signer. "Roko le président est allé en Angleterre parce que c’est quelqu’un qui est "important" dans notre recrutement. Il faut remercier le président pour ça car peu l’auraient fait. Le plus dur dans cette négociation était de convaincre le joueur car il fallait qu’il quitte l’Angleterre, là où il a construit sa vie. En plus, c’est un soldat dans son pays, il a une forte attache." Finalement, Rokoduguni s’est bien engagé à Montauban, se rapprochant par la même occasion de son frère, Peni, qui évolue à Colomiers. Le résultat de toute cette période a finalement été pour l’USM un total de quatorze arrivées, et un renforcement clair de l’effectif. Même s’il faut attendre les résultats pour juger de la réussite, ou non, d’un mercato, il semble que Montauban a su faire ce qu’il fallait. Un brin amusé, David Gérard pensait tout de même : "Des fois le meilleur mercato, ce n’est pas recruter à outrance. C’est juste garder ses joueurs !" Désormais, la compétition à repris et les managers peuvent de nouveau se concentrer sur le terrain. Mais dans le rugby, le mercato n’est jamais très loin…

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