L'édito : chambrer est aussi jouer

  • L'ouvreur rochelais Jules Plisson a été la cible de sifflets particulièrement virulents à Brive.
    L'ouvreur rochelais Jules Plisson a été la cible de sifflets particulièrement virulents à Brive. Icon Sport/FEP - Anthony Bibard
Publié le Mis à jour
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L'édito du lundi par Emmanuel Massicard... Nous sommes nombreux à s’être plaints ces derniers temps des débordements, agressivité et parfois violence, de pseudos supporters de football qui ont défrayé la chronique à Nice comme à Lens et ailleurs.


Nous sommes quasi tout autant à craindre que notre petit monde ovale soit à son tour rattrapé par de tels relents de bêtise à l’état brut, l’anonymat des tribunes et de la foule rendant certains plus « courageux » et encore plus cons qu’ils ne l’auraient jamais rêvé… Aussi vrai que la plus volontariste des bulles sanitaires peut avoir des fuites, nous ne sommes en effet pas à l’abri de voir la stupidité — parfois l’ignominie- prendre racine dans nos gradins.
Voilà sans doute pourquoi certains présidents ont rapidement pris la parole dès qu’une partie de leur public se fit grande gueule. Dernier en date à faire redescendre la température : Simon Gillham. Félicitons le président de Brive d’avoir rappelé à l’ordre ses supporters « chambreurs » qui avaient ciblé le Rochelais Jules Plisson après ses échecs au pied, samedi en Corrèze. Question de respect, selon Simon. Un tel devoir n’échappe à personne, même pas au meilleur public de France en 2019.
Plus tôt dans l’actuelle saison, Didier Lacroix avait déjà sermonné les siens, coupables d’avoir trop vite et ouvertement « branché » les Toulonnais un dimanche soir de large victoire. Tous furent rappelés à l’humilité. Ce qui ne fait jamais de mal, surtout pour qui doit vivre avec l’image de la grosse tête associée à celle d’un club collectionneur de titres.
Apprécions l’aubaine de pouvoir compter sur des dirigeants qui posent haut l’exigence et qui défendent avec ardeur la convivialité, le goût de la fête et le vivre ensemble cher au rugby.
Mais, pour autant, ne tombons pas dans le panneau. Nous sommes ici très loin des jets de projectiles, menaces, insultes et autres coups de poing qui salissent à intervalles réguliers l’image du foot. Le public briviste peut bien avoir filé tremblote et migraine à l’ami Jules, et alors ? Il ne l’a pas insulté. Encore moins menacé ou bousculé. Et, jusqu’à preuve du contraire, la Corrèze n’a rien d’un enfer sur terre, pas pire en tous les cas que Toulon, Toulouse, Perpignan, Clermont ou La Rochelle.
Regardez bien, le rugby français a gommé ses « générales » qui participaient d’un folklore pas toujours glorieux, les « marrons » ont quasiment disparu et les adversaires se félicitent désormais plus souvent qu’à leur tour. Assez pour que l’on ait l’impression de vivre parfois au pays des bisounours, un monde parfaitement aseptisé et tiré à quatre épingles.
Faut-il en plus que l’on se taise dans les stades, que l’on y applaudisse l’adversaire plus fort que ses propres joueurs pour être encore plus aimable ?
Ce n’est pas notre avis. Parce que « chambrer » a toujours fait partie de notre sport où jouer à domicile - avec l’appui d’un public bruyant, festif et forcément chauvin, remember Biarritz-Bayonne fin juin - doit demeurer un avantage. Question d’authenticité. N’en déplaise aux bien-pensants de service, le vrai spectacle est aussi dans les tribunes. Pas toujours en mode préfabriqué.

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