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Champions Cup - Dépassé en Irlande, Toulouse a trouvé son maître

Par Jérémy FADAT
  • Pour Toulouse,  c’est le Leinster hostile
    Pour Toulouse, c’est le Leinster hostile - Laurent Dard
Publié le
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Comme en 2019, le Stade toulousain s’est lourdement incliné à l’Aviva Stadium contre le Leinster, abandonnant son titre de champion d’Europe. Placés samedi face à leur réalité d’une saison en dents de scie, malgré les récents exploits en Champions Cup, les hommes d’Ugo Mola savent au moins par où passera leur reconquête.

Ugo Mola avait espéré un autre anniversaire. Samedi, le manager toulousain fêtait ses 49 ans mais le cadeau que lui avait réservé le Leinster de Leo Cullen était empoisonné : quatre-vingts minutes dans le labyrinthe infernal de l’Aviva Stadium, dont on ne s’extirpe jamais quand les animateurs irlandais sont dans un tel état de lévitation.

À l’heure de souffler les bougies, lucide et sincère, le technicien a reconnu que ses troupes ne pouvaient espérer la moindre part du gâteau : « Nous sommes tombés sur une équipe bien meilleure que la nôtre à l’instant T. De manière logique, elle jouera un match de plus. Pour battre une formation pareille, il faut faire carton plein. Nous étions loin de cette configuration. Nous avons pris une vraie leçon de rugby. J’insiste mais le constat est froid et clair : la meilleure équipe a gagné.» 

Le tableau d’affichage, même si le score final peut sembler lourd (40-17), est là pour le rappeler. Certes, il s’agira toujours de se souvenir qu’Antoine Dupont avait donné l’avantage en tout début de match après avoir ramassé un des rares ballons adverses égaré et traversé le terrain, de croire que Selevasio Tolofua avait relancé un semblant de suspense après l’heure de jeu (30-17), de disserter sur la pénaltouche ratée par Romain Ntamack dans la foulée qui aurait laissé croire à l’impossible ou d’enrager sur des décisions arbitrales qui, comme à chaque fois qu’on est nettement dominé, furent souvent en défaveur des Toulousains. La vérité est pourtant limpide : le champion d’Europe en titre, héroïque en huitième de finale retour en Ulster puis lors du quart interminable face au Munster à Dublin, n’était cette fois pas invité.

Même endroit, même rival, même résultat

Une semaine après sa folle série de tirs au but, Toulouse était de retour à l’Aviva Stadium. Une "salle" mais deux ambiances. Surtout deux adversaires, lesquels n’ont plus grand-chose à voir. « Il va falloir revenir ici, face à encore plus costaud », avait prédit Romain Ntamack, après avoir fait tomber le Munster. Il savait de quoi il parlait. Le Leinster, c’est peu ou prou l’actuel XV de l’Irlande.

Celui avec lequel les Bleus ont bataillé pour s’adjuger le grand chelem lors du dernier Tournoi. Une montagne et un modèle, pour lequel Mola n’avait pas tari d’éloges avant ce rendez-vous. Un moyen de renverser la pression malgré la cinquième étoile brodée sur le maillot stadiste ? Depuis samedi soir, chacun a compris que c’était juste une évidence, que les Rouge et Noir ont prise en pleine face. « Je ne faisais pas de la langue de bois quand je disais que j’étais assez admiratif du rugby que proposait cette équipe, a souligné l’intéressé après la claque. Je le suis encore plus désormais. Le côté positif, c’est qu’une belle équipe de rugby est en finale de Coupe d’Europe, qui pratique un jeu enthousiasmant, peut-être très structuré et codifié, mais qui a le mérite d’être d’une efficacité rare. » 

Celui négatif, c’est que ce n’est pas le Stade toulousain. Et la sensation est extrêmement proche de celle d’avril 2019, quand il avait signé son retour dans le dernier carré de la compétition mais s’était incliné dans des proportions similaires (30-12) au même endroit, face au même rival. Est-ce à dire que l’histoire se répète inlassablement ? Ce serait occulter les trois fabuleuses années qui séparent ces deux rencards manqués dans la capitale irlandaise.

Marchand : « Ce n’est pas dur de se projeter »

En 2019, les Toulousains – prometteurs mais vierges à ce niveau – avaient payé pour grandir. Ils l’ont fait, avec un Bouclier de Brennus deux mois plus tard. Le tout suivi d’un doublé magistral la saison passée et de succès en cascade en sélection. Mais il fallait un jour chuter, et l’accepter. « On a eu la chance de beaucoup gagner mais cela fait aussi partie de notre apprentissage, plaide Matthis Lebel. Il n’y a pas à rougir de cette défaite, contre plus fort. »

Aussi irrésistible soit-elle, cette équipe a toujours le même plafond de verre. Il se nomme Leinster et, au-delà de son identité, réside dans ce rugby ultra-organisé et pragmatique face auquel Toulouse n’a pas encore trouvé la clé pour sortir du cadre et imposer ce joyeux bordel dans lequel il se régale. « Du moment où on ne met pas de vitesse, on devient ordinaire », avoue Mola.

Il y a trois ans, ses hommes furent placés face à leurs limites. Samedi, c’était face à la réalité de leur saison, qu’elle soit physique, stratégique ou contextuelle. Depuis des mois, ils sont moins souverains, moins impressionnants qu’ils ne l’étaient lors du précédent exercice. Pas de secret ou de hasard, ils n’étaient pas armés pour espérer enrayer la formidable machine du Leinster. Même si le talent et le caractère avaient permis des exploits lors des dernières semaines. « Il faut savoir d’où l’on vient, clame Julien Marchand. On a aussi produit de belles choses et il faut les garder pour la suite. » Il ne parle pas que des prochaines étapes.

Le noyau dur de cet effectif, dans la force de l’âge, a déjà prolongé jusqu’en 2027 ou 2028, et il sera renforcé par des recrues de choix tels Capuozzo, Jaminet ou Barassi. « Ce n’est pas dur de se projeter sur l’avenir, poursuit le capitaine. Pour une grande partie, on se connaît bien, on prend plaisir à évoluer ensemble. Baisser la tête serait une erreur. La seule chose qui compte, c’est d’aller le plus loin possible. »  

Et retrouver cette bête noire pour reprendre le cours de sa légende. « Même quand on prend quarante points, on ne perd pas notre temps en disputant ce genre de match, prophétise Mola. Il faut en sortir indemne, analyser les choses pour revenir meilleurs dans quelque temps. » 

Durant la dynastie Novès, les Toulousains avait aussi son bourreau sur la scène européenne : ces Wasps qui les avaient laminé en octobre 1996 (77-17) ou battu en finale en 2004. La bande à Mola possède le sien. Si son équipe, qui raflait tout, se cherchait un défi à sa démesure, elle l’a trouvé pour les années à venir : accrocher le Leinster au tableau de chasse. Passé la mise en quarantaine de Dublin, la cinquantaine n’en serait que plus belle pour le manager.

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