Transfert de Kolbe : le million et la (fausse) morale

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L'édito du vendredi par LEO FAURE... Faut-il réellement s’émouvoir qu’un joueur, engagé dans un club, quitte celui-ci avant la fin de son contrat ? Cheslin Kolbe, puisque c’est de lui dont il s’agit et qu’il faut bien dire son nom, a agité son monde toute la semaine. Pas seulement lui. Aussi son actuel employeur, Toulouse, et le RCT qui convoite le joueur.

C’est une affaire de gros sous qui se joue entre Rouge et Noir. On compte ici en millions, dans un rugby professionnel qui a depuis bien longtemps basculé dans une logique d’entreprise. Plus la peine de s’en émouvoir, il est trop tard pour les puristes de l’amateurisme.

Les chiffres donnent le tournis ? Au vrai, il n’y a pas de quoi. C’est cynique, certainement. Mais Kolbe compte parmi les meilleurs joueurs de la planète, sans doute le plus spectaculaire de tous. En tournant la roue des salaires pour réclamer le million d’euros annuel, lui et ses conseillers ne sont pas si loin de la vérité du marché des salaires.

Avec une telle somme, il ne serait pas le joueur le mieux payé au monde. Même pas le mieux payé d’un championnat, le Top 14, dont il est le plus beau joyau. Ses performances justifieraient pourtant un tel statut. Malgré ses absences. Malgré ses inconstances, depuis la Coupe du monde au Japon qui le fit roi de ce sport.

Kolbe est un joueur qui vous fait venir au stade, vous émerveille, vous lève de votre siège pour applaudir. En ça, il génère déjà une économie dont il réclame sa part. Le Springbok aux appuis intrépides est aussi un joueur qui vous fait champion, quand viennent les grands matchs. Sa finale du dernier Top 14, en juin, tient du chef-d’œuvre. Celle de 2017, face à Clermont pour le premier titre de l’ère Lacroix-Mola à Toulouse, était de la même veine.

Qu’est-ce qui choque tant, alors, le concernant et la possibilité de son départ vers le RCT ? Ses prétentions détonnent, dans un rugby pro qui se clame en crise financière liée au contexte sanitaire. Mais elles sont aussi en phase avec la réalité du marché des salaires de stars en Top 14, dans les mêmes sphères qu’un Fickou, Laumape ou Pollard. Le montant de son transfert, discuté un peu en dessous des 2 millions d’euros, n’est pas non plus totalement incohérent quand on se souvient, par exemple, que Baptiste Pesenti a quitté Pau pour le Racing 92, cet été, pour 500 000 € et une seule année de contrat à racheter.

La rupture d’un contrat contre indemnité, pour un transfert dans un autre club, n’a plus rien de nouveau en rugby professionnel. Fickou deux fois et Maestri, pour les exemples récents les plus symboliques, en sont les témoins. Les sommes évoquées n’ont rien de déconnectées de la réalité du rugby en 2021. Finalement, plus qu’une folie des grandeurs, c’est une question de morale qu’exacerbe le dossier Kolbe. Parce qu’il est un joueur hors norme, les réactions sont également disproportionnées.

Devrait-il, coûte que coûte, aller au bout de son contrat ? Rien ne l’y oblige, dès lors que toutes les parties y trouvent leur intérêt. C’est le cas ici, quand le joueur et les deux clubs sont engagés dans des discussions trop constructives pour être contraintes. Si tout le monde est heureux, alors, que demander de plus ?

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Les commentaires (4)
brandon_15 Il y a 2 années Le 27/08/2021 à 20:49

Ce qui confirme hélas ! que la gestion calamiteuse de M. Bouscatel a plongé le Stade dans la déshérence financière...qui perdure. Et ne pourra que s'amplifier....l'appétit venant en mangeant. A quand la démission de M. Lacroix ?

jmbegue Il y a 2 années Le 27/08/2021 à 23:52

Étonnant...
Pourquoi Lacroix devrait-il démissionner? Le ST est un club qui n'a pas d'actionnaire pouvant financer le club à l'envi et fonctionne sur ses fonds propres et le sponsoring. Les dirigeants ne veulent pas rentrer la spirale infernale de la hausse incessante des salaires. Je trouve cela extrêmement louable et courageux.

jmbegue Il y a 2 années Le 27/08/2021 à 12:15

Le Stade Toulousain doit beaucoup à Kolbe.
Que ce soit d'un point de vue sportif et financier.
Et Kolbe doit beaucoup au Stade. Où serait-il actuellement s'il n'était pas venu à Toulouse. Serait-il devenu le "meilleur joueur du monde"? Aurait-il endossé le maillot Springbok?
Donc il n'y a pas de traître, de vendu, de club marchand de viande...
Le problème pour moi est ailleurs. Le problème c'est la démesure. La démesure qu'apporte le pognon et la finance. Nous sommes certes loin du foot, mais ce n'est pas une excuse ou une consolation.
Pour pouvoir lutter, les clubs, les joueurs acceptent de déroger à la morale (oh! le vilain mot!!!). La morale c'est le respect du public.
Or quand un club ne peut fonctionner qu'avec l'aide de la publicité, il va déroger forcément. Car un des buts de la pub est de prendre les gens pour des c**ns pour leur vendre tout et n'importe quoi. Comme disait le patron d'une chaîne de télé commerciale, il est là pour vendre de l'espace de cerveau disponible.
Quand je vois aux Sept Deniers, un "kop" pour les gamins et que ce "kop" est sponsorisé par un fabricant de sandwiches dont le but principal est de faire des bénéfices en se moquant totalement de la santé des consommateurs en général et des jeunes en particulier, quand je vois un mec qui est depuis devenu président de fédération faire de la pub pour du jambon, je pense que je résume un peu vers quoi on va.
La morale c'est aussi les liens entre joueurs, encadrement, dirigeants qui sont mis à mal par les intérêts financiers. Pour en revenir à ce que se doivent les uns et les autres, il est vraiment regrettable que les dettes morales soient devenues bien peu de choses face à l'argent.

neotaist Il y a 2 années Le 27/08/2021 à 11:50

ce qui est dommage, c'est que le rugby est mis à l'index, ça ne parle plus que d'euros et de fair play financier, les valeurs de clubs ne se retrouvent plus que dans les divisions bien inférieures ( heureusement ) la ou on n'augmente pas les abonnements et les consommations à la buvette parce qu'un nouveau joueur a été engagé, je sais, mon commentaire pourrait passer pour un passéiste aigri, mais loin de moi l'idée de critiquer à tout crin l'évolution financière de ce sport ( et de bien d'autres ) mais je crois que l'on a laissé en route un grande part d'amateurisme qui nous faisait aimer nos clubs de cœur ou l'on se retrouvaient pour des troisième mi temps gagnantes ou perdantes.
enfin, ce petit commentaire pour dire que pour moi, ( 72 ans ) je pense que le vrai esprit rugby que l'on nous a enseigné s'étiole peu à peu au profit du nombre de chiffres avant la virgule, dommage ou pas, je ne sais pas, peut être que je vieillis un peu trop vite !